Les fortunes thésaurisées sont la cible de l’état : L’informel, puissant et exploiteur

22/01/2023 mis à jour: 02:46
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Dans un de ses derniers rapports, la Banque mondiale a estimé à environ 30% la part de l’informel dans l’économie algérienne entre 2010 et 2020. Par rapport aux 145,2 milliards de dollars du produit intérieur brut (PIB) de l’année 2020, les revenus générés par les pratiques économiques et commerciales informelles  avaient atteint pas moins de 43,6 milliards de dollars en 2020. Depuis toujours, les autorités ont cherché à capter cet argent mais ont divergé sur les méthodes. Une des mesures préconisée a été l’amnistie fiscale, dont le but est d’encourager les acteurs de l’informel à revenir dans la légalité, à bancariser leurs ressources circulant dans le marché informel, les injecter dans le secteur productif. Un plan d’amnistie fiscale a même été élaboré au temps de l’ancien régime, mais sans suite. Le souci, à ce moment-là, était de trouver une alternative à la chute des rentrées financières suite à l’effondrement des prix du pétrole. Les adversaires de cette formule plaidèrent plutôt pour une réforme fiscale et un assainissement fiscal qui permettraient de capter l’argent du marché noir. Il ne s’agit pas de s’attaquer aux petits vendeurs à la sauvette, mais aux barons de l’import et gros monopoles des marchés de la distribution des biens de consommation de toutes sortes. Le chef de l’Etat aurait jugé que désormais rien ne s’oppose à ce que ces derniers restent dans les circuits du marché noir du fait que les reformes ont été faites, notamment de la fiscalité et de l’investissement.  Le sociologue et journaliste Nordine Grim (Algérie-Eco) explique : «Ce sont les transactions informelles, le trafic de drogues et les prébendes qui s’opèrent en marge du commerce légal qui ont permis à des personnes sans scrupules de faire rapidement fortune, mais la moralité du constat est différemment interprétée, selon qu’on appartient à une frange de la société ou à une autre. Les uns voueront de l’admiration pour les acteurs de l’informel partis de rien mais qui sont parvenus à se faire rapidement une place au soleil, les autres leur reprocheront de s’être enrichis de manière illicite, en faisant fi des lois en vigueur. Entre ces deux mondes que tout oppose, le clivage a toujours existé mais il tend à s’exaspérer au fil des années, au gré de l’expansion du marché informel auquel l’Etat semble accorder une troublante liberté d’action. N’ayant rencontrés aucune résistante sérieuse de la part de la justice et des organes légaux de répression, ces nouveaux riches ont même gagné en respectabilité, notamment auprès des jeunes qui souvent les prennent pour références, comme exemples à suivre.» Sur la problématique plus générale de l’informel en Algérie, diverses études du CNES ont tenté de cerner les causes et de proposer des solutions. Il est expliqué qu’historiquement, il est né à «la faveur de l’ouverture de l’économie nationale sur l’extérieur, le secteur privé ayant pris un essor remarquable dans l’économie du fait du démantèlement des monopoles publics, et grâce à l’accès libre à la devise, à l’assouplissement des formalités douanières, à la liberté d’importation, etc. Le nombre d’entreprises privées de type est impressionnant. Pour le seul secteur du commerce extérieur, il est relevé nombre de sociétés privées de commerce de gros...» Un aspect dramatique mérite l’attention de la puissance publique ; il a trait à la pratique du marchandage de main-d’œuvre. Dans certaines régions du Sud, cela s’apparente à un véritable marchandage. Fonctionnant en réseaux, imposant, dans des zones dites de non-droit, leur «droit de cité», exploitant en déni du droit social, les travailleurs au noir, ce secteur prédateur s’est constitué, dans certaines filières et certains espaces, en «oligarchies» économiques, financières et politiques, souvent liées au terrorisme, à la mafia et au banditisme international. Le CNES juge que c’est ce dernier type qui doit focaliser l’intérêt, au sens où s’inscrivant hors des cadres juridico-réglementaire, c’est-à-dire illégal, et des valeurs sociétales, il porte les germes de déformations sociales, menace la production nationale structurée existante et projetée, dévalorise la notion travail et tend à s’imposer comme partenaire invisible et nuisible dans la vie politique et économique. Le grand danger est à ce niveau.  A. B.

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