L’artiste italien d’origine nigériane Tommy Kuti a fait sensation, vendredi 28 juin, au Théâtre national Mahieddine Bachtarzi (TNA), à Alger, lors de la deuxième soirée du 24e européen de musique.
Débordant d’énergie, Tolulope Olabode Kuti ou Tommy Kuti, qui a grandi en Lombardie, au nord de l’Italie, a célébré autant ses origines que le pays d’accueil dans ses chansons. Avec un peu d’humour et beaucoup de rythme, il évoque des questions sérieuses, comme le racisme et la situation des migrants en Italie. Tommy Kuti a interprété le titre qui a fait sa réputation, «Afroitaliano», en 2016. «Les médias italiens n’évoquent que les barques de clandestins africains qui viennent en Italie, de migration, de criminalité...Les Africains qui vivent normalement en Italie n’apparaissent pas», a-t-il dit, lors d’une rencontre avec la presse.
Il a souligné que les mentalités changent progressivement en Italie. Preuve en est, l’organisation en juillet prochain d’un festival musical africain à Milan, «Afroitaliano».
Sur scène, il a pris le temps, à chaque fois, d’expliquer le sens de ces chansons. Des chansons qui portent un certain engagement artistique en faveur du vivre-ensemble, de l’amour, de la paix, de l’acceptation de l’autre comme «Sku sku», «Politica», «Alika», «Alè Alè»... «Il faut toujours être fier de sa culture», a-t-il plaidé avant de descendre de la scène et chanter au milieu du public. Il a même convaincu Thomas Eckert, ambassadeur de l’Union européenne à Alger, de faire quelques pas de danse et Elizabeth Moore Aubin, ambassadeur des Etats-Unis à Alger, à applaudir.
«C’est ma première venue en Algérie, mais je vais revenir. Dites-le à tout le monde. Les Algériens sont gentils et très accueillants. Le public algérien est incroyable. Je ne me suis jamais autant amusé que lors de ce spectacle à Alger. En Italie, il n’y pas ce feeling africain. On ne danse pas comme on danse ici en Algérie. Au sud de l’Italie, comme à Naples et Salento, on connaît un peu les rythmes africains. Ce n’est pas le cas au nord», a souligné Tommy Kuti. Tommy Kuti travaille en coordination avec son DJ. «Il y a toujours un jeu de va-et-vient entre nous pour trouver la bonne formule, le bon rythme», a-t-il dit.
La kora scandinave de Maher et Sousou Cissoko
Tommy Kuti a confié qu’il a, quelque part, des liens avec la famille du célèbre chanteur nigérian Fela Kuti, créateur sans conteste de l’afrobeat dans les années 1970. «Je me définis comme un artiste entre Fela Kuti et Bob Marley. Ce que j’aimais chez Bob Marley, c’est son sourire, sa passion. Il a utilisé la musique comme une arme positive. Il a fait aimer la musique à tout le monde», a-t-il dit.
En première partie de soirée, le duo suédo-sénégalais Maher et Sousou Cissoko a émerveillé le public avec des chansons douces et profondes à la fois.
Des chansons où se croisent les rythmes africains et les airs scandinaves. Fier de ses origines malinké, Maher Cissoko, qui habitait à l’origine en Allemagne avant de s’installer en Suède avec son épouse Sousou, travaille pour faire connaître la culture et les expressions musicales africaines en Europe du nord. «Dans les chansons que nous composons ensemble, nous évoquons l’amour et la réconciliation entre les gens, entre les pays, les peuples...Nous chantons en mandingue, en suédois, en français, en anglais...», a souligné Maher Cissoko, ravi de se retrouver en Algérie pour la première fois. Il est resté attaché à la kora, l’instrument des ancêtres. Sousou Maher a expliqué, lors d’un master class animé, le 29 juin au TNA, qu’elle est partie en Gambie et au Sénégal pour apprendre à jouer de la kora, «un instrument sacré». «En Suède, la kora était peu connue. Là, avec le temps, les gens commencent à la découvrir», a précisé Sousou Cissoko. «Mon frère l’a aidé à maîtriser le jeu de la kora. Un instrument qui se joue avec deux doigts, le pouce et l’index, des deux côtés du chevalet, comme pour une harpe. Il peut être joué debout ou assis.
A chaque fois, il faut prendre en compte le rythme pour construire la mélodie. La folk music suédoise rencontre parfois certains rythmes que nous avons au Sénégal», a expliqué Maher Sousou lors du master class, animé avec des artistes algériens dont ceux du groupe Tikoubaouine.
Sur scène, Sousou Cissoko est monté avec un robe ample, aux couleurs de la Suède, jaune et bleu, avec des motis amazigh. «J’ai acheté cette robe à Alger, vendredi. J’ai adoré ses couleurs et ses motifs traditionnels», a-t-elle dit. Le 24e Festival européen de musique se poursuit à Alger jusqu’au 3 juillet 2024.
Hicham Farès