Le Soudan a été débouté hier par la Cour internationale de justice (CIJ), dans sa demande en indication de mesures conservatoires contre les Emirats, qu’’il accuse de «complicité de génocide» en cours sur son territoire. La Cour s’est déclarée «incompétente» et a décidé de «rayer l’affaire» de son rôle sur la base des réserves soulevées par les Emirats en lien avec l’article IX de la Convention sur le génocide.
Par 14 voix contre deux, la Cour internationale de justice (CIJ) a rejeté la demande du gouvernement soudanais, d’indication en mesures conservatoires contre les Emirats, accusés de «complicité de génocide» contre la communauté de Masalites au Soudan, en raison du «soutien financier, militaire et politique» qu’ils «assurent» aux Forces de soutien rapide (FSR) et aux milices qui lui sont liées, au Darfour occidental. Elle s’est déclarée incompétente pour examiner la requête du Soudan et a décidé par neuf voix contre sept, de rayer l’affaire de son rôle.
Au terme de cette requête, faut-il le rappeler, le Soudan avait demandé à la Cour d’indiquer les mesures conservatoires et se conformer aux obligations leur incombant au regard de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, de «prendre toutes les mesures en leur pouvoir pour prévenir la commission, contre les Masalites au Soudan, de tout acte entrant dans le champ d’application de l’article II de la convention, en particulier les actes de meurtre de membres du groupe, d’atteinte grave à l’intégrité physique ou mentale de membres du groupe, de soumission intentionnelle du groupe à des conditions d’existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle et d’imposition de mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe ».
Le Soudan a également demandé à la Cour des mesures qui obligent les Emirats «de veiller à ce qu’aucune unité armée irrégulière qui agirait sous leur direction ou avec leur appui, ainsi qu’aucune organisation ou personne qui se trouverait sous leur contrôle, leur direction ou leur influence ne commette, contre le groupe des Massalit, un quelconque des actes visés au point 1 ci-dessus, ou ne se livre à un quelconque acte constitutif d’entente en vue de commettre le génocide, d’incitation directe et publique à commettre le génocide, de tentative de génocide ou de complicité dans le génocide».
Dans leur exposé oral adressé à la Cour le 11 mars dernier, les Emirats ont indiqué que «(…) Compte tenu du défaut manifeste de compétence de la Cour, au regard de l’article IX de la Convention sur le génocide, pour connaître des demandes de la République du Soudan, de l’absence de toute autre base de compétence dans la requête et la demande, et du fait que les Emirats n’avaient pas accepté la compétence de la Cour selon les termes du paragraphe 5 de l’article 38 du Règlement de celle-ci». Ils ont donc demandé de rejeter l’affaire et de «la rayer du rôle général».
Lors des audiences du 10 avril dernier, les Emirats ont prié la Cour de rejeter la demande en indication de mesures conservatoires soumise par le Soudan et de rayer du rôle général l’instance introduite. Les Emirats ont déclaré, pour leur part, que l’article IX de la Convention sur le génocide «est la seule base de compétence invoquée par le Soudan» et noté toutefois que du fait de la réserve qu’ils ont émise à l’article IX en 2005, «cette disposition n’est pas en vigueur entre les parties et ne peut pas fonder la compétence de la Cour à l’égard des griefs présentés contre eux».
Pour les Emirats, «cette réserve formule précisément son objet et ses effets ; elle ne peut être interprétée que comme exprimant leur intention de ne pas être liés par l’article IX». Ils ont souligné que «l’absence d’objection de la part du Soudan signifie que celui-ci a accepté la réserve».
En ce qui concerne la validité de leur réserve, les Emirats ont également noté que, «par le passé, la Cour a donné leur plein effet à plusieurs réserves à l’article IX de la Convention sur le génocide et que selon la jurisprudence constante de la Cour, les réserves à cet article ne sont pas contraires à l’objet et au but de la convention».
Et de préciser plus loin, qu’ils «n’acceptent pas, par ailleurs, la compétence de la Cour ‘‘selon les termes’’ du paragraphe 5 de l’article 38 du Règlement de celle-ci». Aussi, ont-ils poursuivi, «compte tenu du défaut manifeste de compétence de la Cour, au regard de l’article IX de la convention, pour connaître des demandes du Soudan, et de l’absence de toute autre base de compétence, ainsi que dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, les Emirats arabes unis prient la Cour de rayer l’affaire du rôle général».
Conditions requises
La Cour a pour sa part conclu qu’eu égard à la réserve des Emirats à l’article IX de la Convention sur le génocide, «cette disposition ne saurait constituer, prima facie, une base de compétence en la présente espèce. Il s’ensuit que la Cour, n’ayant pas prima facie compétence pour connaître de la requête du Soudan, ne peut indiquer les mesures conservatoires demandées à l’effet de protéger les droits qui y sont invoqués.
