Lounès Ghezali (Correspondance particulière)
Comme pour son premier livre intitulé Témoins du temps et autres traces, on ressent les pulsations d’une même âme dansante.
Ce pays d’où tu viens et Les galets de l’oubli est un nouveau recueil de poésie de Salah Oudahar qui sortira prochainement en France et en Suisse aux éditions d’en bas. Comme pour son premier, intitulé Témoins du temps et autres traces, on ressent les pulsations d’une même âme dansante. Des mots qui titillent le cœur car ils viennent d’un poète (comiquement) agité.
Même s’ils prennent toujours ce petit déguisement de sérénité et de calme, ces mots, par leur force et l’émotion qu’ils suscitent, prennent des allures pour toucher à la condition humaine. Accompagnés de photos, comme par une tentation d’arrêter les minutes qui s’égrènent ou le temps qui s’enfuit, ces poèmes, quelque peu disparates, chantent tout simplement la vie.
La vie dans toutes ses facettes, allant du sourire d’un enfant jusqu’à la guerre et la mort. Subtil mariage entre rêves d’enfants et toutes sortes de contraintes de la vie que l’homme est forcé de suivre. Mais les souvenirs indélébiles de l’enfance, la guerre, l’indépendance, l’exil et les voyages restent les sujets les plus présents.
Ces poèmes qu’on peut volontairement intituler tourments et plaisirs nous rappellent joliment que la vie se compose toujours de ces deux mots inséparables. On les retrouve au bout d’un souvenir collé à nous, entretenant une intériorité déchirée, on les retrouve dans notre présent avec ses affres et ses jouissances. Songe de minuit évoque les morsures de la solitude. Avec une vibrante sensibilité, Salah Oudahar dresse, à l’aide d’une dizaine de mots, l’inventaire de toute une vie. Une description qui marque le dérisoire de notre existence et qui se résume justement à seulement quelques mots.
Quelques mots roulés en boules comme des galets, unissant une mémoire clouée dans le passé et un présent qui, lui, sans cesse, se dérobe. Mais ces mots, heureusement, sont là pour destituer le temps, pour reconstituer les souvenirs, pour revivre les faits vécus. Comme ces galets polis par le temps et le mouvement de la nature, ils ont la prétention de faire revivre, à travers cette ardente verve poétique, la pureté et l’innocence. «La nuit/ Je te reconstitue/ Pays…» Ici les mots ont toute leur puissance suggestive. Ils sont rassemblés sur un tas de souvenirs, de désirs, d’émotions, d’amour de la patrie.
Quant à l’omniprésence de la nuit, elle est là pour retrouver l’espace des souvenirs, de la mémoire, que les couleurs et les contingences du jour peuvent bel et bien altérer. Salah Oudahar ne peint pas dans ses textes un univers énigmatique. Il ne fait qu’abstraire, par ses propres couleurs, ce monde du réel vécu. Comme tous les poètes, Salah Oudahar ne semble pas se complaire avec le monde existant. L’enfance reste pour lui comme une promesse d’innocence et de joie. «Après l’hiver l’été/ Après décembre juillet/ Alger…
Cette ville aimée où autrefois notre jeunesse s’initiait au bonheur. Autrefois les ruelles de cette ville se prolongeaient vers des perspectives vivantes. Les poètes chantaient bien son espace toujours ouverts au rêve et à l’espoir. Salah Oudahar ne nous donne pas l’impression d’avoir oublié ses émerveillements, tous les émerveillements vécus dans ce pays d’où il est parti…