Les récents développements qu’a connus le Moyen-Orient après l’assassinat du chef du bureau politique du Hamas à Téhéran . il y a une semaine jour pour jour ou encore l’élimination de Fouad Chokr, important chef militaire du Hezbollah, dans une frappe dans la banlieue sud de Beyrouth, font craindre le pire. Israël étant impliqué dans les deux attentats, le risque d’éclatement d’un conflit régional d’ampleur, entre l’Iran et ses alliés d’un côté, et l’entité sioniste de l’autre, se précise de plus en plus. Hier, l’affrontement entre Israël et le Hezbollah a enregistré une nouvelle escalade.
Le mouvement de résistance chiite libanais «a lancé mardi (hier, ndlr) une série d’attaques à l’aide de drones et de roquettes sur le nord d’Israël, mais a averti que les représailles tant attendues après l’assassinat par Israël d’un haut commandant la semaine dernière n’étaient pas encore venues», rapporte Reuters. Le Hezbollah affirme avoir ciblé «deux sites militaires près d’Acre (Akka), et avoir également attaqué un véhicule militaire israélien dans un autre endroit», détaille Reuters. De son côté, l’armée israélienne a confirmé qu'«un certain nombre de drones hostiles avaient été identifiés en provenance du Liban et qu’un d’entre eux avait été intercepté», indique l’agence britannique, en précisant que «plusieurs civils (israéliens) ont été blessés au sud de la ville côtière de Nahariya». Selon Al Jazeera, l’attaque au drone menée par le Hezbollah a fait 19 blessés parmi la population israélienne, en Galilée occidentale, dont un dans un état grave.
«Israël recevra une réponse pour ses crimes»
Le Hezbollah, lui, a déploré cinq morts parmi ses hommes suite à un raid sioniste, ce que confirme le ministère libanais de la Santé. Ce dernier a précisé hier que les cinq combattants du Hezbollah ont été tués «dans une frappe israélienne sur une maison à Mayfadoun», au sud du Liban.
Si les échanges d’hostilités sont courants entre Israël et le Hezbollah depuis octobre 2023, force est de constater que les tensions depuis une semaine sont en train de s’aggraver et que la région est en passe de basculer dans un conflit de haute intensité. Tous les spécialistes en géopolitique du Proche-Orient le disent : l’assassinat du chef politique du Hamas au cœur de la capitale iranienne ne restera pas impuni. «Les craintes grandissent que le Moyen-Orient puisse basculer dans une guerre totale suite aux menaces du Hezbollah de venger le meurtre du commandant Fouad Chokr et de l’Iran de répondre à l’assassinat à Téhéran la semaine dernière du chef du groupe militant palestinien Hamas», écrit Reuters. Le président iranien, Massoud Pezeshkian, l’a encore rappelé ce lundi. L’Iran, a-t-il souligné, «ne cherche en aucun cas à étendre la guerre» mais Israël «recevra une réponse pour ses crimes».
Le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, Nasser Kanaani, a déclaré de son côté que l’Iran «a légalement le droit» de riposter à Israël. «Nous considérons notre droit à défendre notre sécurité nationale, notre souveraineté et notre intégrité territoriale comme un droit incontestable», a-t-il martelé au cours de son point de presse hebdomadaire, avant de lancer : «L’Iran a légalement le droit de punir Israël.» Et de faire observer : «Si les gouvernements de la région et la communauté internationale avaient rempli leur devoir légal en exerçant une pression sur le régime sioniste, nous n’aurions sans doute pas constaté un tel niveau élevé de désordre et une escalade du risque de conflit dans la région.»
