Les forces d’occupation israéliennes ont poursuivi hier pour le dix-huitième jour consécutif leur campagne militaire féroce menée contre la ville et le camp de Jénine, et qui a été étendue à d’autres villes de Cisjordanie, principalement Tulkarem et Tubas, faisant plusieurs victimes.
«L'occupant israélien poursuit son agression contre les gouvernorats de Jénine, Tulkarem et Tubas depuis plus de deux semaines, faisant 29 martyrs, des dizaines de blessés, des arrestations, des démolitions de maisons et des déplacements forcés, au milieu d'une destruction généralisée des biens et des infrastructures» rapportait ce vendredi l’agence Wafa.
Pour rappel, cette vaste opération baptisée «Mur de fer» a été lancée le 21 janvier dernier. Depuis cette date, «l'occupant a imposé des mesures arbitraires à ses points de contrôle militaires près de la plupart des entrées et sorties des gouvernorats de Cisjordanie et a fermé la plupart des portes des villes et des villages» affirme Wafa. Le but est de «faire exploser la situation en vue de créer un état de chaos violent pour faciliter l'annexion de la Cisjordanie, comme en témoignent les attaques brutales commises par des gangs de colons terroristes contre les citoyens, leurs villes, leurs propriétés, leurs maisons, leurs terres et leurs lieux saints» martèle l’agence de presse palestinienne. Tulkarem assiégée depuis douze jours Dans la ville et le camp de réfugiés de Jénine, les brutalités israéliennes ont fait «25 martyrs, des dizaines de blessés et d'arrestations» en dix-huit jours. «D'énormes explosions ont retenti à l'intérieur du camp la nuit dernière (nuit du jeudi au vendredi, ndlr)» signale Wafa, faisant état de démolitions aux explosifs qui ont ciblé des habitations de civils palestiniens.
«Selon des estimations, environ 90 % des résidents du camp ont été déplacés de force vers 39 localités du gouvernorat de Jénine» alerte l’agence d’information palestinienne. Une importante armada de blindés israéliens continue d’encercler la ville et son camp. Les engins sionistes continuent aussi «d’assiéger l'hôpital gouvernemental de Jénine après avoir détruit au bulldozer son entrée et la rue principale qui y mène». Dans la ville de Tulkarem et son camp de réfugiés, l’occupant israélien poursuit ses opérations pour le douzième jour consécutif «s'emparant de maisons pour les transformer en casernes militaires après avoir forcé leurs habitants à s'enfuir» indique Wafa.
Les troupes sionistes «encerclent toujours l'hôpital gouvernemental et ont pris le contrôle du complexe commercial Al-Adawiya qui lui est adjacent pour le transformer en caserne et en point d'observation» ajoute la même source. Les forces d’occupation «se sont également emparées de l'immeuble résidentiel Al-Burhan, près de l'entrée sud-ouest du camp de Tulkarem, et ont forcé ses locataires à le quitter». D’après l’agence palestinienne, outre le fait de confisquer des habitations et des immeubles résidentiels ou à usage commercial, «plusieurs maisons ont été entièrement ou partiellement démolies, dynamitées et brûlées».
30 000 habitants ont quitté Jénine selon l’UNRWA
Il y a quelques jours, l’UNRWA alertait sur le fait que «le camp de réfugiés palestiniens de Jénine a été vidé de ses 30 000 habitants à la suite des opérations lancées par l’armée israélienne dans cette partie de la Cisjordanie occupée», rapporte Onu-Info. «Selon l’Agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens, la situation à Jénine prend une direction ‘’catastrophique’’. De grandes parties du camp ont été complètement détruites par une série de détonations des forces israéliennes» poursuit Onu-Info. «On estime que 100 maisons ont été détruites ou fortement endommagées», a déclaré Juliette Touma, Directrice de la communication de l’UNRWA, citée par Onu-Info. L’agence onusienne a fait savoir par ailleurs que «13 écoles du camp de Jénine et de ses environs sont toujours fermées». «Cela a affecté 5000 enfants dans cette zone» précise l’UNRWA. De son côté, l’ONG Médecins sans Frontières (MSF) vient de publier un nouveau rapport sur la situation en Cisjordanie occupée. «Depuis octobre 2023 et le début de la guerre totale contre Ghaza, l'armée et les colons israéliens ont multiplié les actes d'extrême violence contre les Palestiniens en Cisjordanie occupée» affirme MSF dans un texte publié sur son site officiel. «Au total, au moins 870 Palestiniens ont été tués et plus de 7 100 blessés entre octobre 2023 et janvier 2025 (en Cisjordanie)» soutient l’ONG.
