Must Rousnam se produit à l’Institut français d’Oran : De la musique électronique pour habiller les mélodies

26/01/2025 mis à jour: 16:45
843
Must Rousnam à l’IFA d’Oran

Beaucoup de mélodies et rythmes du terroir qui caractérisent le substrat musical algérien meublent le spectacle de Must Rousnam (nom de scène de Mustapha Benmansour), un artiste qui veut se lancer dans la musique électronique et qui est venu en fin de semaine dernière présenter ses «créations» à Oran, sur invitation de l’Institut français (IFA). 

C’est le résultat d’une résidence artistique effectuée en France, à la Cité internationale des arts de Paris. L’idée est intéressante, mais manque en quelque sorte d’originalité dans la mesure où les longues séquences de musique traditionnelle, en général prises telles qu’elles, font souvent ressortir et de manière flagrante le sentiment du déjà-entendu ou même du déjà-vu si en plus on doit tenir compte des animations proposées sur écran en arrière-plan, des images d’archives dont des séquences de films relativement récents. 

Parfois des paysages, mais en général des scènes de liesse sur écran qui font écho à l’ambiance festive qui a caractérisé les spectateurs du jour venus en nombre découvrir un genre parmi les moins répandus, scéniquement parlant, en Algérie et qui reste peut-être à faire découvrir davantage. Justement et bien évidemment, il y avait de la musique électronique, mais tout fonctionne comme si globalement cette partie du show n’était souvent là que pour accompagner les morceaux en question, des chants ou des séquences instrumentales couvrant la totalité des régions du pays autant de l’Ouest que du Centre, de l’Est, du Sud et même du Grand Sud algérien présentant successivement les différents styles qui les caractérisent. 

Le chant andalou, un genre un peu plus fédérateur car pratiqué un peu partout le long de la bande nord du pays, fait partie du lot même si les images et les voix choisies viennent de Tlemcen. 

Élan créatif  

La prestation n’est cependant pas dénuée d’intérêt, car il y a certainement de l’effort et du travail derrière, mais il lui manquait peut-être cet élan créatif qui, pour rester dans la même démarche, aurait beaucoup à gagner à aller explorer des fonds moins connotés ou moins connus, notamment pour le public algérien. Le risque est de tomber dans un certain exotisme qui exclurait toute tentative de réelle fusion des genres pour sortir avec un produit digne d’intérêt. 

La musique électronique est par essence futuriste et a une histoire qui remonte à près d’un siècle. Elle est le fruit de recherches technologiques et, pendant longtemps, elle était l’apanage de grands studios, y compris de radio, puis de musiciens ou de groupes qui disposent de beaucoup de moyens (le matériel était encombrant), mais c’est aussi le développement technologique qui l’a rendue accessible avec l’essor de la numérisation, de la miniaturisation et des nouveaux outils informatiques. 

C’est intéressant de voir dans l’Algérie d’aujourd’hui des jeunes femmes se lancer dans cette voie, et c’est par exemple le cas pour une jeune artiste comme Hiba qui, elle aussi, a adopté la même démarche pour l’avoir exprimée il y a près de deux ans à l’occasion de la Fête de la musique et pour avoir plus tard mis en ligne une «création» mettant à l’honneur la chanteuse algéroise Fadela Dziria. Un attachement à la tradition qui peut paraître pesant.

 La parenthèse mise à part, dans le spectacle dont il est question, Must Rousnam intègre même le «gumbri» qu’il joue lui-même comme une démonstration de plus pour cet attachement direct. Instrument traditionnel par excellence comme l’est le genre «diwan karkabou», toujours pratiqué aujourd’hui, même à Oran (Gambetta, El Hamri, etc.), mais dans un contexte ritualisé célébrant des occasions mais aussi à la demande de certaines familles.

 C’est le chanteur Amazigh Kateb (fils du célèbre écrivain) qui l’a introduit dans l’accompagnement de ses chansons, lui donnant de fait une place dans la musique contemporaine car d’autres jeunes ont suivi et la tendance se poursuit visiblement. 

C’est un musicien d’Oran, issu de la tradition et dénommé Miloud (le gumbriste), un percussionniste hors pair, habité par le genre, qui l’a d’abord sorti de son contexte en ayant accepté, dans un cadre associatif, de participer à un spectacle scénique (un peu théâtral) qui l’a amené en France et c’est de là, dit-on, que vient l’intérêt de Kateb, déjà installé à l’étranger et imprégné plutôt du «chaâbi (genre algérois)», pour cet instrument qu’il venait de découvrir par ce biais-là. 

Dans tous les cas de figure, l’effet est remarquable, y compris le mix avec l’électronique lors de cette soirée. Mais paradoxalement, alors que des genres traditionnels ont conquis les scènes ouvertes localement, c’est le genre musique électronique qui peine à trouver les siennes. 

Oran
De notre bureau Djamel Benachour 

Copyright 2025 . All Rights Reserved.