Sous l’impulsion d’une poignée de résidents, un comité a été constitué leur mission : nettoyer les lieux (ordures, criminalité, insécurité...) et rétablir l’ordre.
C’est enfin la saison estivale. Au village touristique Capritour, précisément, aux résidences Les Jasmins et les Amandiers, l’ambiance n’est pas à la villégiature. Le village, repris par les copropriétaires qui, après une rude bataille juridique et administrative, menée par une poignée de volontaires, à leur tête, une femme, Zakia Benmesahel, se sont mobilisés autour d’un seul mot d’ordre : sortir le village de la débauche. Pour s’organiser, les villageois ont d’abord installé un comité chargé de «nettoyer» les lieux à la fois des ordures, des trafiquants de drogues et de la prostitution ainsi que de rétablir l’ordre et la sécurité.
Il instaure alors un règlement intérieur afin de venir à bout de l’anarchie régnant au temps de l’ancien gérant et promoteur, N. Leklak, écroué à trois ans de prison pour divers griefs, dont l’évasion fiscale. Avant les grosses chaleurs ayant marqué ce début du mois de juin, les habitants se sont «attaqués» au nettoyage des allées, la remise en l’état des loges de sécurité et autres équipements, comme la rénovation de la bâche à eau, ainsi qu’à trouver des solutions, avec l’APC de Boukhlifa quant à la gestion des déchets. Mais d’autres batailles juridiques se sont avérées nécessaires selon les copropriétaires. Pour éradiquer définitivement toute source de nuisance, il a décidé d’engager des poursuites contre les responsables de la délinquance sévissant à ce jour entre les quatre murs de Capritour et d’anticiper par un règlement rigoureux qui rendra la gestion et l’organisation des lieux implacables.
Car en matière de sécurité beaucoup reste à faire, mais «nous y arriverons tous ensemble», dira la présidente du comité, Mme Benmesahel, celle qui a su renverser la donne dans ce chao et dont le nom de l’enseigne a rimé des années durant avec débauche. Il a fallu donc mettre des garde-fous, notamment, pour contrôler les accès de la résidence, à commencer par engager une société de sécurité. Une société de gardiennage et de surveillance a été recrutée pour veiller à la sécurité des biens et des personnes, dans cette résidence qui a trop souffert de nombreux actes de vols et de violence. La mise en place de ce dispositif a déjà donné ses fruits. Il y a quelques jours, «deux voleurs ont été appréhendés par l’équipe de surveillance. Ils étaient pris en train de cambrioler une villa».
Les deux individus ont été aussitôt remis à la gendarmerie, alertée ainsi que les propriétaires du bien. Au début de ce mois de juin, «une fille, mineure, de Souk El Tenine, donnée en fugue depuis 4 jours, a été retrouvée par les agents de sécurité, séquestrée à l’intérieur d’un appartement à la résidence les Jasmins», témoigne-t-on. Fait gravissime : «Elle a été battue par les individus qui l’accompagnaient.» Cet incident a conduit le comité à exhorter les villageois «d’arrêter de louer ou de laisser les clés des appartements à n’importe qui !» Ainsi, une autre mesure a été prise en collaboration avec les services de sécurité qui ont démontré leur engagement à contenir définitivement la situation sécuritaire.
«L’insécurité nous parvient en partie de l’activité d’un bar-hôtel qui partage l’accès avec le village, ainsi que des locataires indélicats», affirment les habitants. Après avoir constaté la situation alarmante en matière de sécurité dans la résidence, un règlement intérieur ainsi qu’une batterie de recommandations ont été adoptés afin de limiter la fréquentation des lieux par «des étrangers douteux». Ces derniers, selon l’association, «seront soumis dorénavant à un contrôle rigoureux devant l’accès, avec toutes les mesures de prévention, comme la fouille systématique des véhicules, l’enregistrement des visiteurs et des locataires qui seront obligés de contracter un bail».
Location anarchique
«Nous continuons à combattre toutes ces locations douteuses et aimerions que les copies des agréments des soi-disant agences de location installées à l’intérieur nous soient remises, car dans le village plusieurs se sont prévalus de l’appellation agence immobilière, mais qu’en est-il réellement ?», s’interroge-t-on. «Lorsque nous avons acheté nos biens, on nous avait promis qu’il n’y aurait aucune vente d’alcool, ni bar,ni quoique ce soit au niveau de la restauration ! On se retrouve aujourd’hui avec deux bars et un hôtel, au sein de la résidence qui partage les accès du village», dit Zakia.
