Il y a 5 millions d’années… : Une «méga-inondation» aurait rempli la mer Méditerranée asséchée

25/01/2025 mis à jour: 17:01
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Imaginez l’équivalent de 40 000 piscines olympiques se déversant dans la mer Méditerranée chaque seconde : c’est peut-être ce qui s’est produit il y a 5 millions d’années, alors que débutait l’âge géologique du Zancléen, selon une étude publiée en décembre dans la revue Communications Earth & Environment. 

Selon les estimations réalisées par les auteurs de ces travaux à l’aide d’indices géologiques recueillis dans le sud-est de la Sicile, la région aurait ainsi connu une «méga-inondation» d’un débit de 68 à 100 Sverdrups (Sv), 1 Sv étant égal à un million de mètres cubes (400 piscines olympiques) par seconde.
La crise dite «messinienne» (du nom de l’âge géologique précédant le Zancléen), pendant laquelle l’eau de la mer Méditerranée s’est évaporée pour laisser place à de vastes dépôts de sel, se serait donc achevée bien plus brutalement qu’on ne le croyait jusqu’ici.

L’inondation qui «éclipse» toutes les autres ?

En effet, les scientifiques ont longtemps pensé que la crise messinienne s’était terminée progressivement, sur une période d’environ 10 000 ans. Cette idée avait toutefois été remise en question par la découverte, en 2009, d’un chenal d’érosion s’étendant du golfe de Cadix à la mer d’Alboran, mettant en évidence une inondation «unique et massive» d’une durée de deux à 16 ans. Pour le Dr Aaron Micallef, chercheur à l’Institut de recherche de l’aquarium de la baie de Monterey en Californie et auteur principal de l’étude, cité dans un communiqué de l’université de Southampton (Royaume-Uni), les nouvelles estimations de débits et de vitesses d’écoulement «éclipsent toutes les autres inondations connues dans l’histoire de la Terre.» «Nos recherches fournissent les preuves les plus convaincantes de cet événement extraordinaire», souligne-t-il.


Des débris rocheux arrachés par les flots

Les auteurs de la nouvelle étude ont examiné plus de 300 crêtes asymétriques au niveau d’un couloir géologique traversant le «seuil de Sicile», un pont terrestre submergé qui séparait autrefois les bassins occidental et oriental de la Méditerranée.


En prélevant des échantillons sur ces crêtes, l’équipe a découvert qu’elles étaient surmontées d’une couche de débris rocheux correspondant à la limite entre les périodes messinienne et zancléenne, et contenant des matériaux érodés de la région environnante – ce qui indique que ces matériaux ont été déposés là rapidement et avec une «force considérable». Puis, en analysant les données d’imagerie sismique, les chercheurs ont découvert un «chenal en forme de W» sur le plateau continental à l’est du «seuil de Sicile», dont la forme et l’emplacement suggèrent qu’il a pu agir comme un «énorme entonnoir» vers un canyon, celui de la vallée sous-marine de Noto, au moment de la méga-inondation.


Un flux propulsé jusqu’à 115 km/h

Les auteurs ont également développé des modèles informatiques de la méga-inondation afin de simuler le comportement de l’eau. D’après les résultats, le flux aurait changé de direction et augmenté en intensité au fil du temps, atteignant jusqu’à 115 km par heure. Creusant ainsi des canaux plus profonds, érodant davantage de matériaux et les transportant sur de plus longues distances. «Ces résultats ne font pas que mettre en lumière un moment critique de l’histoire géologique de la Terre, ils démontrent également la persistance des formes de relief sur cinq millions d’années», insiste le Dr Micallef.


D’autres chercheurs avaient récemment annoncé la découverte d’un immense canyon sous-marin au cœur de la Méditerranée, dans le bassin du Levant. Sa formation se serait déroulée peu de temps avant la crise messinienne, éclairant ainsi un passé encore plus lointain.
 

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