Une brève annonce, à la fin du communiqué du dernier Conseil des ministres, faisant état de la fusion des deux filiales publiques de transport maritime de marchandises, Cnan-Nord et Cnan-Med, a fait l’effet d’une douche froide chez les travailleurs des deux entreprises.
Initiée en 2017 par l’ancien ministre des Transports, Abdelghani Zaalane, puis gelée avant d’être ficelée par l’ex-ministre du secteur, Aïssa Bekkaï, et présentée par son successeur et intérimaire, Kamel Nasri, il y a une semaine, en Conseil des ministres, cette mesure suscite de lourdes interrogations, notamment sur le sort qui sera réservé, en cas d’unification des deux entités, au partenaire italien qui détient les 49% du capital social de Cnan-Med.
Les syndicats des deux compagnies exigent, comme préalable à cette fusion, une évaluation technique et financière de ce partenariat, de plus en plus contesté par les travailleurs, à travers des rassemblements et des courriers adressés aux plus hautes autorités, évoquant «un échec managérial». Le secrétaire général de Cnan-Nord, Bensouna Khiri, se demande à qui profitera cette fusion. «Quelle place aura le partenaire étranger au sein de la nouvelle compagnie unifiée ? Prendra-t-il 49% de ses parts ? Nous ne sommes informés de rien.
Cependant, nous savons que le maintien de ce partenaire dans la nouvelle organisation, augure d’un avenir sombre pour les salariés», dit-il. Avec son collègue de Cnan-Med, il rappelle, les nombreuses actions de protestation organisées de 2018 jusqu’au mois de décembre 2021, pour de dénoncer «toute fusion, sans une évaluation du partenariat étranger», puis lance un véritable cri de détresse à l’adresse des plus hautes autorités qui, selon eux, «ne semblent pas bien informées de la réalité».
Les deux rappellent que «l’Etat, eu égard aux difficultés rencontrées par notre compagnie, a bien tenté d’injecter des moyens financiers et matériels pour redresser la barre. Mais c’était sans compter sur les intérêts personnels d’un réseau malveillant qui organisait, depuis longtemps déjà, la chute vertigineuse de la CNAN, entraînant dans sa descente infernale tous les travailleurs courageux et innocents de tout ce qui se tramait, pour arriver au triste résultat».
Ils citent la réponse de l’ex-ministre des Transports, Aïssa Bekkaï, aux questions des députés sur l’immobilisation des navires à l’étranger : «Le ministre avait parlé d’une grande corruption, lors de la saisie des navires. On comprend mieux aussi le non-respect du cahier des charges, le rapport de l’audit externe faisant foi de toutes les irrégularités, de tous les manquements et de tous les agissements souterrains.»
Quatre bilans négatifs
Les syndicalistes voient «à travers cette fusion, telle qu’elle se présente, la convoitise des 7 navires opérationnels après réparations, mais aussi des deux 2 navires céréaliers neufs. Sans audit préalable du bien-fondé de ce partenariat pour le moins arbitraire, contestable au plus haut point et contesté par les gens censés que sont les travailleurs». Pour les deux syndicalistes, avec «quatre bilans négatifs, le partenaire étranger risque de se retrouver récipiendaire d’une compagnie bradée par une fusion fatale».
Ils ne manquent pas de rappeler aussi, «le refus du partenaire de mettre la main à la poche», pour participer à l’acquisition, en 2021, des deux navires, Cirta et Djanet, «suscitant le courroux du ministre des Transports, qui, lui, a signifié d’ailleurs une interdiction d’exploitation de ces deux navires».
Des «défaillances» qui devraient, ajoutent nos interlocuteurs, pousser les autorités «à d’abord revoir les clauses du contrat de performance liant le partenaire à Cnan-Med, faire l’audit de management au niveau des deux compagnies, Cnan-Med et Cnan-Nord, avant d’engager la fusion».
Ce sont là les préalables que les représentants des travailleurs exigent, et ce, disent-ils, dans l’intérêt du pavillon national et de ceux des travailleurs.