Révision de la Loi sur l’audiovisuel en Algérie : Un secteur en attente de régulation

07/06/2022 mis à jour: 01:20
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Le projet de révision de la loi sur l’audiovisuel a été une nouvelle au menu du Conseil des ministres, réuni dimanche dernier sous la présidence du chef de l’Etat, Abdelmadjid Tebboune.

En chantier depuis plusieurs mois, le texte devra être enrichi davantage pour «la promotion de la pratique médiatique». Selon un communiqué du Conseil des ministres, le président Abdelmadjid Tebboune insiste sur «l’importance du projet de loi relatif à l’activité audiovisuelle et son rôle dans la promotion de la pratique médiatique dans le cadre de la liberté d’expression dans l’intérêt du pays et du citoyen, et ce, en veillant à s’éloigner des méthodes non professionnelles dans la transmission de la réalité et l’orientation vers le professionnalisme».

Abdelmadjid Tebboune, ajoute la même source, met l’accent sur la nécessité de «définir des critères qualitatifs pour promouvoir les performances des médias nationaux et garantir leur conformité aux exigences du professionnalisme, notamment en ce qui concerne le traitement des questions spécialisées ou d’investigation».

Le chef de l’Etat, lit-on dans le même communiqué, ordonne également la «finalisation de l’élaboration du projet de loi cadre relatif à l’information et du projet de loi sur la presse écrite et électronique». Pour rappel, l’Algérie a adopté sa première loi sur l’audiovisuel ouvrant ce champ au privé en 2014. Mais depuis la promulgation du texte, aucune chaîne privée n’a été agréée. Elles sont certes tolérées, mais elles sont toujours de droit étranger. Ce qui freine sérieusement leur développement.

«Ces chaînes, créées au lendemain des événements de 2011 en Tunisie, en Libye et dans d’autres pays arabes, ont été fondées dans un objectif principal de contre-propagande : récupérer une audience algérienne largement captée par Al Jazeera, Al Arabiya et d’autres canaux liés à des appareils idéologiques et diplomatiques de pays du Golfe et de leurs sponsors occidentaux», avait déclaré, dans une interview accordée à El Watan en juin 2021, Redouane Boudjema, professeur à l’université d’Alger.

Ce dernier déplore également l’inertie de l’Autorité de régulation de l’audiovisuel (ARAV), mettant en avant l’opacité dans laquelle évolue ce secteur. «Cinq ans après l’installation de cette instance et bientôt dix années d’existence, ces chaînes de télévision sont toujours de droit étranger. Le citoyen n’a eu droit à aucune information sur leur identité.

Qui les finance ? Quelles sont leurs lignes éditoriales ? A quel cahier des charges obéissent-elles ? Dans la réalité, ces télévisions ne répondent à aucune norme professionnelle ou déontologique. Des chaînes qui font souvent tout et n’importe quoi, sauf le métier de journaliste. Dans l’indifférence manifeste d’une instance de régulation absente», précise-t-il.

Outre cette opacité, la procédure d’élaboration de ce projet de loi est également problématique. Et pour cause, les professionnels du secteur n’ont pas été associés en vue de participer à l’enrichissement de ce texte d’une extrême importance.

Ces derniers aspirent particulièrement à un cadre législatif garantissant, à la fois, un climat sain pour l’évolution de l’activité audiovisuelle et une levée totale des contraintes empêchant les médias audiovisuels d’être à la hauteur des attentes du public algérien.

Cette aspiration est loin de se réaliser, au regard, comme le souligne Driss Chérif, enseignant à l’université d’Alger dans une contribution sous le titre «La régulation très contrôlée du champ médiatique en Algérie», du verrouillage médiatique algérien qui s’est accentué depuis 2019. 

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