Trétoir M’Kassar, une performance poétique mêlée à la projection d’un diaporama, a été présentée, jeudi à Alger, par le professeur et plasticien et poète, Denis Martinez, mettant en valeur l’amitié et la résilience des artistes, face à l’adversité de la vie.
Accueillie à la Villa Dar Abdelatif dans le cadre de l’installation, Actes de vie, une rétrospective sur le parcours artistique singulier de Denis Martinez, Trétoir M’Kassar met en valeur des moments d’existence que le plasticien a partagés à Blida avec le poète Mahfoud El Ayachi et le chanteur de musique diwane, Mâalem Mohamed Bahaz.
Racontant en une dizaine de minutes l’adversité de la vie, les expériences partagées avec les deux artistes sont restituées par Denis Martinez dans un élan prosodique d’une grande créativité et une prose au lyrisme illustré par des photographies du poète et du chanteur, mêlées dans des toiles aux traits symboliques, empreintes de génie, diffusées par le diaporama.
Au début de la performance, le montage des diapositives ne présente pas de lien immédiat avec le texte poétique déclamé, mais que cette relation entre le visuel et l’oralité s’établit au fur et à mesure de son déroulement. Dans ses travaux, Denis Martinez aime donner de la vitalité et un statut d’«élément dramaturgique» aux personnages et aux lieux animant -dans la réalité même- le déroulé des tranches de vie qu’il veut restituer dans ses performances.
C’est ainsi qu’il a imprégné la déclamation du texte, Trétoir M’Kassar de sa voix aux intonations, entre autres, «moqueuses» ou «dubitatives» par moments, ondulant avec son vibrato de ténor, entre tonalités graves et aiguës ou usant d’onomatopées et d’exclamations émises dans le parler populaire local, à l’instar des «Eh heeh, yeh heheheeeh !...», ou encore des «Paap papapapa !» Trétoir M’Kassar est mon nom de passage, Vacarme ligoté, inaccessible aux oreilles aveugles, Submergé de rumeurs stériles, La raison qui traverse l’errance parle d’hier, sont autant d’expressions exprimant différentes formes d’adversité auxquelles l’artiste a toujours fait face, s’arrangeant toujours à faire triompher la vie par la culture. «Dire par une expression artistique libre, pleine et dynamique toutes les préoccupations de l’artiste», a expliqué Denis Martinez, entouré de ses amis et collègues dont Karim Sergoua.
D’autres anecdotes, vécues en équipe, ont été relatées par Denis Martinez lors du débat qui a suivi la performance, comme celle de La fresque du village Maamoura ou encore celle du voyage en voiture à Mostaganem, dont avaient pris part avec lui Noureddine Saadi, Arezki Metref et Arezki Larbi et qui avait donné naissance au poème, Djedouel Bendir Misiria.
Dans ce texte descriptif de tous ces lieux au climat aride du Pays de Cheikh Hamada, Denis Martinez a réussi à transmettre la teneur de cette situation vécue, à travers sa manière de chantonner son texte à la manière bédouie, qu’il ornait par moments des, Vani vane vani qui laissaient suggérer la flûte qui accompagnait le Cheikh, dans ce genre de chant patrimonial. «Denis Martinez est une excellente idée qui traverse la temps !», a tenu à faire remarquer un adepte de son art, présent à la performance. Au lendemain du recouvrement de l’indépendance de l’Algérie, Denis Martinez enseigne à l’Ecole supérieure des beaux-arts d’Alger et initie, parallèlement, des actions expérimentales avec ses étudiants, avant d’animer en 1967, avec des artistes algériens de son époque le mouvement artistique Aouchem.
Installé à Marseille (France) dans les années 1990, Denis Martinez fait son retour en Algérie au début de l’an 2000 et participe à des expositions, événements et autres actions artistiques et culturelles. Inaugurée le 13 mai, l’installation «Actes de vie», organisée par l’Agence algérienne pour le rayonnement culturel (Aarc), restitue l’œuvre de Denis Martinez sur plus de 50 ans, sculptures, peintures, et poèmes habillent l’espace de la Villa Dar Abdeltif jusqu’à la fin du mois en cours, en plus d’un programme artistique qui prévoit encore des performances musicales et des tables rondes.