Conflit en République démocratique du Congo : Le Rwanda favorable à un sommet conjoint régional

03/02/2025 mis à jour: 01:55
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Des habitants fuient Kibati abondonnent les zones de combats à l'est de la RDC

Le Rwanda a exprimé hier son soutien à l’idée d’un sommet conjoint régional pour régler le conflit en cours en République démocratique du Congo (RDC), rapporte l’AFP citant la diplomatie rwandaise.

 Une proposition lancée vendredi, par les 16 pays membres de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), lesquels ont réclamé «un sommet conjoint» avec les 8 pays de la Communauté de l'Afrique de l'Est (EAC). Elle a pour objectif  «de réfléchir à la manière de régler la situation sécuritaire en République démocratique du Congo», où le groupe armé antigouvernemental M23 et l'armée rwandaise ont pris la grande ville de Goma (est) et avancent vers le Sud. L'EAC, qui compte parmi ses membres le Rwanda, a formulé cette même proposition deux jours plus tôt. Le ministère rwandais des Affaires étrangères a «salué le sommet conjoint proposé» dans un communiqué publié dimanche, tout en affirmant avoir «systématiquement plaidé en faveur d'une solution politique au conflit en cours». 

Excepté un appel au «cessez-le-feu», les positions des deux organisations apparaissent toutefois éloignées en attendant ce sommet commun. Vendredi, les dirigeants de la SADC ont «réaffirmé » leur «engagement indéfectible à continuer de soutenir la RDC dans sa quête de sauvegarde de son indépendance, de sa souveraineté et de son intégrité territoriale». L'EAC a pour sa part «fermement exhorté le gouvernement de la RDC à engager le dialogue avec tous les acteurs, dont le M23». 

Ce dont il n'est pas question côté SADC, dont la RDC est adhérente. Le retrait de la mission SAMIDRC de la SADC, déployée depuis 2023 dans la province congolaise du Nord-Kivu, est souhaité par le président rwandais Paul Kagame, pour qui la SAMIDRC n'est «pas une force de maintien de la paix» et n'a «pas sa place dans cette situation». Mais ce retrait ne semble pas d'actualité. Hier, le ministère rwandais des Affaires étrangères a de nouveau critiqué la présence de cette mission en RDC, en estimant qu'elle «ne devrait pas être là car elle s'ajoute aux problèmes déjà existants». 

Génocide et rébellions

Le Rwanda n'a jamais admis son soutien militaire au groupe armé M23, mais un rapport d'experts de l'ONU de juillet estime à environ 4000 hommes les forces rwandaises déployées dans l'est de la RDC. Kinshasa accuse Kigali de vouloir piller ses richesses naturelles dans la région. Le Rwanda nie et affirme vouloir éradiquer des groupes armés, notamment créés par d'ex-responsables hutus du génocide des Tutsi au Rwanda en 1994, qui menacent  sa sécurité. Les relations entre Kinshasa et Kigali ont pris une dimension conflictuelle depuis plus de 30 ans, conséquence du génocide rwandais. 

En effet, d’avril à juillet 1994, le génocide au Rwanda a fait selon l'ONU 800 mille morts, membres de la minorité tutsie ou hutus modérés, tués par les Forces armées rwandaises (FAR) et les milices extrémistes hutues. Plus d'un million de Rwandais hutus, dont de nombreux auteurs du génocide, se réfugient dans l'est du Zaïre (actuelle RDC) après la prise de pouvoir en juillet à Kigali par le Front patriotique rwandais (FPR), dirigé par Paul Kagame et dominé par les Tutsis. Kigali a déploré par la suite des incursions de miliciens sur son territoire et voit en les camps de réfugiés une menace à ses portes. Soutenue par le Rwanda et l'Ouganda, l'Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo-Zaïre (AFDL), dirigée par Laurent-Désiré Kabila, démantèle les camps de réfugiés rwandais hutus et marche sur Kinshasa.
En mai 1997, Mobutu chassé, Kabila se proclame chef de l'Etat. Mais les relations  entre ce dernier, qui sera assassiné en 2001 et ses anciens alliés se sont dégradées. 

Une nouvelle rébellion soutenue par le Rwanda commence en 1998 dans le Kivu et dégénère en une guerre impliquant plusieurs pays africains et des dizaines de groupes armés. Kinshasa accuse le Rwanda d'«agression», Kigali justifie son intervention par des raisons de «sécurité nationale». 

Les relations diplomatiques entre la RDC et le Rwanda sont rompues au lendemain du déclenchement de cette nouvelle guerre. Elles seront rétablies plus de dix ans plus tard. Le conflit tourne aussi autour du contrôle des ressources minières de la RDC et va jusqu'à opposer le Rwanda et l'Ouganda qui se disputent  en 2000 la ville diamantifère de Kisangani. Fin 2002, un accord de partage du pouvoir est signé à Kinshasa. Officiellement, il n'y a plus de troupes étrangères en RDC, mais les pays voisins seront régulièrement accusés d'y intervenir par groupes rebelles interposés. 

En 2004, une insurrection commence dans le Sud-Kivu et s'étendra ensuite au Nord, menée par deux officiers dissidents, dont le général Laurent Nkunda, issus de l'ex-rébellion pro-rwandaise du Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD). Kinshasa accuse le Rwanda, qui dément, de soutenir les dissidents.

 Deux ans plus tard, Nkunda lance son mouvement, le Congrès national pour la défense du peuple (CNDP). En 2008, Kinshasa accuse encore une fois Kigali d'envoyer des troupes pour appuyer le CNDP face à l'armée de RDC. 

L'année suivante, des soldats rwandais entrent en RDC, cette fois avec l'accord de Kinshasa, pour y traquer avec l'armée congolaise les rebelles rwandais hutus des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR). Nkunda est arrêté durant cette opération.

En 2012 apparait en RDC le M23 (Mouvement du 23 mars), né d'une mutinerie d'anciens rebelles tutsi du CNDP intégrés au sein de l'armée congolaise. Un rapport de l'ONU accuse le Rwanda d'armer ces rebelles.

Après avoir occupé plusieurs villes du Nord-Kivu, dont le chef-lieu Goma durant quelques jours, le M23 est vaincu en 2013 par l'armée congolaise et les Casques bleus.  Amnay Idir
 

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