Et de relever : «L'escalade de la violence en Cisjordanie a gravement entravé l'accès aux soins des Palestiniens et s'inscrit dans un schéma d'oppression systémique par Israël qui a été décrit par la Cour internationale de justice (CIJ) comme de la ségrégation raciale et de l'apartheid». Le nouveau rapport de Médecins Sans Frontières «couvre une période d'un an, d’octobre 2023 à octobre 2024». Il est «le résultat d'entretiens approfondis avec 38 patients et membres du personnel de MSF, du personnel hospitalier, paramédical et des secouristes soutenus par MSF» détaille l’ONG. «Ils font état, poursuit-elle, d'incursions militaires israéliennes prolongées et violentes et de restrictions de mouvement de plus en plus lourdes. Autant de facteurs qui entravent gravement l'accès aux services essentiels, en particulier aux soins». Et de faire remarquer : «La situation s’est encore détériorée pour les Palestiniens vivant en Cisjordanie depuis le cessez-le-feu à Ghaza».
«Un état d'urgence perpétuel»
«Des patients palestiniens meurent simplement parce qu'ils ne peuvent pas atteindre les hôpitaux», déplore Brice de le Vingne, coordinateur d'urgence de MSF, cité par l’ONG. «Des ambulances sont bloquées par les forces israéliennes aux points de contrôle alors qu'elles transportent des patients en état critique, des centres médicaux sont encerclés et perquisitionnés, et des professionnels de santé sont victimes de violences physiques alors qu'ils tentent de sauver des vies» a-t-il ajouté.
Médecins Sans Frontières fait état également dans son rapport d’un «nombre croissant d'attaques des forces israéliennes contre le personnel et les structures de santé. (…). Attaques au cours desquelles les forces israéliennes ciblent les hôpitaux, détruisent des centres médicaux de fortune dans les camps de réfugiés, mais aussi harcèlent, arrêtent, blessent et tuent des secouristes et travailleurs médicaux.»
A l’appui de ses accusations, MSF cite l’OMS qui, entre octobre 2023 et décembre 2024, «a recensé 694 attaques visant le secteur de la santé en Cisjordanie, les hôpitaux et les structures de soins étant souvent assiégés par des militaires». L’organisation humanitaire met l’accent en outre sur le fait qu’«en cas d'urgence médicale, les restrictions de circulation peuvent avoir des conséquences mortelles».
Et d’affirmer que «l'accès aux soins a été gravement entravé par l'obstruction et le ciblage des mouvements d'ambulances ainsi que par l'escalade des raids militaires violents qui, en plus de faire des morts et des blessés, ont détruit des infrastructures civiles vitales, notamment des routes, des structures de santé, des canalisations d'eau et des systèmes électriques, en particulier dans les camps de réfugiés de Tulkarem et de Jénine.»
Médecins Sans Frontières attire l’attention dans son rapport, par ailleurs, sur «la violence des colons et l'expansion constante des colonies».
