Cinq mois après avoir plaidé non-coupable d’avoir tenté d’inverser illégalement les résultats de l’élection de 2020, Donald Trump est arrivé hier à la cour d’appel de Washington saisie de sa demande d’immunité pénale en tant qu’ex-Président, rapporte l’AFP.
Le grand favori des primaires républicaines pour l’élection présidentielle de novembre cherche notamment avec cette audience à reporter ses divers procès au pénal le plus tard possible, en tout cas après le scrutin. Cette audience devant la justice intervient alors que la campagne électorale est pleinement lancée, à moins d’une semaine du début des primaires républicaines, lundi dans l’Iowa.
La juge Tanya Chutkan, qui présidera les débats à son procès fédéral pour ses tentatives présumées illicites d’inverser le résultat de l’élection de 2020, a rejeté le 1er décembre sa requête en immunité, considérant qu’aucun texte ne protégeait un ex-Président contre des poursuites pénales.
Les avocats de Donald Trump affirment qu’il jouit d’une «immunité absolue» pour ses actes alors qu’il était à la Maison-Blanche. Ils invoquent une jurisprudence de la Cour suprême des années 1980 concernant des poursuites civiles contre l’ex-président Richard Nixon. Ils arguent également qu’il ne peut être jugé pour ses manœuvres visant à inverser les résultats en raison de son acquittement lors de la procédure parlementaire en destitution qui le visait pour l’assaut du Capitole, le 6 janvier 2021, lors duquel des centaines de ses partisans ont tenté d’empêcher la certification de la victoire de son adversaire démocrate, Joe Biden.
Dans sa décision, la juge Chutkan a conclu que le précédent Nixon ne s’applique pas à des poursuites pénales contre un ex-Président, et qu’une procédure de destitution ne constituait pas un procès pénal.
«Les quatre ans du prévenu en tant que commandant en chef ne lui ont pas conféré le droit divin des rois à échapper à la responsabilité pénale à laquelle sont soumis ses concitoyens», a-t-elle affirmé. Mais l’appel de ses avocats a suspendu la procédure, ce qui pourrait faire dérailler le calendrier de ce procès qui doit débuter le 4 mars, s’est inquiété le procureur spécial Jack Smith, qui instruit le dossier.
Donald Trump a annoncé lundi sur son réseau Truth Social son intention d’assister à l’audience d’hier devant la cour d’appel, alors qu’il n’y est pas contraint. «J’ai à tout le moins droit à une immunité présidentielle face aux inculpations factices de Biden», a-t-il déclaré, justifiant une fois de plus ses agissements controversés par sa préoccupation de lutter contre de prétendues «fraudes électorales».
«Inculpations factices»
L’ex-Président, qui a plaidé non-coupable dans cette affaire le 3 août 2023 à Washington, impute ses tracas judiciaires à l’administration du président Joe Biden, qu’il risque fort de retrouver sur sa route en 2024 pour une revanche de l’élection de 2020.
Dans leurs arguments écrits, les procureurs mettent en garde contre les dangers que ferait courir aux institutions la reconnaissance d’une immunité de Donald Trump. «L’absence de potentielle poursuite pénale pour un Président qui cherche illégalement à se maintenir au pouvoir par des moyens criminels pourrait mettre en péril à la fois la Présidence elle-même et les fondations de notre système de gouvernement démocratique».
En décembre, la Cour suprême des Etats-Unis a rejeté la demande de Jack Smith de statuer en urgence sur cette question, court-circuitant ainsi le processus d’appel classique et les délais qu’il implique. Mais quelle que soit la décision de la cour d’appel, selon toute vraisemblance, celle des parties à qui elle donnera tort saisira la plus haute juridiction du pays.
Les neuf juges de la Cour suprême, six nommés par des présidents républicains et trois par des présidents démocrates, devront alors choisir de s’aventurer dans l’arène politique, ou au contraire de prudemment s’en abstenir. Ils se sont par ailleurs saisis de la question de son inéligibilité dans un dossier distinct.
Donald Trump est également poursuivi par la justice de l’Etat de Géorgie (sud-est) pour des faits connexes d’ingérence électorale, et devra en outre répondre devant un tribunal fédéral de sa gestion présumée négligente de documents confidentiels après son départ de la Maison-Blanche.