Le procès du député Ardjoune s’ouvre aujourd’hui : Les parlementaires réclament la libération de leur collègue

20/06/2022 mis à jour: 00:04
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Photo : D. R.

A la veille du procès du député, qui passe aujourd’hui devant le tribunal, les parlementaires dénoncent la détention provisoire de leur collègue et réclament sa libération et l’application des dispositions contenues dans la Constitution. Le bureau de l’Assemblée s’est réuni il y a quelques jours et a décidé de saisir par courrier le ministre de la Justice afin de lui demander de procéder à la libération du député pour être jugé par ses pairs.

Grogne à l’Assemblée populaire nationale (APN). La mise sous mandat de dépôt du député Abdenacer Ardjoune du Front de libération nationale (FLN) de la wilaya d’El Meghaïr, première du genre dans les annales du Parlement, suscite la colère des locataires de l’hémicycle Zighoud Youcef. A la veille du procès du député, qui passe aujourd’hui devant le tribunal, les parlementaires dénoncent la détention provisoire de leur collègue et réclament sa libération et l’application des dispositions contenues dans la Constitution.

Ainsi, le bureau de l’Assemblée s’est réuni il y a quelques jours et a décidé de saisir par courrier le ministre de la Justice afin de lui demander de procéder à la libération du député pour être jugé par ses pairs. «Il est inconcevable de jeter en prison un député qui jouit d’une immunité parlementaire. La procédure aurait voulu que le bureau de l’APN soit saisi du dossier et que les parlementaires décident du sort du mis en cause.

La justice ne peut intervenir qu’une fois le député déchu de son immunité parlementaire. Le traitement dont a fait l’objet le député d’El M’ghaïr est biaisé», tranche Mohamed Aziz, président de la commission juridique de l’APN, persuadé que la Constitution du 1er novembre 2020 n’a jamais fait allusion à l’emprisonnement d’un député. Pourtant, d’aucuns estiment que la Constitution ne couvre que les activités en lien avec le mandat du député et donc le membre du Parlement jouit de l’immunité pour seulement «les actes rattachés à l’exercice de sa fonction». Cet avis n’est pas partagé par les députés, notamment M. Aziz, qui nous invite à lire «entre les lignes» les articles 131 et 130 de la Loi fondamentale.

Demandes de levée de l’immunité parlementaire

Aussi, l’article 131 stipule «qu’en cas de flagrant délit ou de crime flagrant, il peut être procédé à l’arrestation du député ou du membre du Conseil de la nation» et «le bureau de l’Assemblée populaire nationale ou du Conseil de la nation, selon le cas, en est immédiatement informé». Et celui-ci peut demander la suspension des poursuites et la mise en liberté du député ou du membre du Conseil de la nation.

L’article 130 dispose que l’élu peut faire l’objet de poursuites judiciaires pour les actes ne se rattachant pas à l’exercice de ses fonctions parlementaires après renonciation express de l’intéressé à son immunité.

Et en cas de non-renonciation, les autorités de saisine peuvent saisir la Cour constitutionnelle aux fins de se prononcer, par décision, sur la possibilité ou pas de la levée de l’immunité. «Ces articles démontrent que le député ne peut être jugé qu’une fois la procédure de levée de l’immunité engagée par le Parlement ou que le député renonce à son immunité. Or, ce n’est pas ce qui s’est passé pour le cas de M. Ardjoune», précise M. Aziz.

Le député a été mis en examen et écroué il y a une semaine pour avoir tenté de faire parvenir, par le biais d’un chef de la brigade de la gendarmerie, une enveloppe contenant des réponses à l’épreuve de mathématiques à sa fille candidate au BEM.

Le chef du centre d’examen de la commune de Still, dans la wilaya d’El M’ghaïr, a dénoncé, auprès de la gendarmerie, le député. Suite à quoi, le procureur de la République a ouvert une enquête et les résultats de l’investigation ont mené à l’arrestation du député, du chef par intérim de la brigade de la gendarmerie et de quatre personnes soupçonnées d’être impliquées dans cette tentative de fraude.

Présentés devant le procureur de la République, le député et le chef de la brigade de la gendarmerie ont été placés sous mandat de dépôt et les deux autres personnes sous contrôle judiciaire pour les chefs d’inculpation de «fuite des réponses et des sujets d’examen du BEM via un groupe de personnes», «mauvaise utilisation de la fonction» et «incitation des fonctionnaires au trafic d’influence».

Un cas de figure que la loi n°20-06 du 28 avril 2020 modifiant et complétant l’ordonnance n°66-156 du 8 juin 1966 portant code pénal prévoit. Au chapitre 9, lié à l’atteinte à l’intégrité des examens et concours et dans son article 253 bis 6, cette loi dispose, en effet, qu’il est passible de «l’emprisonnement d’un à trois ans et d’une amende de 100 000 DA à 300 000 DA, quiconque diffuse ou divulgue, avant ou pendant les examens ou les concours, les questions et/ou corrigés des sujets d’examens finaux d’enseignements primaire, moyen ou secondaire ou des concours de l’enseignement supérieur ou de la formation et de l’enseignement professionnels ainsi que des concours professionnels nationaux».

Le cas de ce député du parti du FLN intervient au moment où le Parlement a reçu, de la part du ministère de la Justice, des demandes de levée d’immunité à nombre de parlementaires. Des demandes à l’étude actuellement au niveau de la Cour constitutionnelle. 

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