En conséquence, il est inutile pour la Cour de rechercher si les autres conditions requises pour l’indication de mesures conservatoires sont remplies en l’espèce et estimé en outre que, compte tenu de la réserve émise par les Emirats à la clause compromissoire contenue à l’article IX de la Convention sur le génocide et de l’absence de toute autre base de compétence, elle n’a manifestement pas compétence pour connaître de la requête du Soudan».
Pour la CIJ, «dans un système de juridiction consensuelle, maintenir au rôle général une affaire sur laquelle il apparaît certain que la Cour ne pourra se prononcer au fond ne participerait pas d’une bonne administration de la justice». Elle a décidé de rayer l’affaire du rôle général. Elle a, cependant, rappelé qu’après «être parvenue à la conclusion qu’elle n’a manifestement pas compétence, la Cour ne peut, de par son Statut, prendre aucune position sur le fond des demandes formulées par le Soudan.
Toutefois, ainsi que la Cour l’a dit à plusieurs reprises, il existe une distinction fondamentale entre la question de l’acceptation de la juridiction de la Cour par les Etats et la conformité de leurs actes au droit international. Qu’ils aient accepté ou non cette juridiction en vertu de l’article IX de la Convention sur le génocide, les Etats sont tenus de se conformer aux obligations mises à leur charge par cet instrument, et demeurent responsables des actes contraires à leurs obligations internationales qui pourraient leur être attribués».
UNRWA : «Nos services médicaux manquent de ressources»
L’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine (UNRWA) a déclaré que ses services médicaux manquent «cruellement» de ressources en raison du blocage par l’entité sioniste de l’entrée de toute aide humanitaire dans la bande de Ghaza depuis plus de deux mois. «Avec le siège et les bombardements (sionistes) incessants, les services médicaux de l’UNRWA manquent cruellement de ressources.
Près d’un tiers des fournitures essentielles sont en rupture de stock et un autre tiers devrait être épuisé d’ici moins de deux mois», a prévenu l’UNRWA dans un message publié hier sur les réseaux sociaux. «L’UNRWA demeure l’un des principaux acteurs de la santé à Ghaza», a réaffirmé l’agence onusienne. Dimanche, l’UNRWA avait souligné que la situation humanitaire dans la bande de Ghaza dépassait l’imagination et a appelé une nouvelle fois à un cessez-le-feu immédiat.
Le commissaire général de l’UNRWA, Philippe Lazzarini, avait déjà mis en garde vendredi contre les effets dévastateurs du siège sioniste qui «tue en silence» chaque jour davantage d’enfants et de femmes, en plus de ceux tombés en martyrs dans les bombardements toujours en cours. Depuis le 2 mars dernier, l’occupation sioniste a fermé les points de passage vers la bande de Ghaza, empêchant l’entrée de l’aide alimentaire, humanitaire, médicale et de marchandises, provoquant une dégradation massive de la situation humanitaire dans l’enclave.
Ghaza : Le Hamas refuse l’utilisation de l’aide humanitaire
Le mouvement de résistance palestinien Hamas a rejeté, fermement, le fait de transformer l’aide humanitaire en un moyen de «chantage politique» ou de la soumettre aux conditions de l’occupation sioniste, affirmant que le mécanisme proposé représente une «violation du droit international», a indiqué, hier, un communiqué du mouvement.
«Nous rejetons fermement le fait de transformer l’aide en un moyen de chantage politique ou de la soumettre aux conditions de l’occupation, et nous affirmons que le mécanisme proposé représente une violation du droit international et une répudiation des obligations de l’occupation en vertu de la Convention de Genève, et une extension de la politique de famine et de dispersion qui donne à l’occupation un délai supplémentaire pour commettre des crimes génocidaires», a fait savoir le Hamas.
Le mouvement de résistance a apprécié «la position des Nations unies et des organisations internationales qui rejettent tout arrangement qui ne respecte pas les principes humanitaires fondamentaux, en particulier la neutralité, l’indépendance, l’humanité et l’impartialité», rappelant que la seule partie autorisée à gérer et à distribuer l’aide est les institutions internationales et gouvernementales compétentes, et non l’occupation sioniste ou ses agents.
Le Hamas a appelé à cet égard, la communauté internationale à «ne pas se laisser tromper par les faux récits de l’occupation et à agir immédiatement pour briser complètement le siège et ouvrir les points de passage pour l’acheminement de l’aide alimentaire et médicale, sous la supervision des Nations unies et loin de toute ingérence militaire ou politique». Il a ajouté que l’occupation sioniste continue d’empêcher l’entrée de l’aide et de perturber le système de distribution humanitaire, ce qui révèle clairement «son intention délibérée de créer une famine», soulignant que l’entité sioniste est entièrement responsable de l’aggravation de la catastrophe humanitaire dans la bande de Ghaza.