L'économiste et homme politique Georges Corm n’est plus : «L’Algérie est devenue ma seconde patrie»

20/08/2024 mis à jour: 02:43
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Photo : D. R.

L’historien, économiste et homme politique libanais Georges Corm est décédé le 14 août, à Beyrouth, à l’âge de 84 ans.

L’auteur de l’ouvrage de référence Le Proche-Orient éclaté, 1956-2012, Georges Corm est une personnalité connue et reconnue dans son pays et à l’international. Ce grand spécialité des questions financières aidait à comprendre la situation économique de son pays et celle du monde.

S’il a marqué l’histoire politique de son pays le Liban, il n’en demeure pas moins qu’il avait un rapport particulier avec l’Algérie. Il se sentait, d’ailleurs, profondément Algérien. Bien avant d’être recruté en qualité de consultant en Algérie dans les années 80, il était subjugué par la révolution algérienne.

En 1973, Georges Corm quitte le Crédit lyonnais de Paris pour devenir le représentant de la Banque national d’Algérie pour le Moyen-Orient, basée à Beyrouth. Par la suite, il a travaillé en Algérie pour le compte de la Banque d’Algérie, et ce, de 1989 à 1992.

La plupart des spécialistes algériens en économie reconnaisse que Georges Corm a apporté non seulement son expertise technique mais aussi ses réseaux. Ses connaissances des institutions internationales l’ont beaucoup aidé dans ses différentes missions vers l’international.

Mieux encore, à l’orée des années 1990, il a participé au reprofilage de la dette algérienne et à l’élaboration de la première loi sur la monnaie et le crédit en Algérie après les réformes économiques de 1988. Il se plaisait à répéter souvent à son entourage que l’Algérie l’avait littéralement transformé.

Il entretenait, d’ailleurs, des liens d’amitié très forts avec certains de ses comparses algériens. A la question de savoir quelle était son expérience dans le domaine économique sur les questions de développement, il avait rétorqué dans un grand journal français : «J’ai occupé diverses fonctions dans le domaine économique et financier au Liban et en Algérie.

J’ai été consultant de nombreuses organisations internationales, dont la Banque mondiale et l’Union européenne, ou certaines organisations spécialisées des Nations unies. Ceci m’a amené à développer des connaissances de terrain dans un grand nombre de pays, ce qui a été très enrichissant pour moi. De plus, la relation privilégiée établie avec l’Algérie m’a considérablement enrichi.

Ce pays est devenu ma seconde patrie. Une des conclusions de mon expérience en économie est que la rente produite par des matières premières, notamment l’énergie, se transforme presque inéluctablement en handicap. Je pense que pour acquérir des technologies, il faut que la société en ressente le besoin. Or, dans une société rentière, cela ne peut pas être le cas.»

Georges Corm est né en 1940 à Alexandrie en Egypte. L’historien libanais est issu d'une famille d'artistes, hommes de lettres et peintres. Il fréquente l'Institut d'études politiques de Paris de 1958 à 1961 où il obtient un doctorat en droit public en 1969 de la Faculté de droit et de sciences économiques de Paris.

Auteur prolifique

En 1962, il intègre la fonction au Liban. Il est alors, successivement, économiste au ministère du Plan, puis expert en questions monétaires et financières au Commissariat du gouvernement auprès de la Banque centrale.

Il poursuit en même temps à partir de Beyrouth ses études de droit (diplôme d'études supérieures et doctorat). En 1969, il quitte l'Administration libanaise pour intégrer le secteur bancaire (Crédit lyonnais). En 1970 il est transféré à Paris où il restera jusqu'en 1973.

Au cours de cette année, il regagne Beyrouth où il est nommé représentant général de la Banque nationale d'Algérie pour le Moyen-Orient, ce qui lui fait connaître les élites du FLN qui ont forgé l'indépendance de ce pays.

En 1980, il quitte ce poste pour devenir Conseiller du Gouverneur de la Banque centrale libanaise. Un poste qu'il occupera jusqu'en 1985, année où il quitte le Liban en proie aux violences pour s'installer à Paris comme consultant économique auprès de nombreux organismes internationaux.

Retour au Liban en 1998, pour une nomination en qualité de ministre des Finances. Fonction qu’il occupera jusqu’à son décès. En sa qualité de grand expert, il a enseigné de 1969 à 1985 dans plusieurs universités libanaises et depuis 2001, il était professeur à l'université Saint-Joseph de Beyrouth. Il était, aussi, membre du comité de parrainage du Tribunal Russell sur la Palestine.

Auteur prolifique, Georges Crom a publié de nombreux ouvrages, dont La Découverte, Le Proche-Orient éclaté (1983), Géopolitique du conflit libanais (1986), L'Europe et l'Orient (1989 ; 2002 ; 2005) et Le nouveau désordre économique mondial (1993), Orient-Occident, la fracture imaginaire (2002 ; 2005), Le Liban contemporain (2003 ; 2005), La Question religieuse au XXIe siècle (2006 ; Poche 2007) ou encore Histoire du Moyen-Orient, Poche 2007. 
 

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