16 cas de diphtérie confirmés par le ministère de la santé : Plus de 10 000 personnes vaccinées au sud du pays

05/08/2023 mis à jour: 07:10
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La majorité des cas enregistrés concernaient des ressortissants étrangers des pays voisins non vaccinés, vivant dans la périphérie de Tamanrasset

Le ministère de la Santé a confirmé mercredi l’apparition de la diphtérie dans «certaines régions frontalières avec les pays du Sahel», principalement dans la wilaya de Tamanrasset, faisant état de «16 cas confirmés».

 Il a affirmé, dans un communiqué, que «la plupart des cas enregistrés sont des ressortissants étrangers de pays voisins non vaccinés qui vivent dans la banlieue de la ville de Tamanrasset», sans toutefois préciser s’il y a eu des décès. Alors qu’une source médicale a confié la semaine dernière à El Watan que la diphtérie avait provoqué le décès de 13 personnes, dont des enfants mais aussi une femme âgée de 36 ans, précisant que le plus important foyer de diphtérie a été détecté à Tin Zaouatine, ville frontalière avec le Mali. 

Face à la résurgence de la diphtérie dans le sud du pays, le département de la santé a assuré que «(…) toutes les mesures ont été prises d’urgence par les autorités sanitaires locales pour éviter la propagation de la maladie, notamment la prise en charge de tous les cas au niveau des structures sanitaires, la création d’une cellule de crise pour suivre la situation épidémiologique». 

Aussi, le ministère a annoncé le lancement d’une vaste campagne de vaccination pour laquelle «tous les moyens (médicaments, sérum antidiphtérique, vaccins, matériel de prélèvement, etc.) ont été mis à la disposition des équipes de soins ou de vaccination (…), ciblant les quartiers les plus touchés et les cas contact», a ajouté la même source, précisant que cette campagne a touché, jusqu’ici, «plus de 10.100 personnes». «La situation est stable à l’heure actuelle» et «aucun cas n’a été enregistré depuis plusieurs jours», a rassuré le ministère, soulignant toutefois que «la vigilance reste de mise».
 

Enfants non scolarisés 

Invité jeudi soir sur le plateau de la chaîne El Hayat TV, le Dr Lyes Akhamoukh, chef du service infectieux au CHU de Tamanrasset, a déclaré qu’ «aucun cas n’a été enregistré» depuis une semaine. 

«Depuis la fin mai, et face au nombre croissant de malades, nous étions obligés de rediriger certains, des enfants surtout, depuis le service infectieux vers le celui de la pédiatrie. En deux mois (juin et juillet, ndlr), nous avons accueilli progressivement de nombreux malades atteints de diphtérie», a-t-il dit, confirmant des cas de décès mais sans en préciser le nombre. «60 à 70% des cas admis à l’hôpital de Tamanrasset sont des enfants âgés de 2 à 15 ans», a-t-il signalé. 

Selon lui, des enquêtes épidémiologiques ont été aussitôt lancées suite au dépistage de la diphtérie chez des «enfants non-scolarisés et issus de populations nomades subsahariennes».Lors de l’émission, le Pr Zemit Fatma Zohra, cheffe de service à l’hôpital d’El Kettar, a attribué la résurgence de la diphtérie dans les régions du Sud, citant les wilayas de Tamanrasset, Adrar et Bordj Badji Mokhtar, à l’itinérance de groupements nomades «non-vaccinés ou qui n’ont pas respecté le schéma vaccinal qui leur a été administré».

 «Souvenons-nous que durant la période de la Covid, certains parents ont refusé  de se rendre dans les hôpitaux, privant ainsi leurs enfants d’une vaccination contre toutes sortes de maladies», a-t-elle fait remarquer. Et de rappeler que l’Algérie a observé un reflux de la diphtérie en 2016 ; une réémergence de la maladie avec des cas sporadiques en 2019, puis une augmentation de cas confirmés (30 personnes) entre 2020 et 2022, durant la pandémie. Mais, c’est en 1994 et 1995 que l’Algérie a connu un pic élevé d’infections rendant nécessaire des campagnes de vaccination de masse. 

Entre 93 et 96, des centaines de cas dont les trois-quarts concernant des sujets de plus de 10 ans ont été diagnostiqués : 1993 (296 cas), 1994 (996 cas), 1995 (1060 cas), 1996  (107 cas). 
 

«Situation maîtrisée »

Le Pr Abderezzak Bouamra, directeur de l’Institut de santé publique (INSP), a, lui, insisté sur la nécessité d’intensifier les campagnes de vaccination dites de rattrapage afin de «réduire la mobilité de la maladie». «Les cas de diphtérie détectés au sud du pays sont des cas importés. Il n’y a pas lieu de s’inquiéter du moment que le taux de vaccination contre la diphtérie en Algérie est élevé, dépassant les 90% de la population», a-t-il expliqué. «La situation est maîtrisée grâce aux campagnes préventives menées durant la période de la Covid et ciblant les personnes nomades à forte mobilité», a-t-il ajouté, excluant toute propagation de la maladie vers les régions situées plus au nord. 

De son côté, le Pr Benamrouche Nabila, microbiologiste à l’Institut Pasteur, a expliqué que le bacille de Löffler-Klebs, responsable de la diphtérie, se transmet principalement par contact direct ou par voie aérienne. «Le réservoir du bacille de la diphtérie est l’humain. C’est une maladie inter- humaine qui provoque des angines purulentes conduisant à des décès par suffocation, ou par sécrétion de toxines provoquant des myocardites et de graves lésions cérébrales quasi mortelles», a-t-elle alerté. «La diphtérie est une toxi-infection qui affecte le cœur et le système cérébral. C’est à la fois une urgence diagnostique et thérapeutique. 

Ces dernières années, de nombreux cas ont été recensés aux frontières sud, devenues fluides», note le Pr Benamrouche. «Il faut maintenir les campagnes de rattrapage, affiner les systèmes de veille sanitaire et d’analyse instantanée des données épidémiologiques pour une meilleure riposte contre la maladie», a suggéré, pour sa part, le Pr Bouamra. 

Au plus près des nouveaux foyers de la diphtérie, le Dr Akhamoukh a préconisé de doter Tamanrasset d’un centre de référence pour des isolements stricts de cas suspects ou confirmés de maladies bactériennes et virales. Il a, en outre, recommandé de renforcer tous les hôpitaux du sud du pays en médecins, généralistes et spécialistes. 

Selon lui, cela est d’autant nécessaire au vu du flux migratoire en nette hausse dans les régions frontalières avec les pays du Sahel. 
 

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