Bouira : Encore une dure année pour les apiculteurs

05/04/2023 mis à jour: 01:26
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Quelle que soit la saison, le prix du miel est fixé entre 4000 et 5000 DA le kilogramme

Les apiculteurs de la wilaya de Bouira n’arrivent pas à surmonter les pertes qu’ils endurent chaque année, ils assistent impuissants à leur faillite. C’est le cas de Hamza, jeune apiculteur, qui a perdu tout espoir de sauver la saison. «J’ai placé des dizaines de ruches sur les hauteurs de la commune de Saharidj, en plein cœur du Djurdjura. 

Malheureusement, même dans ces endroits, la floraison des plantes n’a pris qu’un court laps de temps. Les fortes chaleurs ont précipité l’assèchement des fleurs. Les abeilles n’ont même pas eu le temps de butiner», déplore-t-il. De peur de subir des pertes, de nombreux apiculteurs ont mis leurs ruches en vente. Cependant, des ruches qui se vendaient à plus de 40 000 DA auparavant, ne trouvent plus d’acheteurs même pour 15 000 DA. «Je suis obligé de procéder à la vente de mes ruches le plus vite possible, sinon, je risque de tout perdre lors de la saison estivale qui s’annonce déjà chaude et sèche. Je ne garderai qu’une dizaine de ruches, car j’aime ce métier, c’est ma passion», a décidé Hamza. 

C’est le même topo chez Arezki, un biologiste qui cumule plus de 25 ans en apiculture. Il considère que l’année 2023 est l’une des pires pour les apiculteurs à Bouira. Pourtant, son rucher est placé dans sa propre ferme agricole. Malgré la disponibilité de l’eau puisée d’un profond puits et une timide végétation printanière, le chevronné apiculteur préfère garder son réalisme. «Sincèrement, j’ai perdu tout espoir d’une récolte de miel ou de pollen, encore moins avoir de nouveaux essaims. Cette année, c’est du jamais-vu. Il faut savoir que le rayon de butinage des abeilles s’étend sur plus de 3 km, c’est largement au-delà de ma propriété. Ailleurs, la végétation a complètement séché. Ce qui pourrait secourir et sauver mes abeilles, ce sont les arbres fruitiers que je possède», dira notre interlocuteur, qui ajoute que mauvaise ou bonne saison, le prix du miel est toujours fixé entre 4000 et 5000 DA le kilogramme. C’est une sorte de charte d’apiculteurs. 

Contacté à ce sujet, Slimane Tali, président de l’Association nationale des apiculteurs professionnels (ANAP), ne cache pas son pessimisme. «C’est une année catastrophique pas uniquement à Bouira, mais au niveau national. Cette situation perdure depuis au moins 5 ans. A titre d’exemple, un grand apiculteur de la wilaya de Médéa a perdu, depuis 2021, pas moins de 2400 ruches. Il ne lui en reste actuellement que 300 ! La situation est vraiment inquiétante. 

Concernant la wilaya de Bouira, selon nos estimations, les pertes du cheptel apicole s’élèvent à pas moins de 50%, et le remboursement des apiculteurs assurés au niveau des Caisses régionales mutuelles agricoles n’est pas satisfaisant. «Le contrat d’assurance des CRMA ne prévoit pas d’indemnités en cas de certaines maladies touchant les abeilles. En outre, l’indemnité n’est versée aux apiculteurs assurés qu’une fois que le taux de mortalité du cheptel est supérieur à 30%. Nous sommes en contact avec les responsables de la caisse pour revoir les clauses du contrat d’assurance multirisques apicole.» Par ailleurs, les vendeurs du faux miel pullulent, ils proposent leur marchandise en jurant par tous les saints que c’est du vrai et pur, mais à des prix imbattables. 

Les arnaqueurs proposent leur produit jusqu’à seulement 500 DA ! «J’ai cédé face à l’insistance du vendeur qui n’avait pas cessé de jurer que c’est un vrai miel cueilli dans les bois. En arrivant à la maison, j’ai ouvert le pot et j’ai découvert qu’il s’agissait d’un mélange de sucre et d’eau avec un arôme rappelant l’odeur du vrai miel. C’est une leçon pour moi…» regrette Yahia, commerçant de tissus. 

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