Le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, a affirmé, dans l’entretien accordé samedi soir à des médias locaux, sa volonté d’aller le plus loin possible pour «moraliser la vie publique».
Constituant l’un des points les plus importants de son programme, lequel repose sur 54 engagements, cette question a été abordée à plusieurs reprises lors de son entrevue avec les représentants de ces médias. Tout en évoquant des «réticences aux changement» parmi ceux qui continuent à vouloir générer des «pénuries de produits alimentaires», mettant à mal le pouvoir d’achat des citoyens, Tebboune a estimé que la peine maximale de 30 ans de réclusion criminelle réservée aux spéculateurs n’est pas exagérée.
«C’est peu pour ceux qui s’attaquent à la pitance des plus pauvres», a-t-il dit, insistant sur la préservation de la classe moyenne, «base stabilisatrice de la société». «Il faut appliquer les lois récemment réformées.
Le processus de moralisation de la vie publique devait justement passer par une refonte du dispositif juridique et la criminalisation de certains actes répréhensibles», a déclaré le chef de l’Etat, mettant en garde contre les velléités de déstabilisation qu’il attribue aux résidus de la «issaba» (bande), laquelle disposerait, selon lui, encore de fortunes colossales lui permettant de fomenter des pénuries et attiser la colère populaire. Il a cité, à ce propos, les dysfonctionnements observés dans les circuits de commercialisation des légumes secs qui généralement connaissent une forte demande en hiver, mais pas en été.
«La récréation est terminée et il n’est plus possible de revenir aux anciennes pratiques», a-t-il lancé, faisant référence à la fraude fiscale, la surfacturation, les fausses déclarations douanières et les affaires de corruption.
S’agissant des affaires de corruption, Tebboune a été catégorique dans son intervention, excluant toute «grâce présidentielle pour les personnes poursuivies et condamnés pour faits de corruption», allant à contresens des propositions avancées par certains partis politiques proposant un deal à la saoudienne : restitution de l’argent dilapidé contre une remise en liberté. «Pardonnez aux gens en contrepartie d’une restitution de l’argent volé est immoral.
Tout comme les discours de haine, la spéculation, les fausses informations qui pullulent sur les réseaux sociaux... D’où la nécessité de changer l’ensemble des lois pour asseoir une démarche de moralisation de la vie publique», a-t-il expliqué.
Instances de contrôle
Dans ce même cadre, le président Tebboune a insisté la régulation des opérations de commerce extérieur à travers la mise en place récemment d’instances de contrôle visant essentiellement à traquer les fausses déclarations douanières et les surfacturations qui ont saigné l’économie nationale.
A ce propos, il a évoqué la période allant entre 2009 et 2019 où le phénomène de surfacturation a atteint 30% de l’ensemble des transactions à d’importation, citant un rapport de la Banque européenne de développement consacré à l’Algérie.
Un phénomène qui n’a pas disparu avec son accession à la présidence de la République, a-t-il reconnu, mais qui a connu un grand reflux. «La surfacturation a représenté un montant évalué à 400 millions de dollars entre 2020 et 2023», a déclaré le chef de l’Etat, annonçant, au passage, la révision prochaine de la loi sur les partis politiques.
L’occasion pour lui de rappeler que plus de 750 candidats aux dernières législatives ont été confondus et leurs noms retirés des listes de candidatures pour des faits liés à l’argent sale. Il y a lieu de rappeler que le président Tebboune a, en juin dernier, lors d’un Conseil des ministres, inscrit la lutte contre le faux et l’usage de faux comme point essentiel à l’ordre du jour. Il avait affirmé que ce point auquel est consacré un avant-projet de loi s’inscrivait dans le cadre de «son engagement à moraliser la vie publique», et à lutter contre ce phénomène déplorable qui constitue une menace à la sécurité de l’Etat, selon communiqué de la présidence de la République.
«La lutte contre le faux et l’usage de faux s’inscrit dans le cadre de l’engagement visant à moraliser la vie publique, et ce à travers le renforcement de l’arsenal juridique visant à lutter contre ce phénomène déplorable qui affecte négativement le bon déroulement de l’administration algérienne et constitue une menace à la sécurité de l’Etat», a-t-il souligné.
Il a, en outre, mis en avant «l’importance de la rigueur dans le châtiment des auteurs ou personnes impliquées dans des crimes de faux et usage de faux, parallèlement à la réhabilitation de la concurrence légitime et loyale», ordonnant d’ «inclure tous les crimes de faux passibles de peines, dans ledit projet de loi ».