Des points de désaccord, qui se sont accumulés en quatorze années de pouvoir du Premier ministre nationaliste Viktor Orban. Seule contre tous, la Hongrie tente de bloquer systématiquement chaque initiative pouvant déplaire à la Russie engagée dans l’offensive en Ukraine.
La Hongrie de Viktor Orban a pris hier la tête du Conseil de l’Union européenne (UE) pour six mois succédant à la Belgique La présidence hongroise suscite le malaise au sein du Parlement européen et chez plusieurs Etats membres, au moment où la France inquiète aussi, avec une extrême droite aux portes du pouvoir.
Le gouvernement Orban s’est dit prêt à assumer «les obligations et responsabilités» de sa mission qui court jusqu’en décembre. «Nous agirons en tant que médiateur impartial», a affirmé le ministre des Affaires européennes, Janos Boka, selon des propos recueillis par l’AFP. «Dans le même temps, a-t-il ajouté, la Hongrie profitera de la lumière pour mettre en avant sa vision de l’Europe» et «redresser la barre (...) dans la bonne direction».
Sur l’Etat de droit, l’immigration ou le conflit en Ukraine, elle compte bien faire entendre sa voix discordante, qui lui vaut des bras de fer répétés avec ses partenaires et le gel de milliards d’euros de fonds européens. Des points de désaccord, qui se sont accumulés en quatorze années de pouvoir du Premier ministre nationaliste Viktor Orban.
Seule contre tous, la Hongrie tente de bloquer systématiquement chaque initiative pouvant déplaire à la Russie engagée dans l’offensive en Ukraine. Victor Orban a les liens, politiques comme économiques de son pays avec le Kremlin. En parallèle, il use de son droit de veto pour entraver l’aide militaire à Kiev. Il s’est aussi farouchement opposé à toute discussion d’adhésion avec l’Ukraine, jugeant que son voisin n’était pas prêt. Il avait finalement accepté de quitter la table du Sommet des dirigeants des Vingt-Sept en décembre, le temps que ses homologues décident d’ouvrir les pourparlers.
«Révolution illibérale»
Entre-temps, le Premier ministre hongrois s’oppose à l’arrivée de migrants extra-européens. Depuis la crise de 2015, il a barricadé son pays en érigeant des clôtures à ses frontières, disant vouloir «défendre» une Europe «chrétienne». Il s’est opposé au Pacte européen sur la migration et l’asile, adopté en mai après d’interminables négociations, qui va l’obliger à contribuer à un mécanisme de solidarité envers les Etats membres confrontés à une pression migratoire.
Budapest remet désormais ouvertement en cause la primauté du droit européen sur celui de la Hongrie et use de tous les recours pour retarder au maximum les mises en application des règles communautaires. La justice a été la première victime de sa «révolution illibérale», mais ce sont tous les contre-pouvoirs qui ont été progressivement soumis à son emprise.
Viktor Orban n’a pu influer sur les postes clés de l’UE: malgré son opposition, les dirigeants se sont entendus pour reconduire Ursula von der Leyen à la tête de la Commission.
Quant au Parlement européen, le Premier ministre hongrois est loin de l’avoir conquis : il a perdu des députés et son parti Fidesz figure toujours parmi les non-inscrits. Des tractations sont toutefois en cours.
La présidence tournante permet au pays qui la détient de contrôler l’agenda des réunions des 27, un pouvoir non négligeable mais pas absolu, selon plusieurs diplomates européens. D’autant que la Belgique et les institutions européennes ont mis les bouchées doubles pour boucler des décisions importantes.
Un nouveau paquet de sanctions contre la Russie a été approuvé et des négociations d’adhésion qualifiées d’«historiques» ont été officiellement ouvertes avec l’Ukraine, deux décisions que désapprouve Viktor Orban. Bruxelles a gelé des milliards d’euros destinés à la Hongrie. Si une partie a été débloquée fin 2023, quelque 19 milliards restent en suspens.