La ville de Khan Younès, au sud de la bande de Ghaza, a renoué hier avec les crimes de masse. Après avoir obligé une nouvelle fois une partie des habitants, plusieurs fois déplacés de force, à évacuer le secteur est de la ville, l’armée israélienne y a déclenché des bombardements intensifs qui ont fait 40 morts et 120 blessés, selon un bilan provisoire. Avec ce nouveau cortège de victimes, le bilan global de la campagne génocidaire israélienne dans la bande de Ghaza a franchi la barre des 39 000 morts et 90 000 blessés.
L’armée israélienne a émis hier un nouvel ordre d’évacuation à l’adresse des habitants des quartiers est de Khan Younès, au sud de la bande de Ghaza, annonçant une «opération intensive» dans la «partie orientale de la zone humanitaire». Les habitants de Khan Younès, déjà plusieurs fois déplacés de force, devaient ainsi se diriger massivement vers la partie ouest de la ville, côté mer, autour du secteur d’Al Mawasi déclaré par l’occupant «zone sûre».
Rappelons que cette même zone a été le théâtre, le samedi 13 juillet, d’un véritable carnage qui s’est soldé par un bilan effroyable de 92 morts et plus de 300 blessés. Suite à cette boucherie, «nombre de Palestiniens craignent d’aller rejoindre ces étendues de tentes dont certaines ne sont que des morceaux de bâche ou de sacs d’aide humanitaire accrochés à des morceaux de bois», écrit l’AFP.
Après ce nouvel ordre d’évacuation, la panique a gagné les habitants de la ville de Khan Younès, notamment ceux des secteurs concernés par cette opération. «Nous sommes partis au milieu des bombardements de l’aviation et des chars, et des tirs de drones», confie Youssef Abou Taimah, un jeune homme de 27 ans.
Youssef affirme avoir vu «des blessés et des morts transportés sur des tuk-tuk (petit véhicule à trois roues, ndlr) et des charrettes tirées par des ânes vers l’hôpital Nasser», alors qu’il se rendait avec sa famille vers Al Mawasi. «Nous allons vivre dans la rue. Et encore, même les trottoirs sont remplis de monde et de tentes. Nous sommes épuisés. Nous n’en pouvons plus de ces déplacements», peste-t-il. C’est la quatrième fois que Youssef et ses proches se voient contraints de fuir la ville.
Au moins 40 morts à Khan Younès
Selon les autorités sanitaires de Ghaza, les bombardements acharnés déclenchés par l’armée d’occupation contre les secteurs est de la ville de Khan Younès ont fait 40 morts et plus de 120 blessés, et le bilan risque de s’alourdir. Une source médicale de l’hôpital Nasser de Khan Younès, mentionnée par l’agence Wafa, a déclaré que l’établissement «a reçu des centaines de morts et de blessés en trois heures suite aux attaques de l’occupant sur l’est de la ville».
L’hôpital submergé a lancé des appels insistants au don de sang au profit des blessés qui ont afflué en masse vers le complexe médical. La direction de l’hôpital a averti que le manque de sang «constitue une menace sérieuse pour la vie des malades et des blessés, à la lumière des massacres en cours perpétrés par les forces d’occupation contre des innocents et des civils».
Simultanément à cette tuerie, les faubourgs orientaux de Khan Younès continuaient à se vider de leur population tout au long de la journée d’hier au milieu d’une grande fébrilité, produisant une nouvelle catastrophe humanitaire, prévient l’agence Wafa.
Au centre de la bande de Ghaza, la Défense civile a signalé qu’il y avait «un martyr et des blessés, dont un dans un état grave, suite à l’attaque d’une tente adjacente à celle des journalistes à l’intérieur de l’hôpital des Martyrs d’Al Aqsa, à Deir Al Balah», rapporte l’agence palestinienne.
Par ailleurs, une source médicale de l’hôpital Al Awda a indiqué à l’agence turque Anadolu que deux personnes ont été tuées et une troisième blessée lorsqu’un avion de combat a mené un raid contre un rassemblement de citoyens dans la rue Salah Al Din, au nord-est du camp de Nuseirat.
