Ces chaussures en cuir, dont il ne reste bien souvent que la semelle, seraient vieilles de près de 2000 ans. Les origines de leurs gigantesques propriétaires font encore débat.
Une découverte étonnante a récemment eu lieu dans le nord de l’Angleterre, dans la région du Northumberland. Une équipe d’archéologues a exhumé huit chaussures de taille inhabituelle, particulièrement remarquables pour leur époque. Certaines dépassent la pointure 47 actuelle et atteignent même la 49. Fabriquées en cuir, seules les semelles sont généralement bien conservées. Ces chaussures, vieilles de près de deux millénaires, ont été retrouvées dans une fosse jouxtant le fort romain de Magna, près du célèbre mur d’Hadrien. D’après les chercheurs, cette fosse servait à la fois de dispositif défensif militaire et de décharge, où soldats et habitants se débarrassaient de leurs déchets. Cela expliquerait pourquoi les chaussures s’y sont accumulées.
Les fouilles autour du mur d’Hadrien, qui a été construit après le fort de Magna, sont en cours depuis plusieurs années dans le cadre d’un projet soutenu par le Trust Vindolanda et financé par la loterie nationale. À ce jour, 32 chaussures ont été mises au jour sur le site du fort Magna, dont huit ont été classées comme « très grandes ». Elles mesurent au minimum 30 centimètres, l’équivalent d’une pointure 47 selon le système français.
Le 21 mai, l’équipe de fouille de Magna a consigné la découverte d’une première chaussure exceptionnellement grande. Elle mesure 32,6 centimètres, soit une pointure 49, ce qui en fait la plus grande jamais retrouvée dans la collection du Trust. Sa semelle en cuir a attiré l’attention en raison de ses dimensions impressionnantes. Par la suite, les fouilles ont révélé d’autres chaussures anciennes, plusieurs d’entre elles étant également de grande taille.
Sur un autre site voisin, celui de Vindolanda situé à Hexham à une dizaine de kilomètres, plus de 5000 chaussures romaines avaient déjà été découvertes auparavant. Cette collection variée comprend de minuscules chaussons pour nourrissons, des sandales d’été élégantes, ainsi que des bottes de marche. La taille moyenne des chaussures retrouvées y oscille entre 24 et 26 centimètres. Seules quatre ou cinq paires, soit 0,4 % du total, dépassaient les 30 centimètres.
Ce taux élevé de conservation des chaussures dans la région s’explique par les caractéristiques du sol local, très pauvre en oxygène, ce qui a permis à des matériaux organiques comme le cuir, le bois ou le textile de survivre à travers les siècles.
Pour Andrew Birley, directeur du Trust et des fouilles, cette découverte met en lumière les différences physiques et culturelles qui existaient parmi les soldats postés le long du mur d’Hadrien. Elle illustre le fait que les populations de l’époque étaient loin d’être homogènes.
Le fort de Magna accueillait une garnison cosmopolite composée notamment d’archers syriens, de Dalmates, de Bataves, ainsi que de membres des deuxième et vingtième légions Augusta et Valeria Victrix. D’après le site spécialisé Archaeology News, la diversité des pointures pourrait refléter des différences physiques entre ces groupes militaires, ou encore des variations dans l’approvisionnement ou les pratiques culturelles.
Rachel Frame, archéologue principale du projet, souligne que lorsqu’on pense aux Romains, on les imagine souvent comme des Italiens, oubliant l’immensité de l’Empire. Mettre en lumière cette diversité humaine et culturelle à travers des découvertes archéologiques permet de mieux comprendre l’histoire et ses résonances avec le présent. L’équipe espère obtenir des résultats plus précis à la fin de l’année, grâce à des analyses de datation, qui pourraient aider à mieux interpréter ces trouvailles singulières.