Le tissage et la confection d’un produit de qualité doivent répondre à des critères et des normes garantissant à la fois son authenticité, son origine ainsi que sa matière première. Comme pour le cachemire de Mongolie ou la soie de Chine ou autre produit de luxe, la garantie de la matière première entrant dans la fabrication de la kachabia ou du burnous est un gage de sûreté et de qualité du produit.
Pour faire du produit local un produit de luxe reconnu et commercialisé en tant que tel, il est impératif de veiller à préserver la source de la matière première. Dans le cas de la kachabia et du burnous, la confection ou le tissage est à base ou de poils de dromadaire ou de laine.
Le burnous ouabri, c’est-à-dire à base de poils de dromadaire, est tissé selon des normes de savoir-faire local que les artisanes de Messaad pratiquent depuis des siècles. L’imperméabilité et la légèreté de l’étoffe ouabri sont un gage de qualité inégalée par d’autres produits du même type.
Cependant, la baisse du nombre de la population cameline menace la survivance d’une étape importante dans la chaîne de confection de l’étoffe et qui consiste en l’opération de nettoyage, de traitement et de tissage. Des métiers dont seules les femmes détiennent le secret. Cette baisse du nombre de dromadaires a poussé des importateurs locaux à aller chercher la matière première sous d’autres cieux. C’est ainsi que l’on trouve des artisanes manipulant une matière venue d’Irak ou de Chine de bien moindre qualité et à moindre prix. «Si nous avions labellisé l’étoffe locale, nous n’aurions jamais permis l’importation de poils de chameaux de Chine ou d’ailleurs.
Au début, les artisans refusaient de se servir de cette matière importée, mais le coût et la rareté de la matière locale les ont poussé à l’utiliser bien malgré eux», indique Hamrit Rabie, directeur de la Chambre d’artisanat et des métiers de la wilaya de Djelfa.
La qualité aiguiga est, pour rappel, la meilleure et la plus prisée, car elle est issue des jeunes dromadaires, appelés mekhloul. «Le secteur de l’agriculture doit renforcer l’élevage de dromadaires dans la région, car une bonne partie de la richesse cameline passe de l’autre côté des frontières.
Si nous voulons garantir la pérennité de ce savoir-faire ancestral, il est primordial de garantir la quantité adéquate de la matière première locale et éviter que les artisans ne s’approvisionnent en produits étrangers de piètre qualité», souligne Mohamed Kanoune, chercheur à l’INRA. Il y a urgence à labelliser la qualité aiguiga afin de permettre non seulement de renforcer la population cameline mais également de protéger une production nationale dont l’essor permettra certainement de créer une dynamique économique porteuse de développement à la région de Messaad, et donner une visibilité internationale à un produit national de luxe.