Réunis samedi à Accra (Ghana), les dirigeants ouest-africains ont maintenu les sanctions contre le Mali, tout en gardant la porte ouverte à leur levée si la junte s’engage à partir plus vite qu’elle ne le prévoit actuellement.
C’est ce qu’a déclaré hier dans un communiqué la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao), cité par l’AFP. L’organisation régionale «décide de maintenir les sanctions imposées» et de «continuer le dialogue afin de parvenir à un accord permettant une levée graduelle des sanctions à mesure que les étapes de la transition seront franchies», a indiqué le communiqué.
Aussi, ils ont renvoyé à un nouveau sommet, le 3 juillet, toute décision sur les sanctions contre Bamako ainsi que sur la conduite à tenir à l’encontre du Burkina Faso et de la Guinée, deux pays où les militaires ont également pris le pouvoir par la force, selon le communiqué. La Cédéao «exige» de nouveau des juntes burkinabè et guinéenne un calendrier «acceptable» de transition.
Avant ce sommet, la poursuite du dialogue entre la Cédéao et la junte a suscité au Mali un certain espoir dans la levée des sanctions économiques et commerciales infligées le 9 janvier pour stopper le projet des militaires de gouverner cinq années de plus. Les autorités maliennes ont depuis ramené leurs prétentions à 24 mois. Jusqu’alors, la Cédéao a consenti au maximum à 16 mois.
Des sources proches du sommet ont indiqué, samedi, que les dirigeants ouest-africains sont divisés, en particulier sur le Mali, entre les partisans de la fermeté et les adeptes du compromis.
Les sanctions de la Cédéao accentuent la crise économique et sociale au Mali, pays pauvre et enclavé. Elles ont un impact sur les économies de ses voisins et les difficultés de la population malienne trouvent un écho dans les opinions ouest-africaines. Des participants au sommet ont évoqué les durs effets de la crise ukrainienne sur les pays africains.
À la recherche d’un compromis
L’Afrique de l’Ouest a connu quatre coups d’Etat des colonels et lieutenants-colonels en moins de deux ans : putsch le 18 août 2020 à Bamako, nouveau fait accompli parachevant le premier le 24 mai 2021, putsch le 5 septembre 2021 à Conakry, putsch le 24 janvier 2022 à Ouagadougou. En conséquence, la Cédéao multiplie les sommets, les médiations et les pressions pour accélérer le retour des civils à la direction de ces pays.
Au Burkina, autre pays sahélien pris dans la tourmente djihadiste, et en Guinée, les nouveaux gouvernants ont annoncé des périodes de trois ans avant de céder la place. Ils ont invoqué la gravité des crises auxquelles ils sont confrontés et veulent avoir le temps nécessaire à ce qu’ils présentent comme leur entreprise de «refondation» et à l’organisation d’élections crédibles.
Lors d’un précédent sommet le 25 mars, la Cédéao a donné à Ouagadougou et à Conakry jusqu’au 25 avril pour présenter un échéancier «acceptable». A défaut, «des sanctions économiques et financières entreront immédiatement en vigueur», a-t-elle prévenu.
A la demande de la junte, la Cédéao a dépêché fin mai une mission de trois jours pour évaluer la situation au Burkina, où les attaques djihadistes se succèdent. La Cédéao a pris en compte ces réalités samedi. Dans son communiqué, elle a exprimé son «inquiétude» devant les 36 mois de transition prévus, mais aussi «de graves inquiétudes devant la détérioration de la situation humanitaire».
Elle a maintenu la suspension du Burkina de tous ses organes et annoncé nommer un médiateur, comme elle l’a fait au Mali et en Guinée, en la personne de l’ancien président du Niger Mahamadou Issoufou. La Guinée reste également suspendue des organes de la Cédéao. Mais celle-ci a exprimé «ses graves inquiétudes» devant les tensions politiques actuelles, dans un pays où la grogne va grandissant contre la junte.
Elle a exhorté les autorités à établir un cadre de dialogue avec les acteurs politiques et la société civile, à «respecter les droits humains de tous les citoyens guinéens et à se garder de tout agissement arbitraire».