Balayer devant sa porte

27/06/2023 mis à jour: 06:42
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Ainsi donc la solution des centres d’enfouissement techniques (CET) pour les déchets a montré ses limites et doit être abandonnée. 

C’est la ministre de l’Environnement et des énergies renouvelables, Fazia Dahleb, qui l’a redit il y a quelques jours à partir de Guelma où elle était en visite. Le recours à ces sites de traitement des déchets non recyclables, ménagers notamment, a été longtemps avancé comme la panacée à la prolifération des décharges sauvages. On se rend compte avec le temps que les coûts des opérations sont exorbitants, la gestion des aires dédiées compliquée et que l’augmentation continue des volumes des déchets produits dépasse de loin les capacités d’enfouissement possibles. 

Le département de Mme Dahleb travaille sur un nouveau cadre juridique devant rectifier la loi relative à la gestion, au contrôle et à l'élimination des déchets. Le texte qui, devra être soumis prochainement au gouvernement pour adoption, prévoit l’introduction de «l’économie circulaire» comme nouveauté. Soit notamment, des incitations à l’économie du recyclage et de la transformation. 

L’objectif déclaré est de parvenir à l'horizon 2035 à la valorisation des déchets au lieu de leur enfouissement, à travers l'exploitation de 30% des déchets ménagers, 30% des déchets spéciaux, et 50% de déchets inertes. Des objectifs ambitieux quand on sait que les taux moyens de recyclage dans le monde ne dépassent pas les 10%, continuellement tirés vers le bas par la surproduction et le sous-recyclage du plastique. 

Sur le terrain, le constat empirique renseigne sur la persistance, voire l’aggravation de la problématique de la prolifération des déchets dans l’environnement urbain, et bien au-delà dans des espaces jusqu’à récemment épargnés par le phénomène. Symptomatique du déficit en matière de conscience écologique, la redécouverte par les Algériens de certains sites naturels du pays, notamment dans ces zones montagneuses restées territoires interdits lors de la «décennie noire», ne s’est pas faite sans atteinte à l’environnement. 

Le «tourisme  domestique», promu par des initiatives libres et sans véritable orientation institutionnelle, transforme malheureusement certains sites, pourtant protégés, en dépotoirs. Un tour dans le pays profond vous fait découvrir, également, des abords de route envahis par des emballages de boissons non dégradables... Et ce ne sont sans doute pas les généreuses initiatives de nettoyage, menées sporadiquement par des jeunes acquis à la cause écologique, qui pourront faire face à ce véritable fléau. 

Que dire sinon de la situation dans les grandes villes et les ensembles d’habitations ? Les services d’hygiène communaux y font des rondes sisyphiennes, souvent avec des logistiques peu adaptées à l’ampleur de la tâche. Avec l’été qui s’installe, il sera aisé de se rendre compte de la laideur structurelle qui va s’emparer des abords de plages et les services municipaux seront encore trop facilement désignés comme le maillon défaillant. 

Selon une étude récente de l’Agence nationale des déchets (AND), l’Algérien produit en moyenne près de 0,68 kg de déchets par jour. Le ministère de l’Environnement s’attend pour sa part à une augmentation du taux par personne à l’horizon 2035, de l’ordre de 1,35 kg/jour. 

Combiné au paramètre démographique (on serait plus de 50 millions d’habitants en 2035), le taux d’augmentation prévisionnel des quantités de déchets dans le pays passerait, des 12 millions de tonnes produits annuellement aujourd’hui, à plus de 20 millions de tonnes. 

Les indicateurs sont là et posent d’énormes défis. L’économie circulaire pourra certainement contribuer à amortir les effets des augmentations de volumes annoncés. Mais la question des déchets, les ménagers et les assimilés comme disent les spécialistes, ne devraient pas rester la seule affaire du ministère de l’Environnement et de l’éboueur communal. 

La tâche est trop colossale pour qu’elle se suffise de solutions techniques et fasse l’économie d’un sursaut collectif pour la préservation de l’environnement. Chacun devra balayer devant sa porte.   

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