L’euro a plongé sous le seuil de 0,99 dollar lundi pour la première fois depuis fin 2002, la monnaie européenne pâtissant des craintes pour l’économie européenne après l’annonce vendredi de l’arrêt complet du gazoduc Nord Stream 1 par le russe Gazprom.
L’euro reculait de 0,45% à 0,9909 dollar lundi vers 9h00 GMT, après avoir chuté jusqu’à 0,9878 dollar, son plus bas depuis décembre 2002, année de sa mise en circulation. Depuis le début de l’année, la monnaie européenne a perdu 13% face au dollar. Les pays du G7 ont visé vendredi la manne énergétique de la Russie en convenant de plafonner le prix de son pétrole, provoquant une réaction de Moscou qui a fait trembler les Européens en annonçant que le gazoduc Nord Stream 1, vital pour l’approvisionnement énergétique en Europe, serait totalement arrêté jusqu’à la réparation d’une turbine.
L’arrêt est jugé, d’un point de vue technique, injustifié par le fabricant de turbines Siemens Energy. «Quand le président russe Vladimir Poutine a reconnu les régions séparatistes d’Ukraine de l’Est et a envoyé des troupes de ‘‘maintien de la paix’’ fin février, l’euro-dollar était passé sous 1,15 dollar», et «à chaque escalade du conflit, armé ou énergétique, l’euro a cédé un peu plus de terrain», rappelle Kit Juckes, analyste chez Société Générale. Le bond des prix du gaz et le manque d’énergie qui se profile cet hiver minent le budget des consommateurs comme celui des entreprises et menacent de plonger la zone euro en récession.
Après avoir frôlé le 26 août son record historique de 345 euros le mégawattheure, établi en mars au début de la guerre en Ukraine, le contrat à terme du TTF néerlandais, référence du marché du gaz naturel en Europe, avait plongé la semaine passée. Il repartait en hausse de plus de 30% hier matin. Dans ce contexte, la perspective d’un resserrement marqué de la politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE) lors de sa réunion jeudi ne suffisait pas à renforcer l’euro.
Répit peu probable
A l’inverse, le dollar continue de profiter de son statut de valeur refuge, qui «compense largement un rapport sur l’emploi un peu moins enthousiasmant que prévu vendredi», commente Lee Hardman, analyste chez MUFG. Difficile de prédire jusqu’où le déclin de l’euro pourrait le conduire, alors que la devise reste pour l’instant loin de son plus bas historique à 0,8230 dollar en octobre 2000. «Une partie des mauvaises nouvelles sont déjà inclues dans le cours, mais cela peut tout juste limiter la baisse ; la direction du mouvement reste vers le bas», avertit M. Juckes.
La livre sterling flanchait également, le Royaume-Uni étant particulièrement vulnérable aux fluctuations des prix du gaz, énergie dont le pays dépend.
La monnaie britannique baissait de 0,17% à 1,1490 dollar après être descendu à 1,1444 dollar, un nouveau plus bas depuis le confinement de mars 2020 et le choc du début de la pandémie. Le pays attend lundi l’annonce de celui ou celle qui succédera à Boris Johnson à Downing Street, en pleine crise du coût de la vie au Royaume-Uni, où la flambée des prix de l’énergie menace de plonger deux tiers des ménages britanniques dans la précarité.
La favorite, la très thatchérienne Liz Truss, s’est jusqu’alors refusée à promettre des aides directes aux ménages, les qualifiant de «pansements», mais les informations de presse semblent indiquer qu’elle serait désormais en faveur d’un gel des plafonds tarifaires de l’énergie. «Les marchés vont scruter toutes les propositions sur les impôts et la dépense, des aides aux ménages et aux entreprises sont cruciales pour redorer l’attractivité des investissements au Royaume-Uni», commentent les analystes de Sucden. Si la livre britannique passe sous le seuil de 1,1412 dollar, elle évoluera à son plus bas depuis 1985.