Poussée du parti de l’extrême droite aux élections législatives : Le Portugal confronté au risque d’instabilité

12/03/2024 mis à jour: 09:36
AFP
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Andre Ventura, président de Chega, parti d’extrême droite

Au lendemain des législatives qui ont mis fin à huit ans de règne socialiste, les Portugais se retrouvent lundi avec un Parlement où la droite modérée aura du mal à tenir sa promesse de former un gouvernement stable sans s’appuyer sur les populistes qui ont quadruplé leur nombre de sièges. 

La nouvelle poussée du parti d’extrême droite Chega (Assez) annoncée par les sondages s’est confirmée lors du scrutin de dimanche, marqué par le taux de participation le plus élevé en près de 30 ans. La formation antisystème fondée en 2019 par André Ventura est ainsi passée de 12 à 48 députés en doublant son score, à 18% des voix, par rapport aux précédentes élections de janvier 2022.

 Il avait déjà alors été propulsé au rang de troisième force politique du pays, avec 7,2% des voix. Désormais, son président prétend avoir atteint l’objectif de devenir «la pièce maîtresse du système politique». En tout cas, à trois mois des européennes, les électeurs portugais ont confirmé que l’extrême droite progresse à travers le Vieux Continent. L’Alliance démocratique de centre droit (AD) emmenée par Luis Montenegro a pour sa part dû se contenter d’une très courte victoire face au Parti socialiste (PS), qui s’est rangé derrière Pedro Nuno Santos après la démission début novembre du Premier ministre sortant Antonio Costa.
 

«Un pays fracturé» 

Avant l’attribution des quatre mandats des circonscriptions de l’étranger, l’AD a remporté 29,5% des suffrages et 79 sièges sur un total de 230, tandis que le PS a obtenu 28,7% des voix et 77 députés. Ce résultat ne permet donc pas au gagnant de former une majorité d’au moins 116 élus à lui seul, ni même en coalition avec un petit parti libéral arrivé en quatrième position avec 5% des suffrages et huit sièges. Il y a deux ans, Antonio Costa avait remporté une majorité absolue avec un score de 41,4%, mais son gouvernement n’a pas résisté à son implication dans une enquête pour trafic d’influence visant son chef de cabinet. «L’ouragan Chega retourne le pays vers la droite», titrait lundi en Une le quotidien populaire Correio da manha, tandis que le Jornal de Noticias résumait ainsi les résultats de la veille: «une victoire fragile, un pays fracturé». «A partir d’ici, les forces démocratiques sont tenues de voir la victoire de Chega comme une défaite qui leur appartient», commentait le journal de référence Publico dans son éditorial. S’exprimant au bout d’une longue soirée électorale, le chef de l’Alliance démocratique Luis Montenegro a revendiqué une victoire «incontournable» et dit vouloir gouverner avec une «majorité relative».

 «Gouvernement instable» 

En bref, il compte sur la «responsabilité» des socialistes auxquels il a demandé de ne pas voter une éventuelle motion de censure aux côtés de Chega pour faire tomber son futur gouvernement. Au Portugal, l’exécutif n’a pas besoin d’un vote au Parlement pour entrer en fonctions. Le nouveau patron des socialistes Pedro Nuno Santos a ainsi accepté sa défaite et aussitôt endossé le rôle de chef de l’opposition. Il a toutefois prévenu qu’il ne se sentait pas obligé de laisser passer le prochain budget de l’Etat en s’abstenant. Cette échéance sera l’épreuve du feu d’une faible majorité de centre droit, prise en tenaille entre la gauche et l’extrême droite. «Le risque principal est lié à une impasse parlementaire et à un gouvernement instable» qui pourrait être confronté à «d’importants obstacles», a commenté l’agence de notation financière canadienne DBRS dans une note d’analyse.

 Dans ce contexte, le président de la République, le conservateur Marcelo Rebelo de Sousa, sera sans doute appelé à intervenir davantage, puisque la constitution portugaise lui attribue un rôle d’arbitre en cas de crise ou d’impasse. Mais, quoi qu’il arrive, le Parlement ne peut pas être à nouveau dissous dans les six mois suivant son élection. 

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