Deux spectacles ont été présentés, dimanche, au Théâtre régional Azzeddine Medjoubi d’Annaba, à la faveur de la compétition au 6e Festival national du théâtre féminin qui se déroule jusqu’au 5 octobre.
Hawa est un psychodrame mis en scène par Brahim Nefnaf de l’association Nahda de Bordj Menaïel (Boumerdès). Il est interprété par Houria Boussouar, d’après son propre texte.
La comédienne, vêtue de blanc, raconte une vie compliquée dès la naissance. Abandonnée par ses parents dans un orphelinat, elle tente de construire sa vie. Sa quête d’amour l’amène à rencontrer Samir, un Don Juan irrésistible.
Comment compenser la tendresse qu’elle n’a pas eu ailleurs dans son enfance ? Elle tombe pieds et poings liés dans le piège poussé par sa naïveté.
Acte réparable ? Hawa, sans appui familial, se sent perdue. Le sujet est certes sensible, mais déjà traité au cinéma, au théâtre et en littérature. Houria Boussouar n’a pas cherché la profondeur. Elle s’est contentée d’une longue narration plaintive avec un jeu peu rythmé et une action rachitique.
L’envie de tout dire sur scène a pris le dessus sur le spectacle. Un spectacle qui malgré tout n’a pas manqué d’audace montrant Hawa, devenue fille de nuit, dans un club avec une robe de soirée et fumant sur scène.
La comédienne a commis l’impair de jeter le mégot encore allumé sur scène. Ne faudrait-il pas ouvrir le débat sur l’utilisation de la cigarette sur les planches sans toucher à la liberté de création ? Hawa a brisé le quatrième mur pour rejoindre la salle en mendiante réclamant de l’aide. Un choix artistique peut convaincant. L’auteure donne l’impression de vouloir provoquer l’apitoiement du public sur son sort. Rongée par le remord, Hawa, qui tente de se débarrasser des souillures de l’existence en jetant de l’eau sur son corps, se culpabilise au point de martyriser son corps.
Houria Boussouar a choisi le prénom Hawa, qui peut signifier que toutes les femmes sont ou peuvent être concernées par son histoire. Lors du débat qui a suivi le spectacle, elle a annoncé avoir écrit le texte à partir d’un fait réel. «Je me suis inspirée de l’histoire vraie d’une amie. Une histoire qui m’a beaucoup touchée», a-t-elle dit.
Le théâtre doit, selon elle, passer au peigne fin les maux de la société comme la consommation de la drogue chez les femmes et les mère-célibataires. «J’ai usé du discours direct dans le spectacle pour lancer une alerte. Cela ne veut pas dire que toutes les femmes sont dans la situation de Hawa. Beaucoup de femmes élevées dans les orphelinats ont réussi dans leurs vies. Il existe des centres sociaux qui reprennent les enfants nés hors mariages mais rejettent les mères, comme s’ils les encourageaient à poursuivre sur la même voie. Et parfois, ils les empêchent même de revoir leurs enfants», a-t-il dénoncé.
La descente aux enfers
Saliha ou alef tekliha (Saliha et mille coups tordus) de Toufik Bekhouche de Ramakids Academy de Tébessa est aussi un monodrame sur une femme happée par les vents contraires de la vie, comme un oiseau volant en temps d’orage. Saliha (Rahma Kala) est une jeune fille candide, née dans la souffrance. Sa famille ne voulait pas d’elle puisqu’elle s’attendait à la naissance d’un garçon. Grandie avec cette douleur, Saliha, qui veut croquer la vie à belles dents, suit «les commandements» de sa mère Hnia.
Manipulée par-là, utilisée par-çi, elle entre à l’université après l’obtention du bac. Une délivrance ? Elle découvre petit à petit «le monde» universitaire. On lui fait comprendre que le mieux pour une fille est de terminer les études avec «un diplôme et un homme». Elle tombe dans un gouffre après avoir cru à l’amour. Saliha se culpabilise aussi regrettant de n’avoir pas respecté les conseils de sa mère.
Usant d’un voile blanc, Rahma Kala campe plusieurs personnages sur scène, femme ou homme, en changeant les situations et la tonalité vocale. Une performance saluée par les professionnels présents au festival, surtout que la comédienne a évolué sur une scène nue.
Dans la matinée du dimanche 1er octobre, un débat animé par Brahim Noual a porté sur le parcours de la comédienne Yamina Ghassoul, décédée en septembre 2022, en présence de sa sœur Fatiha Ghassoul. La discussion a porté sur le manque d’archives et de biographies sur les comédiens algériens qui meurent sans laisser de traces.