GNL, pénurie de diesel : En 2023, le marché de l’énergie toujours plus tendu

15/01/2023 mis à jour: 04:01
AFP
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Les conséquences de l’invasion russe de l’Ukraine ont enfermé les utilisateurs d’énergie dans un long tunnel - sans la moindre lueur au bout. Les sanctions occidentales et les ruptures de fourniture de la part de la Russie ont mis sous pression le système commercial mondial du gaz et du pétrole. 

Il était déjà fortement tendu en raison du rebond de la demande après la pandémie et de plusieurs années de faibles investissements dans de nouveaux sites de production.

D’autres clients pour la Russie 

En théorie, l’année 2023 devrait enregistrer une légère amélioration. La Russie va trouver d’autres clients pour son gaz et son pétrole dont l’Occident ne veut plus. L’Europe semble avoir stocké assez de gaz pour passer l’hiver sans trop de problèmes; pour l’hiver suivant, elle devrait disposer de nouveaux terminaux permettant de recevoir du gaz naturel liquéfié (GNL), la rendant ainsi moins dépendante du fuel venant de Russie par pipeline. Il est pourtant plus que probable que les marchés de l’énergie vont à nouveau flamber. Les ralentissements économiques réduiront la demande de pétrole, mais les problèmes d’approvisionnement pourraient déséquilibrer ce marché - premier danger. En décembre, lorsque l’Europe aura mis en place son boycott du brut russe transporté par bateau, l’Inde et la Chine en achèteront encore plus qu’en 2022, ce qui contribuera à maintenir les barils russes sur le marché.

D’autres goulots d’étranglement

Mais, alors que les fortes importations européennes seront redirigées vers l’Asie, d’autres goulots d’étranglement apparaîtront. Les Etats-Unis pourraient hésiter à piocher dans leur réserve stratégique de pétrole, qui a significativement baissé après avoir été mise à contribution pendant les mois consécutifs à l’invasion. Il est peu probable que certains pays exportateurs comme la Libye puissent continuer à produire longtemps encore à pleine capacité; les pays de l’Opep échouent déjà à atteindre leurs objectifs de production. Le cartel pourrait aussi annoncer des réductions importantes de sa production afin de maintenir les prix à un niveau élevé.

La deuxième préoccupation est la pénurie croissante de produits pétroliers raffinés comme l’essence ou le diesel. En février 2023, l’Europe prévoit d’interdire l’importation depuis la Russie de ce type de produits, dont la plus grande partie, cette fois, ne pourra être exportée ailleurs : la Chine et l’Inde, qui ont de grosses capacités de raffinage, ne sont pas intéressées, et les autres acheteurs potentiels sont trop éloignés géographiquement.

L’Europe, de son côté, s’efforce de produire des quantités raisonnables de ces produits, car un gaz naturel cher signifie qu’elle ne peut pas produire beaucoup d’hydrogène, composant essentiel dans la production du diesel. En principe, la Chine pourrait exporter une plus grande quantité de produits pétroliers, ce qui lui permettrait, soit dit en passant, de fourguer le pétrole russe qu’elle va bientôt raffiner en énormes quantités. Mais ses réserves pourraient se vider si l’hiver est froid, et Pékin réduirait ses exportations. Une pénurie mondiale de diesel pourrait donc survenir avant mars 2023.

Mais le plus gros danger vient du gaz

La Russie intensifiera ses manœuvres pour alimenter l’inflation en Europe et maintenir le continent dans le noir. Personne ne s’attend à ce que Moscou reprenne ses livraisons via Nord Stream, son principal pipeline vers l’Europe, qui a de toute façon été sévèrement endommagé à la suite d’un sabotage en septembre. Mais le Kremlin pourrait interrompre les livraisons de gaz qu’il continue à effectuer vers l’Europe grâce à d’autres pipelines comme celui qui traverse l’Ukraine, et cesser de livrer du GNL au Vieux Continent. Simultanément, l’UE pourrait renforcer les mesures visant à plafonner le prix des hydrocarbures russes et rendre plus difficile l’achat du gaz de son ennemi par d’autres pays. Les prochains mois mettront à l’épreuve la détermination de l’Occident. Mais il ne doit guère espérer de trêve dans ses guerres énergétiques avec la Russie une fois que l’hiver sera passé.

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