Escapade dans le Fahs algérois : Chéraga ou les gens de … l’Est

09/04/2023 mis à jour: 20:26
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Avec l’aimable concours de l’auteur de la série d’ouvrages monographiques intitulée Le Sahel algérois, Ahmed Karim Labèche, nous présentons au lecteur, à travers des escales dans l'ancien Fahs algérois, un condensé exaltant de son travail sur l'histoire des villes qui s'y sont implantées au fil des siècles.

La création du village de Chéraga remonte à l’année 1842. Pour la formation de centres de population agricoles dans le Sahel algérois, l’administration de l’occupation adopta parallèlement l’arrêté du 18 avril 1841 qui autorisait l’expropriation des terres. C’est dans cette histoire que la tribu des Chéraga perdit à tout jamais ses biens fonciers. Le bourg de Chéraga fut à l’origine peuplé en majeure partie d’agriculteurs, viticulteurs et artisans venus de la ville de Grasse, une région qui chevauche le Var et les Alpes maritimes. Les familles pionnières qui occupèrent le centre en voie de fondation étaient des gens connus pour la culture des plantes aux essences odoriférantes.

 

C’est à partir de Chéraga que commence véritablement la banlieue ouest d’Alger, une contrée verdoyante, jadis couverte de jardins, de maisons de campagne et de haouchs bordés d’aloès et de cactus. Cette commune, établie dans la ceinture du fahs de l’époque ottomane, se situe à 12 km d’Alger, atteignant à sa partie la plus haute une altitude de 190 mètres au-dessus du niveau de la mer. 

Quatre grandes tribus vivaient à Chéraga et ses environs, à savoir la tribu des Chéraga, les gens de l’Est (Echerraga opposé de Gherraba), autrefois installés à l’emplacement de l’actuelle ville, au profit de laquelle ils léguèrent leur nom ; les Boulahouache, sédentarisés au lieudit Grand Chéraga ou Sidi Hassen ; les Zouaoua, établis anciennement dans le quartier de ce nom, sur le sommet de l’une des collines situées en direction de Dély Ibrahim, et enfin, les Béni Messous, vivant au pied du massif de Bouzaréah, sur les berges du célèbre ruisseau auquel ils doivent le nom.

A l’origine, le territoire de Chéraga était jalonné de nombreux domaines créés en bordure de rivières bucoliques ou à proximité de fontaines abondantes arrosant généreusement de leur eau fraîche une multitude de vergers et cultures maraichères soigneusement entretenus. Au nombre de ces grands domaines, l’on citera, djenane El Khaznadji, Haouch Khoudja et Haouch Ain El Qalaâ. Djenane El Khaznadji abrite un ancien palais turc toujours visible à peu de distance de la qubba de Sidi Yakhlef. 

Son premier propriétaire, auquel elle doit au surplus  son nom, est un haut dignitaire qui occupait au temps de la Régence d’Alger la fonction de khaznadji, ce qui équivaudrait de nos jours à un poste de ministre des Finances. Haouch Mahmoud était la propriété d’un khodja, secrétaire du dey d’Alger. Il se situe à droite au bord de la nationale 41, à quelques encablures du village de Chéraga. 

Ce dernier renferme un certain nombre de curiosités archéologique qui remonte à la civilisation romaine. Il se particularisait jadis par l’exubérance d’une végétation luxuriante qu’arrosaient des fontaines à foison. Ces sources jaillissaient dans un espace parcouru en tous sens par des ruisseaux tels que l’oued Béni Messous, l’oued Baïnem, l’oued Djaâfar et le petit bras de rivière de Zouaoua, dont le cours d’eau arrive depuis la localité éponyme.                       
 

Depuis que Béni Messous a été érigée en commune, en 1985, cette ancienne exploitation, qui portait lors de la colonisation la dénomination Vidal, ne fait plus partie du territoire de la commune de Chéraga. Elle est désormais désignée sous le nom de Benhaddadi Saïd, un martyr de la Guerre de libération. Haouch Aïn El Qalaâ est réputé pour ses vestiges d’anciennes civilisations qui y avaient été jadis mis au jour. Les Romains et les Turcs, eux aussi, sont passés par-là, ils bâtirent auprès d’une fontaine un bordj, une sorte de citadelle qui leur servait de poste d’observation et dont l’appellation a survécu dans celle de la ferme tout entière La création du village de Chéraga remonte à l’année 1842. 

Pour la formation de centres de population agricoles dans le Sahel algérois, l’administration de l’occupation adopta parallèlement l’arrêté du 18 avril 1841 qui autorisait l’expropriation des terres. C’est dans cette histoire que la tribu des Chéraga perdit à tout jamais ses biens fonciers.   Le bourg de Chéraga fut à l’origine peuplé en majeure partie d’agriculteurs, viticulteurs et artisans venus de la ville de Grasse, une région qui chevauche le Var et les Alpes maritimes. Les familles pionnières qui occupèrent le centre en voie de fondation étaient des gens connus pour la culture des plantes aux essences odoriférantes. 

