Abderrahmane Yefsah : Un artiste plein de valeurs humaines

16/01/2024 mis à jour: 00:31
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Abderrahmane Yefsah est un artiste sensible et plein de valeurs humaines. Diplômé des Beaux-Arts de l’académie d’Alger et de Milan, en Italie, il choisit l’écriture, disait-il, pour ne pas sombrer dans la folie. Lui qui subira justement toute la cruauté de ce monde surtout depuis l’assassinat de son frère Smaïl, journaliste à l’ENTV, en 1993. 

Pour lui, écrire est une façon de toucher le fond du silence qui troublait son âme. D’ailleurs, dans son premier roman intitulé Et Caïn tua Abel, comme pour conjurer la souffrance, il nous donne un texte qui traite de l’ivresse de l’amour sur fond de terrorisme islamiste. Un livre qui lui ouvre des lendemains littéraires prometteurs puisqu’il gagnera le prix Tahar Djaout. 

Mais il ne tardera pas longtemps dans ce thème célébrant l’amour. Son deuxième livre sera une méditation douloureuse sur la mort de ce frère assassiné par les hordes terroristes. Il sera fait de scènes concrètes où il revient avec détails sur ce jour fatidique. Dans ce livre, il rappelle certaines vérités que notre monde plein de fausses bienveillances galvaude pour des intérêts politiques ou idéologiques. 

Pour lui, écrire sur ce sujet, c’est chasser les nuages sur sa route. C’est renouer avec la vie, à défaut de le faire avec la joie. Il croyait au pouvoir d’une phrase, d’un texte, pour changer le monde ou du moins pour échapper, ne serait-ce qu’un instant, à sa cruauté. Un autre livre intitulé Tamda Lablatt et Taourga relate, sur la base d’un simple poème raconté par sa défunte mère, l’histoire de la famille des Mhièdine de Taourga. 

Une histoire riche en événements ayant un rapport avec la présence ottomane et l’arrivée des Français en 1830. D’autres livres, notamment des romans, pour certains laissés en suspens, voient le jour. Tikli, ou La marche, un livre toujours sur la tragédie des années quatre-vingt-dix. Puis en dernier, Le verbicruciste de l’horreur, un livre qui relate l’histoire d’un journaliste pris entre le marteau de la répression et l’enclume de l’islamisme. Abderrahmane laissera d’autres manuscrits toujours dans le registre de la déception mais sans la moindre animosité ou esprit revanchard. 

Sa littérature n’est qu’une peinture touchante de son propre vécu. Il n’avait pas besoin de beaucoup d’imagination. Il lui suffisait d’animer la machine de ses émotions, de ses souvenirs pour laisser venir des phrases à l’image de sa lassitude de ce monde, un peu comme si, au fond de lui-même, il rêvait d’un temps doux à venir par le seul fruit de l’innocence et de la pureté de l’âme. Il posait toujours son regard doux, tranquille, celui qui enregistre toutes les pulsations alentours. Celui aussi dont personne ne peut remarquer ses transformations intérieures. 

Preuve en est dans le ton de ses livres où l’indulgence et le pardon émergent toujours en dépit de toutes ses déceptions.            Lounes Ghezali

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