Il est largement dominé par les élites occidentales : Les non-dits du Forum de Davos

19/01/2023 mis à jour: 09:10
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Y sont minoritaires les pays émergents, davantage les plus pauvres du Tiers-monde, bien que quelques nations aient tenu à faire entendre leur voix. Ce forum des affaires est aussi de la politique, toutes sont étroitement liées. Il intervient dans le contexte particulier de la guerre entre la Russie et l’Ukraine. Mobilisées dès le début du conflit contre Moscou, les capitales occidentales mettront à profit ce rendez-vous international des grands lobbys pour tenter de «convaincre» de ne pas adopter de position de neutralité, encore moins d’une attitude de «connivence» avec la Russie. C’est avec subtilité qu' ils feront ce travail, en mélangeant savamment l'économie et la politique. Bien entendu seront relativisés les dégâts incommensurables causés par cette guerre ou, plus encore, seront imputés essentiellement aux seules forces russes les pertes humaines tant du côté ukrainien que russe. Seront passés en pertes et profits tout un pays rasé et des centaines de millions de citoyens dans le monde contraints de payer chèrement, quant ils sont disponibles, les biens alimentaires de base en raison des sanctions décrétées par les parties belligérantes.

L'élargissement de la faim dans le monde ne sera pas évoquée, comme l’enrichissement scandaleux des marchands de canon et des grandes compagnies pétrolières. Le plus grand gagnant de cette guerre insensée c’est le complexe militaro-industriel américain avec l’assentiment des capitales européennes piégées par leur discours guerrier à outrance, relayé par leur immense système d’information. Celui-ci a été plus à l'écoute de la surenchère anti-russe que des voix de la raison et de la paix plaidant pour des négociations, sans gagnant ni vainqueur. Cela ressemble étrangement à la guerrre du Proche-Orient du début des années 1990, lorsque la grande machine politico-militaro-médiatique mondiale s’est retournée contre l’Irak une fois que le général Powell a exhibé à l’onu des bouteilles factices contenant, selon eux, des produits chimiques preuve de l’existence d’armes chimiques. 

Cela suffisait pour que le président Bush et le Britannique Tony Blair développant de l'hystérie guerrière étouffant la voix raisonnable de Dominique de Villepin. Le résultat ne s’est pas fait attendre : l’Irak s’effondre entraînant la Syrie et même la Libye dont Sarkozy a vu en El Gueddafi le visage de Saddam Hussein. Et puis est apparu le monstre de Daech qui, avant de frapper l’Occident, décima les rangs des populations arabes puis africaines en attaquant le Sahel africain et asiatique, en replongeant l’Afghanistan dans les ténèbres à travers son idéologie qui muselle les femmes et les voix libres. C’est dire que, sans excuser la Russie pour son invasion désastreuse d’un Etat indépendant, la guerre dans laquelle elle s’est lancée à pour origine la volonté insensée de l’Ukraine d'adhérer à l’OTAN et, secondairement, l’Union européenne. Moscou avait pourtant longtemps averti qu’elle ne tolérerait jamais à ses frontières un Etat membre de l'Otan. 

A Davos donc, on taira cela, on ne dira pas tout ça pour ça ! Et on relativisera l’entrée du monde en récession prolongée affectant les populations les plus fragiles dans l’ensemble des pays du fait des effets de l’inflation et des pénuries de biens, alors même que les retombées du Covid-19 ne se sont pas estompées. 

Seule la Chine et accessoirement l’Inde ont des chances de s'en sortir économiquement du fait de leur solidité structurelle, mais sur la scène internationale, se remet de nouveau en question l’ordre mondial hérité de la Seconde Guerre mondiale. Il a consacré l'apogée des pays occidentaux, à leur tête les Etats-Unis et imposé le libéralisme économique à l’ensemble de la planète avec le dollar comme monnaie de référence. La Chine a porté un rude coup à la domination occidentale mais, à défaut de l'éliminer, a réussi à la confiner. Sur le conflit entre la Russie et l’Ukraine, un grand nombre de pays du Tiers-monde ont privilégié une position de neutralité dans cette guerre relevant à juste titre que la confrontation actuelle entre les Usa et la Russie, si elle perdure, pourrait emporter l’ensemble des Etats du monde. Ils estiment que le monde qui a trop souffert de la bipolarité et de la confrontation des blocs a besoin, plus que jamais, d’un nouvel ordre mondial, basé sur le multilatéralisme et le respect des différences idéologiques et culturelles. Un nouvel ordre qui devrait prioritairement revoir le mode de fonctionnement des Nations unies, dont l’existence d'un droit de veto dévolu à cinq grandes nations est dépassé par le temps et les événements. Depuis 1947, le droit de veto n’a pu mettre un terme à de terribles guerres, les laissant parfois se dérouler, voire même les acceptant telle la colonisation sauvage de la Palestine par Israël et celle de l'Algérie par la France, soutenue par l’OTAN . Les méfaits de l’apartheid en Afrique du Sud ont été couverts par les capitales ainsi que le dépeçage des Balkans et, depuis peu, les agressions au Proche-Orient (l’Irak, la Libye, la Syrie…) et l’occupation du Sahara occidental par le Maroc. L’Onu a continué à fonctionner avec la philosophie d’antan et quasiment les mêmes structures, mais l’Assemblée générale a évolué sous le poids des pays ne partageant pas les mêmes intérêts que les grandes puissances. Devenus prépondérants, les Etats du Tiers-monde réclament une égalité internationale et une meilleure défense de leurs droits. Un son de cloche que l'on ne risque pas d’entendre à Davos . 

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