Quatorze ans après sa création, Chéraga devient une commune autonome, instituée dans le département d’Alger par le décret du 31 décembre 1856, divisée à l’époque en deux sections : le centre de Chéraga, territoire du chef-lieu, ainsi que les agglomérations voisines de Staouéli, Baïnem, Sidi Fredj, Aïn Benian et Maqtaâ Essfa. 

Le village de Zéralda sera, lui aussi, annexé à Chéraga, en date du 12 août 1861.
Lors du découpage administratif de 1984, en application des dispositions de la loi du 04 février1984, relatives à l’organisation territoriale du pays, Chéraga en fera partie de la wilaya de Tipasa, en dépit des soixante kilomètres qui la séparent du chef-lieu. 

A cette date, elle était constituée de vingt-et-une localités, à savoir Chéraga-ville,  Kaouech, Zouaoua, Domaine Benhaddadi en partie,  Sidi Yakhlef, appelé communément Sidi Khalef, Ahmed Chicha,  Nezali Cherif,  Alioua Fodil, Bouchaoui Amar, Djaraoun Belkacem, Les Dunes,  Bouchaoui Marine,  Grand Chéraga,  Sidi Hassen, Oued Bridja,  Amara, Aérodrome, Village socialiste agricole,  Djenane Achabou,   Club des Pins et  Petit-Staouéli en partie.

Le quartier de Kaouech est juché en surplomb sur le sommet d’une des deux collines qui bordent la ville à l’Est. Celui-ci n’a été peuplé que pendant la période coloniale, contrairement à celui de Zouaoua qui existe depuis l’époque ottomane. De nos jours, la pittoresque vierge vallée qui séparait par le passé, les deux hameaux voisins de Zouaoua et Kaouech, a été entièrement envahie par des constructions à l’architecture contemporaine. 

Au lendemain de la création du gouvernorat du grand Alger, par décret du 02 août 1997 portant n° 97/292, Chéraga rejoint sa place avec les communes de la capitale. Elle constitue désormais, avec Dély Ibrahim, Hammamet (Baïnem), Aïn Benian et Ouled Fayet, une circonscription administrative (daïra), dont le chef-lieu est Chéraga.

Cette localité était également renommée pour sa production artisanale à base du crin végétal. Les natifs employaient les feuilles et les tiges des palmiers nains qu’ils mélangeaient au poil de chameau et à la laine pour fabriquer l’étoffe des tentes. Ils en confectionnaient des nattes, des corbeilles, des chapeaux, des éventails, des sacs et des paniers doubles «chouari» qu’ils plaçaient sur le dos des mules et mulets.    
 

La ville s’est métamorphosée également en un carrefour stratégique à cinq branches, vers Aïn Benian, Dély Ibrahim, Ouled Fayet, El Biar et Staouéli. La cité dispose à la limite ouest d’un accès à deux périphériques : une première rocade construite en 1989 desservant les villes de Zéralda, Ben Aknoun et la capitale. La seconde rocade qui se dirige vers Douéra et Blida fut inaugurée en 2008.

Le paysage urbain de Chéraga est en plein essor, alors que d’importants projets immobiliers sont en cours de réalisation ou en voie d’achèvement, d’autres ont déjà été livrés à l’image du nouveau siège de la circonscription administrative. Cette imposante bâtisse abritant les services de la daïra a été réalisée dans un style inspiré de l’art islamique. Elle surplombe depuis 2014, l’ancien haouch turc de Ben Omar et l’antique voie romaine.
 

L’essentiel de l’extension de la ville eut lieu à partir de Houmet Ettaliane, (quartier du crépissage) situé à la sortie est de l’agglomération initiale. Les autochtones y vivaient sous l’occupation dans des abris de fortune qu’on appelait communément gourbis. Dans ce secteur, des dizaines de nouvelles échoppes commerciales se sont alignées le long d’un boulevard attirant à toute heure une foule d’Algérois.
 

Pour faire face à la croissance démographique, de multiples cités dortoirs furent réalisées ces dernières années en périphérie de la ville et notamment à l’ouest de la commune à l’instar du Village socialiste agricole (VSA) et du quartier Sidi Hassen (Grand Chéraga). Le projet d’aménagement des lotissements d’El Amara et Grand Chéraga remonte à l’année 1849.

Le quartier Grand Chéraga est appelé aussi quartier Sidi Hassen en souvenir d’un saint personnage, qui attirait par le passé les habitants des alentours qui venaient nombreux lui témoigner leur dévotion. Dans l’espoir de voir leurs vœux exaucés les fidèles s’y rendaient à pied ou en carriole, chargés d’offrandes qui se composaient généralement d’étoffes ou de volailles qu’on sacrifiées sur place. 

La qubba de ce marabout avait l’aspect d’un petit édifice de type hémisphérique, dont la paroi externe est recouverte de chaux. Vers 2014, elle était tellement enfouie derrière une végétation abondante qui poussait sur les berges du ruisseau des lauriers qu’on pouvait à peine l’entrevoir.

Le quartier El Qaria, est une petite agglomération secondaire installée au nord de la commune sur la route des dunes. Sa création est la conséquence du discours politique d’alors, qui était favorable à la mise en place d’un grand projet à travers lequel on prévoyait la réalisation de mille villages socialistes.  
 

 

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