Alors que Trump déclare qu’Israël a accepté les termes d’un accord de cessez-le-feu : Les dirigeants israéliens veulent la poursuite de la guerre

03/07/2025 mis à jour: 02:39
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Photo : D. R.

Pendant que le président Donald Trump annonçait qu’Israël a accepté les termes d’un accord pour un cessez-le-feu sans les préciser, à Tel-Aviv, le Premier ministre Netanyahu qui a échoué à adopter une démarche relative à la guerre à Ghaza, promet «d’éradiquer le Hamas de ses racines» sans évoquer l’accord dont parle Donald Trump. Sa coalition gouvernementale menace de se retirer en cas de trêve, alors que son ministre de la Défense rejette tout «compromis» avec le Hamas.

Tard dans la journée de mardi dernier, le président américain, Donald Trump, a écrit sur la plateforme Truth Social : «Israël a accepté les conditions nécessaires pour finaliser le cessez-le-feu de 60 jours, pendant lequel nous travaillerons avec toutes les parties pour mettre fin à la guerre.» S’adressant au Hamas, Trump a averti : «Je souhaite que pour le bien du Moyen-Orient, le Hamas acceptera l’accord parce que la situation (à Ghaza) ne s’améliorera pas, elle ne va que s’empirer», avant d’ajouter que les représentants du Qatar et de l’egypte remettraient «cette proposition finale» au Hamas.
L’annonce a été faite, après la réunion entre le ministre des Affaires Stratégiques, Ron Dermer, proche conseiller du Premier ministre israélien,  Benyamin Netanyahu, à Washington, avec de hauts responsables américains, consacrée entre autres à l’accord pour un cessez-le-feu à Ghaza.
Elle intervient aussi  alors que Netanyahu venait d’ajourner (pour la seconde fois), à samedi prochain, le jour même de son envol à Washington (pour des pourparlers sur des accords avec la Syrie, l’Iran et Ghaza),  sa réunion avec des ministres et des responsables des services de sécurité sur la guerre à Ghaza,  en raison des désaccords entre les partisans de la poursuite des opérations militaires et ceux qui sont contre.
Trump n’a cependant pas donné des précisions sur l’accord que Netanyahu a accepté. Il y a un mois, faut-il le rappeler, Israël avait rejeté un protocole d’accord proposé par les médiateurs, prévoyant un cessez-le-feu temporaire de 60 jours, suivi de négociations menant à une trêve permanente et à l’ouverture des points de passage pour l’aide humanitaire. L’administration Trump  a pointé du doigt le Hamas, l’accusant d’avoir rejeté l’accord, soutenant de fait, la position de Netanyahu. Hier, ce dernier n’a pas parlé de l’accord mais plutôt du Hamas. «Nous libérerons tous les otages, nous éradiquerons le Hamas de ses racines et nous finirons avec l’ère de Hamastan. Le Hamas ne restera pas.
Cette question est pour nous tranchée», a-t-il lancé. Pourtant, la veille Trump avait clairement souligné que les  «conditions nécessaires à la conclusion» d’un cessez-le-feu de 60 jours à Ghaza, au cours duquel des efforts seraient déployés pour mettre fin à la guerre étaient réunies et qu’Israël a accepté la mouture de l’accord présentée par le Qatar. Il a même déclaré que  ses représentants avaient tenu mardi «une réunion longue et constructive avec les Israéliens au sujet de Ghaza». Pour Netanyahu et sa coalition, il est clair que la fin de la guerre ne peut être à l’ordre du jour.
Fuitées par les médias israéliens, les discussions au sein de la réunion de Netanyahu avec des ministres et des responsables de sécurité, sur la position à adopter en ce qui concerne les opérations militaires à Ghaza, sont révélatrices, et laissent croire que l’accord sur la table de négociation, risque de connaître le même sort que celui réservé aux précédentes moutures.

«Tuer l’ennemi, rapatrier les otages…»

Le ministre israélien de la Défense n’a pas manqué de rappeler à partir de Rafah : «Tuer l’ennemi, rapatrier les otages et gagner – telle est notre mission», précisant dans un communiqué : «Nous ne renoncerons à rien ni ne ferons de compromis», avant d’accuser le Hamas  de n’avoir «pas changé » et de vouloir «poursuivre sur sa lancée». Le «pas de compromis», lâché par le ministre de la Défense rejoint la position des ministres de la coalition de Netanyahu, qui ont menacé de se retirer en cas de signature d’un accord de cessez-le-feu. Voulant minimiser la contestation, le chef de la diplomatie de l’Etat hébreu,  Gideon Sa’ar, a écrit sur son compte X : «Une large majorité au sein du gouvernement et de l’opinion publique soutient le plan de libération des détenus.
Si l’occasion se présente, ne la manquez pas.» Cependant, les deux ministres extrémistes, Itamar Ben Gvir de la Sécurité et Bezalel Smotrich, des Finances, ont mis en garde contre un accord de cessez-le-feu, tout en menaçant de faire éclater la coalition pour aller vers des élections. Ils ont  exigé la poursuite de la guerre, l’expulsion de la population de Ghaza et l’arrêt total de l’entrée de l’aide humanitaire. Selon le journal The Haaretz, les deux ont prévu de tenir une réunion pour coordonner leurs efforts  visant à contrecarrer un accord de cessez-le feu et d’échange de prisonniers.
L’opposition a promis, quant à elle, de mettre à disposition du Premier ministre un «filet de sécurité complet» afin de conclure un accord d’échange de prisonniers. Même si en apparence, il y a des divergences sur l’accord de cessez-le-feu avec le Hamas, il n’en demeure pas moins, que sur la question de la poursuite de la guerre il y a pratiquement unanimité. De nombreux médias israéliens ont révélé, hier, que tout accord de cessez-le-feu avec le Hamas «doit être» accompagné «d’une garantie américaine qui permettrait à Israël la reprise de la guerre,  si les conditions de démantèlement de l’infrastructure militaire du mouvement de la résistance, son désarmement et l’exil de ses dirigeants  ne sont pas respectés». 
Or, le Hamas veut la fin définitive de la guerre, le retrait des troupes israéliennes de Ghaza, ainsi que le retour au système onusien de distribution de l’aide humanitaire, mais le Premier ministre israélien campe sur sa décision de revenir à la guerre à n’importe quel moment, de ne pas quitter les positions qu’il a occupées,  alors que Trump avait déclaré qu’il serait  « très ferme » avec  lui sur la nécessité de mettre fin à la guerre. Il a même annoncé la signature d’un un accord de cessez-le-feu et de libération des otages «la semaine prochaine» parce que,  a-t-il souligné, «Netanyahu le souhaite aussi». La presse américaine a évoqué hier des changements superficiels à la mouture de l’accord Witkoff, ce qui suppose que c’est la mouture, revue il y a un mois, qui est remise sur la table, avec quelques retouches.

