Les deux dernières réunions entre la cheffe du gouvernement, Najla Bouden et le secrétaire général de l’UGTT, Noureddine Taboubi, ont permis de rapprocher les points de vue. Avant-hier, Taboubi a remis à Bouden le programme de réformes proposé par l’UGTT pour sortir de la crise économique et financière traversée par le pays. Il s’est déclaré optimiste à propos d’un accord imminent sur les augmentations salariales pour le secteur public, ainsi qu’une nouvelle formulation de la circulaire 20, portant sur les négociations départementales.
Des divergences persistent. Mais, le ton du secrétaire général de l’UGTT donne espoir quant à l’adhésion de la centrale ouvrière aux réformes engagées par le gouvernement avec le FMI.
Une nouvelle page de concordance sociale semble revoir le jour en Tunisie depuis le pacte social signé le 12 août 2022, par la centrale patronale, Utica, et ouvrière, UGTT, et paraphé par la cheffe du gouvernement, Najla Bouden.
Le bloc interne paraît désormais soudé, comme l’exige le Fonds monétaire international, comme condition préalable à un accord avec la Tunisie. Il est vrai que ce changement a été permis par les assouplissements déclarés par le FMI, suite aux implications de la guerre d’Ukraine sur les économies émergentes. Ainsi, le vice-président du FMI, Farid Belhaj, a souligné lors de son dernier passage à Tunis, fin juin dernier, que «l’institution financière exigeait juste un programme à longs termes visant l’orientation de la subvention vers les couches sociales pauvres, la mise à niveau des entreprises publiques et la réduction du coût de l’administration publique».
De tels ajustements ont permis au gouvernement Bouden de mieux négocier avec l’UGTT, d’où cette lueur d’espoir. Toutefois il faut souligner que les agissements du gouvernement Bouden adhèrent aux recommandations des institutions financières internationales, appelant à soutenir le pouvoir d’achat des populations en ce moment de crise d’inflation, vécue par le monde entier. C’est dans ce cadre que Bouden a accepté la révision des salaires du secteur public.
Par contre, la nouvelle version de la circulaire 20 du gouvernement est une fleur à l’UGTT, pour lui signifier que le gouvernement accepte le dialogue. «La circulaire 20 est le résultat d’un cumul de 49 accords signés par des départements ministériels entre 2016 et 2018, que le gouvernement Chahed a été obligé de valider en 2019 et dont l’encours financier s’élève à près d’un milliard de dinars (300 millions d’euros). Il fallait donc couper court à ces accords imprévus par le Budget de l’Etat», explique l’ex-député syndicaliste, Mustapha Ben Ahmed, qui ajoute que «la nouvelle formulation conservera l’esprit de la circulaire».
Perspectives
Le dossier socioéconomique et financier bouge en Tunisie, comme le révèlent ces préparatifs de l’accord avec le FMI, ainsi que les signaux venant du Ticad 8, de la visite de Bouden en France et du prochain sommet de la francophonie à Djerba. Le gouvernement et les partenaires sociaux semblent s’approcher d’un programme commun, pouvant aider à réussir un bon accord avec le FMI. L’inflation et les problèmes d’approvisionnement ne sont pas spécifiques à la Tunisie en ces temps de crise internationale, née de la guerre d’Ukraine. La situation aurait été pire, si l’Algérie n’était pas venue en aide à la Tunisie pour l’approvisionnement de la STEG en gaz naturel à des prix préférentiels. Autrement, les ruptures de courant électrique auraient été récurrentes.
Pour ce qui est du champ politique, la page de la Constitution a été tournée et le camp Saïed a eu gain de cause. L’opposition ne dispose pas d’échos en dehors des plateaux médiatiques. Toute l’interrogation porte sur le profil de la prochaine assemblée qui naîtra des élections du 17 décembre 2022, quoique cette assemblée n’ait sûrement pas les mêmes attributions que l’ancienne après l’adoption de la nouvelle Constitution.
Ces élections donneront une idée sur la nouvelle architecture politique de la Tunisie.
Les islamistes d’Ennahdha appellent officiellement au boycottage, tout comme le Parti destourien libre de Abir Moussi. Mais, les islamistes seront là sous d’autres appellations. La Tunisie continue à manger son pain noir.
Tunis
De notre correspondant Mourad Sellami