Plus de 200 000 spectateurs sont attendus à partir de vendredi au carnaval de Nice, dans le sud de la France, l’un des trois plus grands au monde, qui renoue pour ses 150 ans avec sa démesure d’avant Covid tout en adressant un clin d’œil à son frère jumeau de Rio. Moteur de l’économie sur la Côte d’Azur, ce rendez-vous festif au rayonnement international, né en 1873, génère 30 millions d’euros de retombées et 1800 emplois directs. Après l’annulation de 2021 et les jauges réduites de l’an passé imposées par la pandémie, le public retrouvera du 10 au 26 février ses célèbres grosses têtes et ses chars sur lesquels seront lancées quelque 20 tonnes de confettis et de mimosa. «On est un peu stressé mais on n’est pas en retard» : Jean-Pierre Povigna, 17 ans, appartient à la cinquième génération de l’une des quatre familles niçoises de «carnavaliers» à qui revient «l’honneur et le privilège» de construire les chars. Dans un immense hangar du quartier populaire de Saint-Roch, dans le centre de la ville, le jeune homme qui termine une formation d’électricien, s’active «depuis des mois, de 6h à 20h les derniers jours», pour achever les deux chars les plus prisés du public, ceux du roi et de la reine du carnaval. Pour apprendre les ficelles d’un métier «qui se transmet d’une génération à l’autre», Jean-Pierre peut compter sur son grand-père dont il est «fier de porter le même prénom». «Le premier carnaval dont je me souvienne c’est celui de 1954, qui a débuté sous la neige», confie le grand-père, «bientôt 80 ans», grand sourire dans son bleu de travail et qui couve du regard le plus jeune de ses cinq petits-enfants. «Chaque année, on est impatient de voir le visage des spectateurs pour savoir si on a réussi notre coup», ajoute le patriarche qui a vu son métier bien évoluer. Depuis trois ans en effet, les grosses têtes en polystyrène ne sont plus sculptées à la main mais grâce à un robot programmé par ordinateur. «On gagne beaucoup de temps : il ne faut plus que trois jours, au lieu de 15, pour sculpter une tête», explique Vincent Povigna, 21 ans, autre membre de la famille. Quant aux chars, les personnages géants articulés qu’ils transportent sont aussi programmés et commandés par ordinateur tout comme les dizaines de projecteurs installés à bord. Encore propulsés pour la plupart par des moteurs thermiques, «les chars évoluent aussi, deux étant dotés cette année de moteur électrique», souligne de son côté Jean-Marc Mathé, 64 ans, ancien sapeur-pompier de Nice à la retraite et qui a «l’honneur» de piloter le char de la reine «depuis 25 ans». Avec un taux de remplissage des tribunes qui atteignait 95% à une semaine du coup d’envoi, l’édition 2023 du carnaval niçois, l’un des l’un des trois plus importants au monde avec ceux de Rio de Janeiro et de Venise, pourrait attirer plus de 200 000 spectateurs, selon la mairie. A noter que l’entrée en tribune est payante (à partir de 28 euros par adulte pour un +corso illuminé+) sauf pour les carnavaliers «entièrement déguisés». Sur le thème des Trésors du monde avec un roi qui trône entre le Taj Mahal, la Tour de Pise et la statue de la Liberté, le carnaval a pour invité d’honneur la ville de Rio, jumelée avec la cité natale de Garibaldi (1807-1882), héros de l’indépendance des peuples, notamment au Brésil. Un char a été dessiné spécialement par deux «carnavalescos» cariocas, Gabriel Haddad et Leonardo Barra, et la Villa Masséna - sur la célèbre promenade des Anglais - accueille durant un mois une exposition de costumes des grandes écoles de samba. Autre point fort de la fête, le «Queernaval» programmé le 17 février, premier carnaval gay en France, lancé en 2015 et qui fait son retour cette année.