Détérioration des relations algéro-françaises : Tebboune pointe du doigt l’extrême droite

04/02/2025 mis à jour: 17:49
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Photo : D. R.

«Le climat est délétère, nous perdons du temps avec le président (Emmanuel) Macron. Nous avions beaucoup d’espoirs de dépasser le contentieux mémoriel», a déclaré le chef de l’Etat à l’Opinion.

Dans l’entretien qu’il a accordé hier au quotidien français l’Opinion, le président Tebboune est revenu sur les causes qui ont amené à la dégradation des relations algéro-françaises. Il a, en effet, affirmé que les déclarations hostiles de politiques français à l’encontre de l’Algérie ont engendré un climat délétère qui a contribué à la détérioration des relations algéro-françaises. «Le climat est délétère, nous perdons du temps avec le président (Emmanuel) Macron. Nous avions beaucoup d’espoirs de dépasser le contentieux mémoriel.

C’est pour cela que nous avons créé, à mon initiative, une commission mixte pour écrire cette histoire qui nous fait encore mal», a-t-il déclaré à l’Opinion. «Et pour dépolitiser ce dossier, j’ai même reçu deux fois l’historien Benjamin Stora (qui) a toute mon estime et réalise un travail sérieux avec ses collègues français et algériens sur la base des différentes archives, bien que j’aie déploré que l’on n’aille pas assez au fond des choses», a-t-il souligné.

Il a aussi rappelé avoir établi «une feuille de route ambitieuse» après la visite en août 2022 du président Macron, suivie de celle d’Elisabeth Borne, alors Première ministre, qu’il a qualifiée de «femme compétente connaissant ses dossiers». «Mais, plus rien n’avance si ce n’est les relations commerciales», a-t-il fait observer.

A cet effet, il a affirmé que «le dialogue politique est quasiment interrompu», évoquant les «déclarations hostiles tous les jours de politiques français, comme celles du député de Nice, Eric Ciotti, ou du membre du Rassemblement national (Jordan Bardella)».

Jordan Bardella, eurodéputé, président du Rassemblement national (RN), principal parti d’extrême droite en France, n’a pas manqué ces derniers mois de stigmatiser les personnes issues de l’immigration, principalement les Algériens. «Ça fait 30 ans qu’on peine à régler la question de l’Algérie. En quelques heures, Trump a réglé celle de la Colombie», a-t-il déclaré, récemment sur BFM TV.

Il commentait la décision du président américain d’expulser des migrants clandestins, faisant le parallèle avec l’immigration algérienne avec des propos empreints de haine envers l’Algérie. «Ça fait plusieurs années que l’Algérie ne respecte pas la France», s’est-il exprimé sur la même chaîne, réagissant au refus d’Alger d’accueillir, fin janvier, sur son sol l’influenceur Doualemn.

Dans la même veine, on retrouve Eric Ciotti, leader de l’Union de la droite républicaine (UDR) et allié du Rassemblement national (RN). Lors d’une conférence de presse organisée le mardi 28 janvier, Ciotti a sévèrement critiqué la gestion du «dossier» Algérie par le gouvernement français.

Le député des Alpes-Maritimes a usé de propos peu respectueux en parlant de l’Algérie, réagissant à son refus d’accueillir l’influenceur Doualemn. «Cet Etat montre une volonté manifeste d’humilier notre pays», a-t-il dit, reprenant les termes employés par le ministre français de l’Intérieur, Bruno Retailleau. Celui-ci est l’un de ceux qui, en France, ont contribué par leurs déclarations à dégrader davantage la relation avec l’Algérie.

«Pour moi, la République française, c’est d’abord son Président»

Avec son discours sur le rapport de force et ses propos algérophobes à l’extrême, il s’est vite fait attribuer le titre de «ministre de la haine». «Et ces personnes aspirent un jour à diriger la France.  Personnellement, je distingue la majorité des Français de la minorité de ses forces rétrogrades et je n’insulterai jamais votre pays», a poursuivi le président Tebboune.

Dans le même contexte, le chef de l’Etat s’est «interrogé sur la manière dont Mme Le Pen va s’y prendre si elle parvient au pouvoir : veut-elle une nouvelle rafle du Vel d’Hiv et parquer tous les Algériens avant de les déporter ?» Interrogé sur sa disposition «à reprendre le dialogue à condition qu’il y ait des déclarations politiques fortes», le président Tebboune a répondu : «Tout à fait.

Ce n’est pas à moi de les faire. Pour moi, la République française, c’est d’abord son Président.» «Il y a des intellectuels et des hommes politiques que nous respectons en France, comme Jean-Pierre Chevènement, Jean-Pierre Raffarin, Ségolène Royal et Dominique de Villepin, qui a bonne presse dans tout le monde arabe, parce qu’il représente une certaine France qui avait son poids», a-t-il relevé. Il a ajouté qu’«il faut aussi qu’ils puissent s’exprimer.

Et ne pas laisser ceux qui se disent journalistes leur couper la parole et les humilier, particulièrement dans les médias de Vincent Bolloré dont la mission quotidienne est de détruire l’image de l’Algérie».

Par ailleurs, à une question sur la dénonciation des Accords de 1968 de la part de plusieurs politiques français, le président de la République a estimé qu’il s’agit d’«une question de principe». «Je ne peux pas marcher avec toutes les lubies. Pourquoi annuler ce texte qui a été révisé en 1985, 1994 et 2001», s’est-il interrogé. Il a précisé à ce propos, que «certains politiciens prennent le prétexte de la remise en cause des accords pour s’attaquer à ces Accords d’Evian qui ont régi nos relations à la fin de la guerre. Ces Accords de 1968 sont une coquille vide qui permet le ralliement de tous les extrémistes comme du temps de Pierre Poujade».

 

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