Quatre objets — dont l’un décrit par Washington comme un ballon espion chinois — ont été abattus au-dessus des Etats-Unis ou du Canada en moins de dix jours. Voici ce que l’on sait de ces mystérieuses intrusions. Le 2 février, le Pentagone annonce suivre un ballon volant à haute altitude au-dessus du territoire des Etats-Unis. Pour Washington, pas de doute, c’est un ballon espion chinois, entré sur le territoire américain depuis plusieurs jours déjà. Pékin réplique qu’il s’agit d’un aéronef civil utilisé à des fins de recherches, principalement météorologiques. Le 4 février, l’armée américaine abat le ballon au large de la Caroline du Sud. Puis le 10 février, Washington annonce avoir abattu un «objet» volant à haute altitude au-dessus de l’Alaska. «Nous ne savons pas qui en est le propriétaire, si c’est un Etat ou une entreprise ou un particulier (...). Et nous ne comprenons pour l’heure pas son usage», affirme un porte-parole de la Maison Blanche. Le lendemain, le Premier ministre canadien Justin Trudeau annonce qu’un «objet non identifié» survolant le nord-ouest du Canada a été abattu, dans le cadre d’une opération conjointe entre Washington et Ottawa. Dimanche enfin, un quatrième «objet» est abattu par un F-16 au-dessus du lac Huron, dans le nord des Etats-Unis. Le Pentagone a déclaré qu’aucun de ces quatres objets ne semblait armé ou ne présentait une menace d’attaque. Les trois premiers engins ont été abattus par des chasseurs F-22 américains à l’aide de missiles AIM-9X, selon les autorités. Le ballon chinois était haut d’environ 60 mètres et portait une sorte d’énorme nacelle pesant plus d’une tonne, d’après le Pentagone. Sa taille serait comparable à celle de trois autobus. Un haut responsable du département d’Etat américain a indiqué que l’appareil avait «de nombreuses antennes, un ensemble probablement capable de collecter et géo-localiser des communications», et qu’il était «équipé de panneaux solaires assez larges pour fournir l’énergie nécessaire au fonctionnement de multiples capteurs collectant du renseignement». Les deux objets suivants, eux, avaient à peu près la taille d’une Volkswagen Coccinelle, selon des responsables. A la différence du ballon chinois, le deuxième objet ne semblait pas avoir de système de propulsion ni de commandes lui permettant de se diriger, d’après la Maison Blanche. Le troisième était un «appareil cylindrique», selon la ministre canadienne de la Défense, Anita Anand. Il a été abattu dans le Yukon, à environ 160 km de la frontière canado-américaine. Quant au quatrième, il était «octogonal» et «sans nacelle apparente», a indiqué un haut responsable de l’administration. Les deuxième et troisième aéronefs volaient à une altitude d’environ 12.000 mètres, et le quatrième à 6.000 mètres; ils constituaient tous une menace possible pour la sécurité des vols civils, selon les autorités. Les autorités américaines s’affairent toujours à récolter les restes du ballon chinois dans l’Atlantique, près des côtes de Caroline du Sud, à l’aide d’avions, de bateaux et de petits sous-marins. Un responsable du FBI, agence chargée de les examiner, a récemment indiqué que seule une «petite partie» des équipements de surveillance avait été récupérée. Elle est examinée dans les laboratoires de la police fédérale à Quantico, en Virginie, a-t-il ajouté. Ces restes flottaient à la surface de l’océan, a-t-il précisé, mais la plus grande partie des équipements, notamment les vastes panneaux solaires, a coulé à une profondeur de 14 mètres. Les débris de l’objet abattu au-dessus de l’Alaska sont tombés sur des eaux gelées, près de la frontière canadienne, a indiqué la Maison Blanche. Concernant le troisième objet, les forces canadiennes «vont maintenant récupérer et analyser les débris», selon Justin Trudeau. Le Pentagone a déclaré dimanche que des équipes américaines et canadiennes préparaient une opération pour tenter de récupérer le quatrième objet. Selon des spécialistes, les renseignements américains et canadiens reçoivent en continu d’énormes quantités de données et sont particulièrement à l’affût de potentiels missiles, pas d’objets lents comme des ballons. La secrétaire adjointe à la Défense des États-Unis, Melissa Dalton, a déclaré dimanche qu’après la détection du ballon chinois, la défense aérienne américaine a ajusté ses systèmes radar afin de pouvoir détecter des objets plus petits et se déplaçant plus lentement. Les Etats-Unis estiment que le ballon était contrôlé par l’armée chinoise et faisait partie d’une flotte envoyée par Pékin au-dessus de plus de 40 pays sur cinq continents, à des fins d’espionnage. Pour certains analystes, cela pourrait être le début d’une opération majeure d’espionnage chinoise pour recenser les capacités militaires étrangères, avant une possible montée des tensions autour de Taïwan dans les années à venir.