Commentaire - Les donneurs de leçons

12/10/2024 mis à jour: 01:17
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Ce qu’est en train de vivre Vladimir Petkovic, depuis sa nomination à la tête de l’équipe nationale, rappelle aux anciens deux épisodes similaires, à des périodes différentes. C’est vrai que le métier d’entraîneur n’a jamais été facile, ni à la portée du premier venu comme de nos jours. Le Bosnien assiste, médusé, à un déferlement de critiques pas souvent justifiées.

Certes, sa fonction l’expose, comme tous ses collègues, à ce genre de situation. C’est de bonne guerre comme dirait l’autre. Cet exercice est indispensable, très souvent il a du bon, mais l’excès gâche tout. Alors que l’ancien coach de la Suisse commence à redresser la situation, améliore l’image de la sélection par des victoires (6 sur 7), marque beaucoup de buts (plus de la moitié en seconde période), encaisse un peu trop de buts (7), a replacé l’équipe nationale en tête des deux groupes où elle évolue (CAN 2025 et Coupe du monde 2026), une salve de critiques acerbes est déclenchée contre lui après chaque match, quel que soit le résultat. Beaucoup s’imaginent connaître le football mieux que lui et lui prodiguent des conseils gratuits.

Ç’aurait été bien s’ils l’avaient fait avant. Passons et voyons comment deux entraîneurs (un étranger et un Algérien) ont géré ce type de situation. Le premier est le Roumain Stefan Kovacs (1920-1995), ex-entraîneur de l’Ajax Amsterdam avec qui il a remporté 2 coupes d’Europe au début des années 1970. Le second est un Algérien qui n’est plus de ce monde.

Le Roumain choisi par la fédération française pour diriger les Bleus a fait face à une pluie de critiques lorsqu’il a dévoilé sa première liste de joueurs convoqués pour le premier match sous sa direction. Bombardé de questions sur le sujet lors de sa première conférence de presse, il a répondu : «Nous sommes 50 millions de sélectionneurs. Je suis le premier et seul responsable du choix des joueurs. Alors, ne vous fatiguez pas à vouloir choisir ou, pire, choisir à ma place.

C’est peine perdue». Les bons résultats aidant, il a tourné l’opinion à son avantage. En Algérie, durant la période de la réforme sportive, un club algérois (Division 1) a recruté un entraîneur aux compétences avérées et reconnues. Malheureusement pour lui et pour le club, les résultats en début de saison n’étaient pas ceux espérés. Après chaque match, le comité directeur se réunissait avec lui et chaque membre y allait de son analyse, ses critiques, ses choix de joueurs et tactiques.

Au bout du 4e match, le coach a eu l’ingénieuse idée d’ouvrir le débat et de lancer à la face des présents (les membres du comité directeur) : «Je vous rejoins sur ce que vous dites lors de nos réunions. Vos analyses sont pertinentes. Alors je propose que dorénavant cette réunion se tienne la veille du match, ainsi vous me ferez part de vos observations et remarques et je n’ai aucun doute que les bons résultats suivront. Vos remarques sont judicieuses et elles m’aideront à composer la meilleure équipe et à aligner les meilleurs joueurs».

Les membres du comité directeur ont compris le message du coach très rusé, qui avait ajouté : «Ainsi, lorsqu’on gagne je déclarerai sur la place que le mérite revient aux dirigeants». Tous ont compris son message. Être entraîneur est un métier, un sacerdoce. Ce métier ne peut être ouvert aux troubadours. Chacun à sa place et les vaches seront bien gardées, dit l’adage.

 

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