Les tergiversations israélo-américaines face à l’intransigeance du Hamas

Dans son édition d’hier, le journal londonien Al-Sharq Al-Awsat, a écrit que la réponse du Hamas à la proposition d’accord de l’envoyé de Trump,  Steve Witkoff, «était globalement positive, mais avec des conditions». Cette condition, a expliqué la presse israélienne,  concerne le non-retour à la guerre, à travers une clause « qui rendra difficile la reprise des opérations militaires si les pourparlers sur un cessez-le-feu permanent ne sont pas terminés d’ici la fin de la trêve de 60 jours».
Selon les mêmes sources, le Hamas compte apporter des modifications à la proposition de Witkoff, qui probablement passera par des négociations plus longues. Le mouvement de résistance   palestinienne a proposé la libération des dix otages étalée sur toute la durée de la trêve, plutôt qu’en deux parties, le premier et le septième jour, comme le prévoyait l’offre américaine.
Selon le journal hébreu Times Of Israël, le « changement visait à empêcher Netanyahu d’abandonner les négociations sur un cessez-le-feu permanent après la libération des otages, ou de refuser de s’y engager complètement, comme il l’a fait lors du précédent cessez-le-feu de janvier à mars ». Mais, le Premier ministre israélien a fait de la poursuite de la guerre, une affaire de principe. Il y a un mois, il avait rejeté un protocole d’accord proposé par les médiateurs, accepté par le Hamas,  qui prévoit  un cessez-le-feu temporaire de 60 jours, suivi de négociations menant à une trêve permanente et à l’ouverture des points de passage pour l’aide humanitaire.
Mais, l’administration Trump  l’a soutenu et pointé le doigt accusateur vers la résistance palestinienne, accusée d’avoir mis en échec l’accord. Le Hamas n’a pas manqué de réitérer,  hier,  sa position « intangible » tout en se déclarant « ouvert à un accord de cessez-le-feu qui mettrait fin à la guerre ».  « Le Mouvement est prêt à accepter toute initiative qui mènerait clairement à la fin complète de la guerre », a déclaré à  l’agence de presse française, AFP,  un de ses responsables, Taher al-Nunu.
Hier, en fin de journée, le Hamas a écrit dans un communiqué, qu’il étudiait « les nouvelles propositions » de cessez-le feu reçues par les médiateurs qui, selon lui, «déployaient des efforts intensifs pour combler le fossé entre les parties, parvenir à un accord-cadre et entamer un cycle de négociations sérieuses». Il a expliqué avoir «avec un sens élevé de responsabilité» et mené «des consultations nationales pour discuter des propositions des médiateurs, dans le but de parvenir à un accord qui garantit la fin de l’agression, la réalisation du retrait et la fourniture urgente de secours à la bande de Ghaza ».
Le Mouvement, faut-il le rappeler avait déclaré après l’échec des négociations d’il y a un mois, sa disposition à libéré les 50 otages restants, dont moins de la moitié seraient en vie, en échange d’un retrait israélien complet de Ghaza et de la fin de la guerre. Une offre, qui s’est heurtée à la volonté d’Israël de poursuivre ses opérations militaires jusqu’à ce que le Hamas rende ses armes et s’exile. Les négociations se font, sous l’égide des USA, par l’intermédiaire des médiateurs qataris et égyptiens et sous la supervision de l’envoyée de Trump, Steve Witkoff.
Dès samedi soir, Netanyahu rejoindra son ministre  et proche conseiller Ron Dermer,  à Washington. D’ici là, rien n’est encore acquis. Les plus avertis restent très prudents quant à la fin de la guerre surtout que durant ces derniers jours, Israël a intensifié ses opérations. Hier seulement, près de 200 Palestiniens ont été tués à Ghaza, et des dizaines d’autres ont été blessés dans des frappes et des bombardements israéliens, alors que le bilan des 21 mois de la guerre génocidaire que mène l’armée d’occupation a franchi la barre des 57 000 morts.

 

 

 

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