Un puissant vrombissement s’élève soudain, comme si un gigantesque essaim d’insectes avait envahi l’Eureka Park, l’un des nombreux sites du salon de l’électronique grand public de Las Vegas (CES).
Il s’agit en réalité d’une partie de drone soccer, ou football, avec des drones nés en Corée du Sud. Cinq drones rouges affrontent cinq drones bleus, tous pilotés avec des télécommandes par des joueurs et joueuses postés à l’extérieur du terrain de jeu grillagé, pour éviter qu’un drone en perdition n’aille blesser quelqu’un.
C’est parti pour trois minutes de jeu. Tout va très vite. Les drones -protégés dans des boules alvéolées de 40 cm de diamètre- décollent, virevoltent, se percutent, rebondissent sur les côtés et sur le sol recouvert d’un revêtement moelleux vert. Comme au football, l’objectif est de marquer un but. «Trois drones défenseurs restent devant le but», un anneau blanc de 60 centimètres de diamètre -surnommé donut- situé à 3,5 mètres de hauteur, explique à l’AFP Sean Greenhalgh, joueur professionnel de «drone soccer», 32 ans. Pour marquer, le drone doit traverser le donut. Ancien employé de la chaîne américaine de supermarchés Trader Joe’s, il a découvert cette discipline lors d’une formation de prises de vue par drone.
C’était il y a un an à peine. Il est désormais capitaine et principal attaquant de l’équipe américaine de «drone soccer», et l’enseigne à des enfants à partir de quatre ans. Et il paraît vivre assez confortablement de sa nouvelle passion. «Le jeu a été créé par un ingénieur qui s’est inspiré de Harry Potter», où les sorciers se passionnent pour le quidditch (sorte de football volant), explique Jasmine Lee, commentatrice du match. «C’est très difficile de marquer. Maintenir le drone en position stationnaire demande beaucoup d’expérience», dit-elle à l’AFP.
Harry Potter
L’inventeur du jeu travaillait pour l’institut de technologie sud-coréen Camtic, qui reste toujours impliqué dans la discipline puisque son patron est également le président de la Fédération internationale de «drone soccer» (Fida). Depuis sa création en 2016, la discipline a conquis vingt pays mais la Corée du Sud reste de très loin la plus fervente avec plus de 2000 équipes. Aux Etats-Unis, il n’y en a que trois mais plus de 5000 jeunes ont été formés, selon M. Greenhalgh. «Ils apprennent tout de A à Z, y compris la maintenance de l’appareil», plus petit pour l’apprentissage. La première ligue professionnelle a été créée en 2023 et la première Coupe du monde est prévue en Corée du Sud en 2025, indique Ro Sang Heub, PDG de Camtic et président de la Fida.
Un championnat du monde est programmé pour mai 2025 et la coupe du monde pour le mois d’octobre suivant. Son espoir ? Que le «drone soccer» soit totalement inclusif. Son rêve ? «La Fifa attire trois milliards de personnes, je rêve que ce soit la même chose pour le ‘drone soccer’», confie-t-il, songeant également aux Jeux olympiques. En arrière-plan, le match d’exhibition continue.
Les rouges mènent au score : 6-4. Tout va très vite. Seul l’attaquant principal peut marquer et, à chaque but, le donut franchi par le drone vire au rouge quelques secondes, le marqueur doit retourner près de son propre donut avant de repartir à l’attaque, aidé par son adjoint. S’il doit abandonner pour un problème technique, son adjoint prend la relève comme buteur, explique Sean Greenhalgh, l’un des vingt-cinq joueurs professionnels américains.
La Fida a établi des règles bien précises comme le poids des drones qui est contrôlé avant chaque partie et limité à 1,2 kg, batterie comprise.
En compétition, un match est composé de trois sets de trois minutes chacun entrecoupés de pauses de cinq minutes pour effectuer d’éventuelles réparations et affiner quelques réglages. Au final, les deux équipes terminent à égalité, 11-11. Dans trente minutes, les joueurs reviennent pour une nouvelle démonstration devant de nombreux curieux.