Connu dans le milieu de la presse écrite arabophone en sa qualité de journaliste et ancien directeur du quotidien El Khabar, Ali Djerri s’est lancé depuis trois mois dans une autre aventure. Il est, depuis peu, gérant de la galerie d’art privée Hala, à Alger. Dans cet entretien, il revient sur la genèse de la galerie, tout en ne manquant pas de dévoiler les ambitions de ce nouvel espace dédié aux arts plastiques en particulier et aux autres arts en général.
- Pouvez-vous revenir sur l'histoire de l’implantation de la nouvelle galerie Hala ?
La galerie d’art privée Hala existe depuis mai dernier. Cette dernière a vu le jour grâce à un ami, Ali Serraoui, qui partage avec moi la même profession journalistique et la même passion pour les arts plastiques. C’est un artiste peintre assez connu.
Il détient une imposante collection de tableaux et a exposé plusieurs fois. Me concernant, je pratique les arts plastiques depuis quelques années déjà. J’ai participé à de nombreuses expositions de peinture. L’idée d’ouvrir une galerie d’art a germé après une année de moult discussions avec mon ami de cœur. Nous avons décidé de plancher sur cet ambitieux projet afin de préparer l’ouverture de ce lieu, dédié à l’art.
Comme l’espace existait déjà- c’était un ancien magasin commercial- nous avons occupé, dans un premier temps, le rez-de chaussée et nous avons commencé l’aménagement qui a duré près de cinq mois. L’espace est, actuellement, de 500 m2.
Nous avons fait une petite étude du marché. Nous avons décidé aussi de la gérance de la galerie. C’est vous dire que ce n’est pas aussi simple de créer et de gérer un lieu de ce genre. Parce que, ce n’est pas tellement rentable avec le coup de froid du marché de l’art.
C’est un travail à long terme. Il faut résister à l’usure du temps. Ainsi, nous sommes en activité depuis le 28 mai dernier. Nous avons eu l’honneur d’organiser jusqu’à présent trois expositions. Nous avons étrenné cet espace culturel par une exposition de peinture collective (du 24 mai au 20 juin 2024) suivie d’une deuxième exposition semi- collective avec un groupe de 11 artistes (du 28 juin au 17 juillet 2024).
Actuellement, la galerie abrite une exposition de photographies intitulée «Lumières croisées» où neuf artistes renommés dévoilent leurs travaux.
- Quels sont les critères que doit avoir un artiste pour pouvoir exposer à la galerie privée Hala ?
Pour nous, le moment, il n’y a aucun critère de sélection. Notre objectif actuel est la promotion en matière de communication. Sans prétention aucune, la galerie Hala est assez connue aujourd’hui. Nous faisons notre propre sélection.
A titre d’exemple, notre prochaine exposition sera consacrée à la Palestine. Nous avons reçu plusieurs œuvres dont la sélection nous revient. Il est important de souligner que pour le moment, la durée d’une exposition est gratuite. C'est-à-dire que nos artistes exposent à titre gracieux dans notre galerie. Cependant, à partir de septembre prochain, nous allons essayer de voir les choses autrement.
Pour rien vous cacher, notre objectif est aussi que la galerie arrive à couvrir ses charges. Pour l’instant, nous sommes en train d’étudier toutes les possibilités qui existent déjà sur le marché. Cependant, il y aura des exceptions. En effet, les expositions consacrées aux jeunes talents ou les expositions pour les enfants seront strictement gratuites. Notre devise est d’encourager les jeunes talents en herbe.
D’ailleurs, le public pourra découvrir, prochainement, une exposition sur de jeunes artistes et une seconde exposition sur les amateurs de l’art. Je pense qu’il faut démocratiser les choses. Je ne suis ni un grand artiste ni un bel artiste mais, selon moi, il faut sensibiliser les gens. Sinon, le marché restera ainsi, c'est-à-dire, à l’état stationnaire.
- Selon vous, quelles sont les qualités pour être un bon artiste ?
Je dirai qu’un bon artiste doit faire preuve de créativité pour pouvoir retranscrire ses sentiments et ses ressenties à travers une œuvre donnée. Le don et le talent sont des conditions sine qua non. Même si une personne fait l’Ecole des beaux-arts, ce n’est pas évident qu’il soit un bon artiste.
Dans la création, il faut avoir aussi un bagage classique. Avoir les moyens sur un plan pédagogique, c’est encore mieux. Je ne dirai jamais assez que le don est important chez chaque artiste. Peut-être bien, qu’un jeune sortant de l’Ecole des beaux-arts maîtrise le plan technique, mais en tant que créateur non. Il y a des choses qui sont liées avec le don.
- Etant artiste peintre et galeriste, selon vous, comment se porte le marché de l’art en Algérie ?
Le marché de l’art en Algérie est un grand débat. C’est un marché avec une chaîne d’intervenants. Il y a la responsabilité entre autres de l’artiste, de l’Etat et de toute la politique culturelle. Il faut introduire le marché de l’art dans l’économie.
A travers les arts plastiques, c’est l’image de l’Algérie avec son patrimoine qui est mise en exergue. Je pense que la première chose à faire, c’est que les ambassades dans le monde entier fassent des acquisitions de tableaux de l’Algérie.
On doit avoir une idée de l’Algérie à travers une œuvre d’art. Il faut trouver des mécanismes. C’est un problème d’approche culturelle. Le marché de l’art en Algérie est presque inexistant. Il y a quelques collectionneurs qui achètent des œuvres d’art.
Pour d’autres, acheter une œuvre d’art devient un luxe. Il y a aussi la réalité sociale. Beaucoup d’Algériens n’ont pas les moyens d’acquérir des oeuvres de ce genre. Ce n’est pas une priorité à la limite. Un artiste peintre ou encore un plasticien vous dira, aussi qu’il ne peut pas brader son œuvre.
Les matériaux qu'utilise un artiste peintre dans sa production sont excessivement chers. C’est pour cela qu’il doit y avoir une plus grande implication des pouvoirs publics. Il faut, aussi, encourager les galeries avec des avantages fiscaux et parafiscaux.
Une personne qui ouvre une galerie d’art rencontre plusieurs difficultés. Il faut des encouragements pour ouvrir une galerie. Maintenant, pour le citoyen, il faut lui inculquer cette culture de l’art. Il faut commencer par la base, c'est-à-dire par l’école.
- Quels sont vos projets futurs ?
Notre programme est déjà élaboré pour la rentrée sociale prochaine. Comme je vous l’ai dit déjà, nous préparons une exposition sur la Palestine avec un regard artistique des plus pointus. Nous préparons aussi une exposition intéressante sur le recyclage et la récupération.
Comme nous prévoyons une extension de la galerie Hala, j’aimerais voir entre autres des ateliers de peinture et d’écriture de scénario. Pour rappel, le 1er juin dernier, l'écrivain et journaliste Abdelkrim Tazaroute a dédicacé son dernier livre intitulé Idir, Nostalgie enchanteresse paru aux éditions Qobia. Nous avons aussi organisé des ateliers de photographies en collaboration avec l’Etablissement art et culture.