A l’occasion de la Journée internationale de la langue maternelle, coïncidant chaque année avec la date du 21 février, la Direction de la culture et des arts de la wilaya de Béjaïa a préparé un programme tout aussi bénéfique que varié.
Trois conférences thématiques sur la langue maternelle ont été programmées dans la matinée, alors que la seconde partie de la journée a été consacrée aux animations culturelles (poésie, dessin, chorale et gala artistique).
Le Dr Medjdoub Kamel ouvre le bal en présentant sa communication autour de la définition de la notion de la langue maternelle : «Qu’est-ce qu’une langue maternelle ?». Il commence d’abord par faire distinguer une langue mère de toute l’humanité (langue de l’Homo-sapiens) de la langue maternelle de l’enfant.
C’est un débat entre spécialistes dans la matière. Les définitions ne font pas l’unanimité. Pour certains linguistes, la langue maternelle, c’est la langue de la mère tout court. Pour d’autres, c’est la langue du pays où on en est né, donc c’est la langue de la patrie. Pour le linguiste Noami Chomsky, c’est la langue apprise par l’enfant jusqu’à l’âge de douze ans. D’autres considèrent, dit-il, que c’est la langue choisie par les parents à apprendre à leurs enfants. Comme c’est le cas des parents émigrés en France ou au Canada, fait-il remarquer. En concluant, il cite les statistiques de l’Unesco qui tire la sonnette d’alarme sur la mort, presque toutes les deux semaines, d’une langue maternelle dans le monde qui compte 6700 langues dont seulement 150 sont institutionnalisées comme officielles.
L’Unesco aussi alerte en considérant plus de 1600 langues sont menacées d’extinction en emportant, avec elles, tout un patrimoine culturel d’une partie de l’humanité. La seconde conférence, intitulée : «La langue maternelle dans l’évolution psychique de l’enfant», animée par le Dr Riad Bekaoui, a été consacrée à la forge de l’identité de l’enfant. Durant son intervention, le conférencier a alerté sur «les dangers de laisser un enfant souvent seul devant l’écran de la télévision où il n’apprend que la langue des bandes dessinées soit l’arabe classique soit le français ou l’anglais». Comme il a fait remarquer que certains parents qui travaillent ne communiquent que peu avec leur progéniture.
D’autres parents parlent dans leurs foyers en langue française, «ce qui crée un complexe chez leurs enfants à leur entrée à l’école». L’intervenant a beaucoup insisté sur «l’usage du kabyle dans les foyers et dans les places publiques, car c’est cette langue qui véhicule nos valeurs humaines donc c’est elle qui forge notre personnalité».
Et la liste des entraves est encore longue, conclut-il. La troisième conférence a été animée par le Dr Ftici Fateh, développant la thématique : «Uguren Uselmed n Tmazight» (Les contraintes de l’enseignement de la langue amazigh). «Après vingt-sept années de l’introduction de la langue amazighe dans l’école algérienne, son enseignement se restreint à quelques régions de l’Algérie», regrette-t-il.
Il constate aussi que «les promesses qui ont été faites pour la généraliser à tout le territoire national et la rendre une matière obligatoire ne sont que vains mots». «Il n’y a que cinq départements de langue et culture amazighes sur tout le territoire national et ils se plaignent du manque d’enseignants pour la généraliser», ironise-t-il. «Sans parler de manuels scolaires souvent élaborés par des diplômés qui n’ont jamais enseigné cette matière dans leur vie», nous fait-il savoir, rajoutant aux déboires de cette langue, l’académie amazighe qui ne voit toujours pas le jour.