Plusieurs milliers de personnes ont défilé hier à Paris pour réclamer «la levée du secret-défense» dans l’enquête sur l’assassinat de trois militantes kurdes en 2013, rapporte l’AFP.
Drapeaux rouges du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) à la main, ou banderoles violettes à l’effigie des victimes, les manifestants s’étaient donné rendez-vous devant la Gare du Nord avant de marcher, dans le calme, jusqu’à la place de République, lieu traditionnel de rassemblement politique à Paris. «Justice et vérité», «onze ans après toujours pas de justice», «en dix ans les Kurdes tués deux fois» sont entre autres slogans brandis par les manifestants.
D’après les organisateurs, plus de 10 000 personnes venues de France, Belgique, Allemagne, Suisse ou encore des Pays-Bas étaient présentes dans le cortège. La préfecture de police n’a pas communiqué de chiffres officiels à 15h30. «Il faut que la France rende justice aux Kurdes, parce que ce n’est pas normal: l’assassin est connu, les commanditaires sont connus», a déclaré Berivan Firat, porte-parole du Conseil démocratique kurde en France, une structure regroupant une vingtaine d’associations kurdes du pays.
«L’Europe devrait avoir une politique pro-kurde, on ne peut pas laisser ces crimes impunis», a estimé une femme qui s’est déplacée depuis la Belgique et ayant requis l’anonymat.
Dans la nuit du 9 au 10 janvier 2013, trois militantes du PKK ont été tuées de plusieurs balles dans la tête dans l’enceinte du Centre d’information du Kurdistan (CIK), à Paris : Sakine Cansiz, 54 ans, Fidan Dogan, 28 ans, et Leyla Saylemez, 24 ans. Dix ans plus tard, des juges d’instruction antiterroristes tentent toujours d’identifier d’éventuels complices du tireur présumé, décédé en prison.
L’enquête de la justice française, qui a pointé «l’implication» du MIT, les services de renseignement turcs, quand Ankara comme l’Union européenne qualifient le PKK d’organisation terroriste, sans toutefois désigner de commanditaires, a été rouverte en 2019. Le MIT a, lui, officiellement démenti toute implication. Pour faire avancer le processus judiciaire, «nous demandons la levée du secret-défense qui bloque le partage avec la justice d’éléments en possession du renseignement français», a indiqué à l’AFP Agit Polat, porte-parole du Conseil démocratique kurde en France (CDK-F).
Le souvenir de ce triple assassinat a été ravivé l’an dernier après le meurtre, dans le centre culturel kurde de Paris, de trois Kurdes (deux hommes et une femme) le 23 décembre par William Malet, ancien parachutiste mis en examen et écroué pour assassinats et tentatives d’assassinat à caractère raciste.
De nombreux Kurdes refusent de croire à la version d’un tireur isolé ayant agi «par haine» des étrangers, et dénoncent un acte «terroriste» en mettant en cause la Turquie.