Comme cela se fait dans les hôtels, désormais, une fiche de police doit être remplie par tout locataire légalement installé avec un contrat de location pour passer des vacances ou tous les visiteurs. Ces fiches, indique-t-elle, «seront remises chaque soir à 22h aux autorités pour vérification après enregistrement par le gardiennage sur le registre qui sera envoyé chaque semaine à la brigade». Malheureusement, les villageois continuent de faire face aux résidus de la délinquance dans l’enceinte du village, proliférant toute sorte de fléau : prostitution, drogue, alcool, des ingrédients qui ont souvent servi de mèche pour des bagarres parfois sanglantes et violentes.
Les habitants sont ainsi déterminés à «sortir toute cette délinquance du village, car les copropriétaires en ont ras-le-bol de voir le village envahi de prostituées et de revendeurs de stupéfiant !», disent-ils, comptant aussi sur l’aide précieuse des autorités compétentes, «afin que cesse ces locations sauvages où se rencontrent trafiquants de drogues, prostituées et voleurs qui agissaient sans être inquiétés par l’ancien gestionnaire». Tout récemment, a indiqué Mme Benmesahel, «l’association a renforcé la sécurité des lieux en engageant des maîtres chiens, une équipe d’intervention nocturne et des caméras de surveillance, après l’installation de la nouvelle société de gardiennage». Cela est rendu possible grâce, ajoute-elle, «à la précieuse aide du président de l’APC de Boukhlifa qui nous soutient dans la plupart de nos démarches visant à améliorer le cadre de vie dans le village et sécuriser ces lieux longtemps abandonnés».
Améliorer le cadre de vie
Aussitôt installé, le comité de village organise un «grand toilettage» des espaces. «Nous avons organisé deux journées de volontariat pour nettoyer le village et sollicité l’APC de Boukhlifa afin de pouvoir évacuer les ordures et les déchets ramassés vers une décharge», dit un membre du comité. A ce niveau, ajoute Zakia, «nous rencontrons beaucoup de difficultés pour l’évacuation des poubelles car la mairie de Boukhelifa n’a malheureusement pas beaucoup de moyens pour qu’elle puisse fournir les bacs à ordures et l’enlèvement des ordures », dit-elle, soulignant la bonne volonté du maire. La saison des chaleurs est désormais arrivée, et l’eau, élément essentiel, ne doit pas manquer aux habitants.
Ce problème a été traité intelligemment par le comité en optant pour la pose d’un compteur unique, après l’approbation, ajoute notre interlocutrice, de l’ADE de Béjaïa et la direction de l’hydraulique. «Nous avions un problème d’alimentation en eau, mais le comité, après avoir été reçu par les responsables du secteur à Béjaïa, nous avons conclu à un accord, celui de la pose d’un compteur unique qui nous permettra d’alimenter la bâche à eau et fournir l’eau à tout le village». Cependant, ils éprouvent encore des difficultés à obtenir la même formule auprès de sonelgaz afin d’éclairer le village, qui plonge dans l’obscurité totale le soir.
Sans gaz naturel depuis 18 ans
«Sonelgaz refuse de nous installer un compteur électrique au nom du comité, exigeant d’abord le paiement des dettes cumulées par le promoteur (l’ancien gérant), et qui s’élèvent à près d’un milliard de dinars», regrette la même source, souhaitant, «une solution urgente de la part de la DDB, car disent-ils, «nous ne pouvons hériter de toutes ces dettes de l’ancien gérant». Les responsables du comité se demandent d’ailleurs : «L’ADE, bien qu’ayant des arriérés avec Capritour, a accepté de nous installer un compteur au nom du comité. Pourquoi pas Sonelgaz ? Pourquoi a-t-elle attendu qu’une somme aussi élevée soit due alors que les copropriétaires sont automatiquement «coupés» dans leur logement pour un premier retard de paiement ?»
Quant à l’énergie gazière, les habitants s’approvisionnent toujours en butane. «Nous avons sollicité à plusieurs reprises la direction de distribution de Béjaïa, l’agence d’Aokas et même deux fois la direction générale, en vain», affirme-t-on, et de préciser que ce sont 1000 habitations, et autant de potentiels clients qui demeurent privés de gaz naturel, et ce, depuis 18 ans.