Washington «se prépare à toutes les éventualités»
Une véritable course contre la montre est engagée pour désamorcer la crise avant la conflagration annoncée. Le président américain, Joe Biden, a tenu lundi une «réunion d’urgence». Dans la «Situation Room» étaient présents la vice-présidente Kamala Harris, le secrétaire d’Etat Anthony Blinken et «l’équipe du Conseil de sécurité nationale», indique l’AFP. Selon la Maison-Blanche, la réunion était consacrée aux «menaces contre Israël et les troupes américaines dans la région que posent l’Iran et ses groupes affidés (le Hamas et le Hezbollah)».
Les responsables américains «ont discuté des mesures à prendre pour défendre (leurs) forces armées et répondre aux attaques contre (leurs) personnels militaires de la manière et à l’endroit où (les Etats-Unis) choisiront de le faire». Washington redoute un embrasement régional et dit se «préparer à toutes les éventualités». Vendredi, le Pentagone a fait part de l’envoi de navires de guerre et d’avions de combat supplémentaires au Moyen-Orient pour protéger les troupes américaines et assurer la défense d’Israël. Lundi, le chef du Commandement militaire américain pour le Moyen-Orient (Centcom), le général Erik Kurilla, est arrivé en Israël «pour évaluer la situation en matière de sécurité».
Le même jour, des soldats américains ont été blessés suite à une attaque à la roquette qui a visé une base militaire en Irak. «Nous sommes impliqués dans une diplomatie intense jour et nuit avec un message très simple : tous les protagonistes doivent éviter l’escalade», a déclaré M. Blinken, aux côtés de son homologue australienne Penny Wong, qu’il recevait au département d’Etat. «L’escalade n’est dans l’intérêt de personne. Cela ne peut conduire qu’à plus de conflits, de violences et d’insécurité. Il est ainsi crucial que nous cassions ce cycle en parvenant à un cessez-le-feu à Ghaza», a insisté Anthony Blinken. «Il est urgent que toutes les parties fassent les bons choix dans les heures et les jours qui viennent», a-t-il appuyé.
L’espace aérien perturbé
Le chef de la diplomatie américaine est persuadé en effet que la clé du conflit est le rétablissement de la paix en Palestine. Un cessez-le-feu, a-t-il plaidé, «débloquera la possibilité d’un retour durable au calme, non seulement à Ghaza, mais aussi dans d’autres régions où le conflit pourrait s’étendre».
Aujourd'hui, une réunion de l’Organisation de la coopération islamique (OCI) devrait se tenir «à la demande de la Palestine et l'Iran» pour parler d’une seule voix et arriver à «une position islamique unifiée», a assuré un responsable de l’OCI à l’AFP. Et tandis que les tensions s’accentuent, plusieurs compagnies aériennes ont modifié leurs programmes de vol pour le Moyen-Orient. Ainsi, Air France et Transavia ont annoncé hier qu’elles prolongeaient la suspension de leurs liaisons entre Paris et Beyrouth jusqu’au 8 août. La compagnie allemande Lufthansa a suspendu quant à elle ses vols vers le Liban jusqu’au 12 août. Selon le site zonebourse.com, spécialisé dans l’information boursière, «les compagnies aériennes évitent l’espace aérien iranien et libanais et annulent les vols à destination d’Israël et du Liban, alors que l’inquiétude grandit quant à un éventuel conflit dans la région après l’assassinat de hauts responsables du Hamas et du Hezbollah».
Le même site ajoute : «Vendredi, Singapore Airlines ne semblait plus utiliser l’espace aérien iranien pour aucune de ses liaisons (…). Les compagnies taïwanaises EVA Air et China Airlines semblaient également éviter l’espace aérien iranien pour les vols à destination d’Amsterdam vendredi, qui avaient auparavant survolé l’Iran, selon les données de Flightradar24.»
En outre, plusieurs pays déconseillent à leurs ressortissants de se rendre au Liban, et pour ceux qui s’y trouvent, ils les exhortent à le quitter au plus vite. C’est le cas des Etats-Unis, du Royaume-Uni, de la France, de la Suède, de la Jordanie, de l’Arabie saoudite ou encore de la Chine.