Avec la persistance des vagues de chaleurs en cette période estivale, les risques se multiplient sur le secteur agricole notamment avec les incendies qui menacent de plus en plus le couvert végétal et les exploitations agricoles.
Une situation qui pourrait engendrer d’énormes pertes aux agriculteurs avec comme solution d’indemnisation le recours aux fonds publics dédiés au secteur, à l’exemple Fonds de garantie contre les calamités agricoles (FGCA) créé en 1988 pour voler au secours des agriculteurs en cas d'événements non assurables. Justement, ce fonds a marqué ses limites, du fait des lenteurs administratives dans le traitement des dossiers d'indemnisation notamment.
La prise en charge des dossiers des incendies de l’été 2021 est dans ce sens un exemple édifiant de cette lenteur.
L’absence d’un dispositif d’assurance contre les calamités agricoles (DACA) pèse de plus en plus lourd. Ce dispositif, dont le lancement a fait pourtant l’objet d’annonces pourtant à maintes reprises par la Caisse nationale de mutualité agricole (CNMA), se fait en effet toujours attendre retardant la réforme du système de l’assurance agricole alors qu’avec les changements climatiques qui s’accélèrent et leurs conséquences, l’anticipation des solutions pour sécuriser les investissements et le revenu de l'agriculteur s’impose.
«Le monde agricole et rural doit obéir à un dispositif un peu particulier», a d’ailleurs souligné à ce sujet en mai dernier le DG de la CNMA, Cherif Benhabiles, et ce, d’autant que l’assurance contre les calamités agricoles n’existe que parce que l’assurance intégrale sur les céréales et même le produit assurance sécheresse n’est pas commercialisé en dépit de l’obtention de l’autorisation à cet effet, cela pour dire que la mise en place d’un nouveau pour prendre en charge le risque climatique urge.
La CNMA a toujours plaidé pour ce changement et a même élaboré un travail dans ce cadre. La caisse a proposé un projet de texte de refonte du décret exécutif relatif aux modalités de fonctionnement du FGCA. Tout a été ficelé. Les textes complémentaires et les textes d'application de cette loi incluent la création d'une Agence de prévention des risques agricoles (APRA), placé sous la tutelle du ministère de l'Agriculture et du Développement rural (MADR). L'APRA devra avoir pour mission de créer une banque de données sur les risques et statistiques agricoles.
Changement de paradigme
Les différents acteurs impliqués dans ce processus sont donc appelés à jouer le jeu. «On ne peut pas assurer un risque climatique comme la sécheresse, les feux de forêt au même titre qu’un autre risque. Il faut un cadre juridique, des capacités techniques et financières importantes, et il faut impliquer tout le monde», avait-il pour rappel appelé dans un entretien accordé à El Watan en mars dernier. Deux mois après, en mai, le DG de la CNMA revient sur le dossier et annonce encore une fois le prochain lancement du DACA plaidant pour un changement de paradigme dans la prise en charge de ces risques à l’image de la sécheresse.
Il s’agit en effet pour la CNMA de passer d'une situation où l'Etat venait en aide aux agriculteurs ayant subi des dommages causés par des risques de calamités agricoles, non assurables, selon les techniques d'assurance du moment, à un système d'assurance des calamités agricoles. Une démarche qui s'articule autour des principes de rationalisation du recours aux Fonds publics d'aide à l'agriculture et la responsabilisation de l'agriculteur face à ces risques pour les prévenir surtout que l’engouement du côté des agriculteurs pour l’assurance est des plus faibles.
C’est en fait le parent pauvre du secteur comme le montrent à chaque fois les notes périodiques du Conseil national des assurances (CNA) même si le chiffre d’affaires était en hausse durant le premier trimestre 2024. Les réalisations de la branche agricole ont en effet affiché au cours de cette période, un gain de 97,8 millions de dinars, soit un taux de progression de 21,5 par rapport à la même période de l'exercice 2023, cumulant ainsi près une production de 553,5 millions de dinars. Une tendance tirée essentiellement par la production végétale en évolution de 126% (27,7% du chiffre d’affaires de la branche).