L’abeille saharienne ou l’abeille jaune, également connue sous le nom scientifique, Apis Mellifica Sahariensis, n’existe que dans la région du Sud-Ouest algérien, principalement à Ain Sefra (wilaya de Naâma) et au nord de Béchar où on l’appelle aussi el ghanmi.
Ce noble insecte est unique en son genre. Il se caractérise par sa puissance et sa grande taille par rapport à l’abeille dite tellienne. «Cette abeille, comme butineuse, accumule de grandes réserves de miel par rapport à ce que réalisent les autres races. Les abeilles sahariennes vont butiner très loin, à plus de 8 km de leurs ruches. Mises en compétition avec les autres races locales, elles récoltent beaucoup plus de miel et de pollen et sont en même temps très économes. Contrairement à la race tellienne qui poursuit son élevage tant qu’elle a des provisions, même si la miellée est terminée, la saharienne, en effet, la réduit aussitôt et garde précieusement ses réserves.
C’est une race réellement très rustique et très résistante qui, par ses caractères, se différencie des autres abeilles», lit-on dans une fiche technique établie par l’association éducative et culturelle Arc-en-Ciel de Ain Sefra.
Le bénéfique insecte saharien est aussi reconnu par sa douceur, sa prolificité, sa précocité, son aptitude extraordinaire à la récolte du nectar et du pollen et l’acclimatation facile face à la rudesse des conditions naturelles et à la faible productivité calorifique des écosystèmes oasiens. Cependant, malgré sa force de résistance, l’abeille saharienne fait face à de nombreuses menaces, dues à différents facteurs, entre autres, le facteur humain via l’introduction d’une autre race, en l’occurrence la race tellienne. C’est ce que qualifient les scientifiques de pollution génétique. L’utilisation des insecticides, notamment dans le cadre de la lutte antiacridienne lors de la décennie 1990/2000, avait fortement impacté les populations de l’abeille saharienne.
La menace humaine ne s’arrête pas à ce point. La chasse aux essaims a connu son apogée lors de la dernière décennie. Les méthodes utilisées, notamment le recours au procédé de la fumée, a causé d’énormes dégâts. Cette pratique était derrière un incendie qui s’est déclaré, en 2010, dans le parc national Djebel Aissa. Les flammes avaient ravagé une trentaine d’hectares de végétation et sûrement des ruches sauvages ont été atteintes.
D’autres facteurs d’ordre climatique menacent aussi l’abeille jaune.
L’on cite la désertification et la sécheresse dues aux bouleversements et au changement climatique, ce qui a engendré une raréfaction des ressources mellifère. Abdallah Khazene, président d’Arc-en-Ciel, revient sur les efforts consentis par son association pour sauvegarder et préserver l’abeille saharienne. «L’association a bénéficié d’un projet financé par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN-MED), dans le cadre du Programme de petites initiatives pour les Organisations de la société ci vile d’Afrique du Nord (PPI-OSCAN).
Notre objectif principal est la préservation et la réhabilitation de l’abeille saharienne», dira-t-il. Et d’ajouter que «70 apiculteurs locaux ont bénéficié, jusqu’ici, de formations et de campagnes de sensibilisation». « L’association visait aussi l’introduction de l’insémination artificielle chez les abeilles afin de préserver l’abeille saharienne endémique à la région de Ain Sefra. Malheureusement, nous n’avons pas pu avoir un inséminateur artificiel. En outre, des apiculteurs, que nous avons aidés avec du matériel, se sont retirés du programme. Il ne reste qu’un seul actuellement», déplore M. Khazene. En 2017, l’association avait aussi organisé, à Ain Sefra, un colloque national sous le thème : Quelle collaboration pour sauver cette espèce ?
Un plaidoyer pour l’abeille saharienne. Plusieurs organismes et instituts étatiques, des chercheurs universitaires, association et apiculteurs, ont pris part à l’évènement. La rencontre s’est terminée par l’adoption d’une série de recommandations.
Entre autres, l’importance de la création d’une zone tampon qui servira de station de fécondation pour les reines des abeilles sahariennes, l’élaboration d’une charte sur la protection de l’abeille saharienne, l’implication des universités et instituts de recherche pour la préservation et l’amélioration de la race de l’abeille saharienne.
Les participants au colloque ont appelé aussi au classement de l’abeille saharienne dans la liste rouge de l’UICN des espèces menacées, ainsi que la labellisation de son miel dans le cadre de la valorisation des produits du terroir.