Le Premier ministre chinois, Li Qiang, entamera une visite en Australie, ce samedi, a annoncé, hier, le Premier ministre australien, Anthony Albanes.
Cette visite de quatre jours intervient, après que Pékin a levé la plupart des barrières commerciales aux exportations australiennes, notamment de charbon, bois, orge et vin. «La visite du Premier ministre Li Qiang en Australie est une occasion importante d’échanger directement sur des questions clés pour nos deux nations», a déclaré A. Albanese, cité, hier, par l’AFP. «La Chine est le premier partenaire commercial de l’Australie et nos relations économiques continuent d’apporter des avantages substantiels à nos deux pays», a-t-il observé.
Le Premier ministre chinois devrait également se rendre en Nouvelle-Zélande dans le courant de la semaine.
«L’Australie continue d’entretenir des relations stables et directes avec la Chine, en privilégiant le dialogue», a déclaré A. Albanese.
«Nous coopérerons là où nous le pouvons, nous serons en désaccord là où nous le devons et nous nous engagerons dans le sens de notre intérêt national», a-t-il poursuivi. Dans le Pacifique Sud, Canberra et Washington œuvrent à renforcer leurs liens avec les nations insulaires, après la signature d’un accord de sécurité secret entre Pékin et les îles Salomon en 2022.
Les relations entre Canberra et Pékin ont connu des frictions. En 2019, les autorités australiennes ont publiquement dénoncé une ingérence croissante de la Chine dans les affaires intérieures de l’Australie, par le biais, notamment, de dons à des partis politiques, dans le but d’influencer la politique de l’île-continent. En août de la même année, le député australien Andrew Hastie, président du Comité parlementaire sur le renseignement et la sécurité, a publiquement comparé l’essor de la Chine actuel avec celui de l’Allemagne nazie avant la Seconde Guerre mondiale. Aussi, le Parlement australien a adopté une série de lois pour lutter contre l’espionnage et l’ingérence étrangère. En 2020, l’Australie a demandé une enquête internationale sur l’origine de la pandémie de la Covid, détectée dans la ville chinoise de Wuhan à la fin de 2019. Comme elle a interdit le géant chinois des télécommunications Huawei d’un appel d’offres pour la construction du réseau national 5G.
Chancres
En avril 2021, le gouvernement australien a annoncé l’annulation de deux accords de coopération signés par la Victoria, l’un de ses six Etats fédérés, avec la Chine pour se joindre aux «nouvelles routes de la soie». De tels accords sont «incompatibles avec la politique étrangère australienne ou contraires à nos relations internationales», a déclaré la ministre des Affaires étrangères, Marise Payne, appliquant une loi adoptée en décembre 2020 autorisant le gouvernement fédéral à annuler ces accords s’ils compromettent les intérêts nationaux.
A ces différends, s’ajoutent les condamnations par Canberra de la politique chinoise à l’égard des Ouïghours, au Xinjiang, ou à l’encontre de Hong Kong. En riposte, la Chine a imposé, en 2020, des droits de douane élevés sur des exportations australiennes clés telles que l’orge, le bœuf et le vin, au plus fort d’un conflit diplomatique avec l’ancien gouvernement conservateur en poste à l’époque à Canberra. Pékin a également cessé d’acheter d’importantes quantités de matières premières d'Australie, dont le charbon. La Chine a déconseillé à ses étudiants de fréquenter les universités australiennes, citant des incidents racistes. Les relations entre les deux pays se sont encore dégradées en septembre 2021, quand l’Australie a annoncé son adhésion à l’accord trilatéral d’Aukus avec les Etats-Unis et le Royaume-Uni.
Dans ce cadre, les trois pays ont lancé, en mars dernier, le programme de coopération concernant les sous-marins nucléaires, dans le cadre de leur alliance baptisée Aukus.
L’accord a suscité l’ire de Pékin. Aucun pays «ne doit s’engager dans des alliances prenant pour cible les intérêts d’un pays tiers», a déclaré l’ambassade chinoise aux États-Unis. «Tout particulièrement, ces pays devraient abandonner leur mentalité de Guerre froide et leur idéologie portant préjudice» à un pays tiers. Cet accord est «extrêmement irresponsable», a affirmé le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Zhao Lijian, pour qui il «sabote gravement la paix et la sécurité de la région et donne un nouveau coup de fouet à la course aux armements».
Le Pays-Continent est membre du Dialogue quadrilatéral pour la sécurité (Quad), alliance avec les Etats-Unis, l’Australie, l’Inde et le Japon, aspirant à contrer les ambitions de domination économique et militaire de Pékin.
Canberra est aussi membre de l’alliance dite «Five Eyes» dans le renseignement avec la Grande-Bretagne, le Canada, la Nouvelle-Zélande et les Etats-Unis. En octobre 2022, l’île-continent a conclu un traité de sécurité avec le Japon puis avec le Vanuatu en décembre. Fin juillet 2023, le secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, et le secrétaire américain à la Défense, Lloyd Austin, ont effectué une visite en Australie, dernière étape d’une tournée dans le Pacifique destinée à renforcer la position de Washington dans la région.
Avec le retour des travaillistes au pouvoir en mai 2022, les deux pays ont opté pour la désescalade. Ainsi, Pékin a réouvert son marché au charbon australien en mars 2023, puis levé des taxes prohibitives sur l’orge en août. Début octobre, la Chine a libéré la journaliste australienne Cheng Lei, détenue depuis plus de trois ans pour des accusations d’espionnage. Le Premier ministre australien a effectué une visite dans l’Empire du Milieu en novembre dernier. En la circonstance, il a salué l’évolution «incontestablement très positive» des relations bilatérales. «Les échanges commerciaux sont plus libres et cela bénéficie à nos deux pays», a-t-il indiqué.
Et d’ajouter : «Nous pouvons bien évidemment saisir l’occasion aujourd’hui de voir comment renforcer la coopération» entre les deux pays. Les deux nations «n’ont pas de griefs historiques ou de contentieux ni de conflits d’intérêts fondamentaux. Et elles peuvent vraiment devenir des partenaires de confiance et réussir ensemble», a déclaré de son côté le président chinois. Il a indiqué que Pékin espère «développer pleinement le potentiel du traité de libre-échange entre la Chine et l’Australie et entreprendre une coopération dans de nouveaux domaines, dont le changement climatique et l’économie verte».
«Grâce aux efforts des deux parties», la Chine et l’Australie «ont repris leurs échanges dans de nombreux domaines et ont entrepris d’améliorer et de développer leurs relations», a-t-il observé. «Alors que certains s’efforcent de causer des troubles dans la région Asie-Pacifique, nous devons tout d’abord rester vigilants et ensuite les combattre», a-t-il affirmé.