Ces violences «affectent de nombreux Palestiniens, parfois effrayés à l'idée de se déplacer en Cisjordanie. Au total, 1 500 attaques de colons israéliens contre des Palestiniens ont été signalées par OCHA (le Bureau des affaires humanitaires de l’ONU) entre octobre 2023 et 2024» indique MSF. «En tant que puissance occupante, Israël a l'obligation légale, en vertu du droit international, de garantir l'accès aux soins et de protéger le personnel médical» insiste MSF. L’ONG prévient : «Le système de santé en Cisjordanie est soumis à d'immenses pressions et est contraint de fonctionner dans un état d'urgence perpétuel». Mustapha Benfodil

Amnesty international dénonce les propos du président américain sur Ghaza : «l’affirmation de Trump est consternante et illégale»
Amnesty International a vivement réagi aux dernières déclarations du président américain Donald Trump sur Ghaza. Dans un communiqué rendu public jeudi, l’ONG de défense des droits humains a estimé que « l’affirmation du président Trump selon laquelle les États-Unis vont s’emparer de Ghaza et expulser les Palestiniens est consternante et illégale ».
Agnès Callamard, secrétaire générale d’Amnesty International, a vigoureusement dénoncé le plan du milliardaire américain : « Les propos du président Trump, appelant au transfert forcé des Palestinien·ne·s de la bande de Ghaza occupée vers les pays voisins, doivent être condamnés de manière unanime et sans aucun équivoque.
Son discours est provocateur, scandaleux et honteux, et sa proposition constitue une violation flagrante du droit international » a-t-elle déclaré. « Tout projet d’expulsion forcée de Palestinien·ne·s hors du territoire occupé contre leur volonté est un crime de guerre » assène-t-elle.
Mme Callamard précise dans la foulée que si ce déplacement forcé « est commis dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique contre la population civile, il constituerait un crime contre l’humanité». «Les commentaires du président Trump déshumanisent dangereusement les Palestinien·ne·s qui, depuis 16 mois, sont victimes du génocide commis par Israël à Ghaza et vivent depuis des décennies sous occupation illégale et dans un système d’apartheid » s’indigne Agnès Callamard. « La plupart des Palestinien·ne·s de Ghaza sont des descendant·e·s et des rescapé·e·s de la Nakba de 1948. Ils ont déjà été déracinés et dépossédés à plusieurs reprises par Israël et sont privés de leur droit au retour, mais ont continué à lutter pour rester sur leurs terres et défendre leurs droits fondamentaux » fera-t-elle remarquer.
La secrétaire générale d’Amnesty International observe : «Le président Trump a évoqué à plusieurs reprises la destruction, les massacres et les conditions invivables dans la bande de Ghaza, qualifiant celle-ci de “site de démolition” tandis qu’il était assis à côté du Premier ministre israélien Netanyahou. Mais il s’est bien gardé de mentionner la responsabilité du gouvernement israélien dans les causes de cette dévastation. Il n’a pas non plus reconnu le rôle du gouvernement américain dans la fourniture d’armes qui ont été utilisées de manière répétée pour mener des attaques meurtrières et illégales à Ghaza. »
Et de souligner : « Face aux dangereuses menaces proférées par le président Trump, il est plus important que jamais que le reste de la communauté internationale rejette catégoriquement ces propositions et accélère les efforts diplomatiques, conformément au droit international, visant à mettre fin à l’occupation israélienne illégale, démanteler l’apartheid et faire respecter les droits humains pour les Palestinien·ne·s et les Israélien·ne·s. »
Agnès Callamard insiste également pour dire que la population de Ghaza ne doit pas faire l’objet d’un quelconque chantage l’obligeant à renoncer à sa terre : « Amnesty International, dit-elle, met en garde contre le mauvais usage de l’aide humanitaire et de la reconstruction, dont la population a désespérément besoin, comme monnaie d’échange ou comme moyen de contraindre les Palestinien·ne·s de Ghaza à partir ».
Et de conclure : « Aucun État n’a le droit de traiter les membres d’une population protégée vivant sous occupation comme des pions dans un jeu d’échec géopolitique. » Mustapha Benfodil