Le camp de Nuseirat bombardé 63 fois en une semaine
Selon le Bureau gouvernemental des médias à Ghaza, le camp de Nuseirat a été bombardé 63 fois en une semaine par les forces d’occupation sionistes. Ces frappes répétées ont fait au total 91 morts et 251 blessés. «Plus de 75% des victimes ont été admises dans des hôpitaux avec des brûlures dues à l’utilisation d’armes thermiques et chimiques par l’occupant», a précisé le Bureau des médias dans un communiqué.
Le camp de réfugiés de Nuseirat «est l’un des camps les plus densément peuplés de Ghaza, abritant actuellement 250 000 habitants et personnes déplacées», note l’APS. L’UNRWA a fait part de son côté de l’attaque d’un convoi humanitaire de l’agence onusienne par l’armée israélienne à Ghaza. «Des attaquées des forces israéliennes ont été lancées contre un convoi des Nations unies se dirigeant vers Ghaza City», a dénoncé hier Philippe Lazzarini, le chef de l’Agence onusienne pour les réfugiés palestiniens dans un post publié sur le réseau social X.
Et de poursuivre : «Bien qu’il n’y ait pas de victimes, nos équipes ont dû se cacher et se couvrir. Cela s’est produit hier (dimanche, ndlr). Les équipes voyageaient dans des voitures blindées clairement marquées et portaient des gilets de l’ONU. Un véhicule a reçu au moins cinq balles alors qu’il ne faisait qu’attendre devant le point de contrôle des forces israéliennes au sud de Wadi Ghaza.
La voiture a été gravement endommagée, elle a quitté le convoi. Les équipes se sont reconstituées et ont finalement atteint la ville de Ghaza.» Philippe Lazzarini est formel : «Comme toutes les autres missions similaires de l’ONU, ce mouvement a été coordonné et approuvé par les autorités israéliennes. Les travailleurs humanitaires ne sont pas des cibles. Les responsables doivent rendre des comptes.»
L’UE s’aligne sur l’avis de la CIJ
L’avis consultatif rendu vendredi par la Cour internationale de justice (CIJ), dans lequel la plus haute juridiction des Nations unies a déclaré illégale l’occupation par Israël des Territoires palestiniens annexés depuis 1967, est «largement cohérent» avec les positions de l’Union européenne.
C’est ce qu’a affirmé hier le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell. «Ces conclusions de la CIJ sont largement cohérentes avec les positions de l’UE, qui sont elles-mêmes entièrement alignées sur les résolutions de l’ONU concernant le statut des Territoires palestiniens occupés», a-t-il assuré dans un communiqué.
«Dans un monde de violations constantes et croissantes du droit international, il est de notre devoir moral de réaffirmer notre engagement indéfectible envers toutes les décisions de la CIJ de manière cohérente, quel que soit le sujet en question», a-t-il souligné. M. Borrell a ajouté que l’UE «prend bonne note» de cet avis consultatif.
«La présence continue de l’Etat d’Israël dans les Territoires palestiniens occupés est illégale et doit être terminée le plus rapidement possible», insiste-t-il en s’appropriant les éléments de langage contenus dans les conclusions de la CIJ. «L’Etat d’Israël a l’obligation de cesser immédiatement toutes les nouvelles activités de colonisation et d’évacuer tous les colons des Territoires palestiniens occupés», a-t-il poursuivi.
Et le haut représentant de l’UE pour les Affaires étrangères de faire observer : «Tous les Etats ont l’obligation de ne pas reconnaître cette situation comme légale et de ne pas fournir d’aide ou d’assistance au maintien de la situation créée par cette présence illégale.»
Alors que la campagne militaire israélienne à Ghaza connaît un nouveau pic de brutalité avec ce massacre de Khan Younès, Netanyahu a «donné son feu vert à l’envoi jeudi d’une nouvelle délégation pour discuter d’un accord», rapporte l’AFP.
Selon les derniers chiffres fournis hier par le ministère de la Santé de la bande de Ghaza, le bilan de la campagne génocidaire israélienne a franchi hier la barre des 39 000 morts. Le nombre de blessés, lui, frôle désormais les 90 000.