Une infection préalable par un autre virus, le cytomégalovirus, mais aussi la diversité génétique des populations humaines jouent un rôle dans les réactions immunitaires variables au Covid-19, selon une étude publiée mercredi dans la revue Nature.
Des scientifiques français (Institut Pasteur, CNRS, Collège de France), épaulés par des chercheurs internationaux, ont étudié les variations des réponses immunitaires au SARS-CoV-2 en fonction des origines. Ils ont exposé au virus des cellules sanguines immunitaires obtenues à partir de 222 donneurs sains d’Afrique centrale, d’Europe de l’Ouest et d’Asie de l’Est.
Par séquençage de l’ARN de cellules uniques, ils ont analysé les réponses au SARS-CoV-2 de 22 types de cellules sanguines et combiné ces résultats à des informations sérologiques et génétiques concernant les mêmes individus. Les scientifiques ont ainsi identifié environ 900 gènes au comportement différent selon les populations. Des variations principalement dues, d’après eux, à la composition cellulaire du sang.
Or, parmi les facteurs influant sur ces différences cellulaires, figure l’exposition au cytomégalovirus (infection, généralement inoffensive, de la famille des herpès). 99% de la population d’Afrique centrale est séropositive pour le cytomégalovirus, contre 50% de celle d’Asie de l’Est et 32% des Européens.
Une infection latente par le cytomégalovirus pourrait ainsi accroître le risque de sévérité du Covid. La singularité génétique joue aussi: elle contrôle l’expression d’environ 1.200 gènes face au Covid, selon l’étude. Ainsi, «la sélection naturelle a influencé les réponses immunitaires actuelles au SARS-CoV-2, en particulier chez les personnes d’origine est-asiatique, où les coronavirus ont engendré de fortes pressions de sélection il y a environ 25.000 ans», selon Maxime Rotival (Pasteur), co-auteur principal avec Lluis Quintana-Murci. L’étude établit aussi un lien entre une part d’héritage préhistorique et les disparités immunitaires.
Entre 1,5 et 2% des gènes des Européens et des Asiatiques sont issus de Néandertal. En comparant certains de leurs résultats et le génome issu de Néandertal, les scientifiques ont découvert des dizaines de gènes qui affectent les mécanismes antiviraux et résultent d’anciens croisements entre Néandertaliens et Homo sapiens.
Ces travaux sont une nouvelle illustration des apports de la génétique pour comprendre la pandémie. Encore mi-juillet, une étude dans Nature a montré que les personnes porteuses d’un certain variant génétique ont deux fois plus de chances de ne pas tomber malades lorsqu’elles contractent le Covid-19. La paléogénétique confirme aussi son intérêt. En 2020, deux ans avant son Nobel de médecine, le Suédois Svante Paabo avait mis en évidence, avec d’autres chercheurs, la présence d’une portion particulière d’ADN, héritée de l’homme de Néandertal, chez les malades les plus graves du Covid. Cette portion d’ADN est plus fréquente chez des populations issues d’Asie du Sud.